AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire VALAT et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Pierre,
contre l'arrêt n° 690 de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 24 mai 2005, qui, pour diffamation publique envers un particulier, l'a condamné à 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen relevé d'office, pris de la violation des articles 50 de la loi du 29 juillet 1881, 85 et 86 du Code de procédure pénale ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, si l'action publique est mise en mouvement par la plainte avec constitution de partie civile dès que la consignation a été versée, encore faut-il, en cas d'infraction à la loi du 29 juillet 1881, que ladite plainte réponde aux exigences de l'article 50 de la loi précitée, lesquelles sont prescrites à peine de nullité de la poursuite ; qu'une telle nullité est d'ordre public et doit être soulevée d'office tant par les juges du fond que par la Cour de cassation ;
Attendu que, si une plainte incomplète ou irrégulière peut être validée par le réquisitoire introductif, c'est à la double condition qu'il soit lui-même conforme aux prescriptions de l'article 50 de la loi sur la liberté de la presse et qu'il soit intervenu dans le délai de la prescription que la plainte entachée de nullité n'a pas interrompue ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Claude Y... a porté plainte et s'est constitué partie civile devant le juge d'instruction en raison de propos qualifiés "d'injurieux et diffamatoires" tenus par Jean-Pierre X..., le 8 novembre 2002 ;
que le procureur de la République a, le 13 mars 2003, requis l'ouverture d'une information du chef de diffamation envers un particulier, au visa, notamment, de l'article 32 de la loi du 29 juillet 1881 ; que, par l'arrêt attaqué, Jean-Pierre X... a été déclaré coupable de ce chef ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que la plainte était nulle en ce qu'elle laissait incertaine la qualification retenue par le plaignant et que le réquisitoire du procureur de la République, intervenu plus de trois mois après que les propos auraient été tenus, ne pouvait pallier les insuffisances de la plainte, la cour d'appel, à qui il appartenait de relever d'office la nullité encourue, a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Toulouse, en date du 24 mai 2005 ;
Et attendu que l'action publique et, par voie de conséquence, l'action civile n'ont pas été régulièrement engagées ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Toulouse, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Valat conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Anzani, MM. Beyer, Pometan, Mmes Palisse, Guirimand conseillers de la chambre, Mme Ménotti conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Chemithe ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;