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03/11/2005 | FRANCE | N°04-87368

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 novembre 2005, 04-87368


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller NOCQUET, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI-BOUHANNA, et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Danièla, épouse Y...,

- Y... Eric,

contre l'arrêt de la cour d'

appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 17 novembre 2004, qui, pour escroquerie, a condamné la...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller NOCQUET, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI-BOUHANNA, et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Danièla, épouse Y...,

- Y... Eric,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 17 novembre 2004, qui, pour escroquerie, a condamné la première à 4 mois d'emprisonnement avec sursis, le second à 7 mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1 et 313-1 du Code pénal, des droits de la défense, des articles 2,3,388, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Eric Y... coupable d'escroquerie et en répression l'a condamné à une peine de 7 mois d'emprisonnement intégralement assortie d'une mesure de sursis ;

"aux motifs propres que les premiers juges, après rappel de la procédure et des termes de la prévention, ont exactement relaté les circonstances de la cause ; qu'il convient de s'en rapporter, à cet égard, aux énonciations du jugement déféré ;

que par voie de conclusions au développement desquelles la Cour se réfère expressément, Eric Y... et Danièla X... épouse Y... sollicitent la réformation du jugement entrepris et leur relaxe ; que, se défendant à nouveau de tout agissement délictueux, ils soutiennent que le délit d'escroquerie n'est constitué en aucun de ses éléments, à leur encontre ; que la Cour observe que les prévenus ont repris, au soutien de leur appel, la même argumentation qu'en première instance et n'ont apporté, au terme des débats, aucun moyen nouveau de nature à faire échec aux énonciations du jugement déféré qui, par des motifs pertinents dont il est fait adoption, a estimé que le délit dénoncé par la prévention était caractérisé, tant en son élément matériel qu'en son élément intentionnel, à la charge d'Eric Y... et de Danièla X... épouse Y... ; qu'il convient de confirmer la décision attaquée sur les déclarations de culpabilité ;

"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo" a commandé le 30 juin 1996 différents matériels médicaux à la société Jag Médical, laquelle a adressé une facture détaillée pour un montant de 972.759,60 francs portant mention d'une date de facturation " le 30 juillet 1996 ", la livraison devant être effectuée à la même date ; que le 26 juillet 1996, Danièla X... épouse Y..., en qualité de gérante de la Sarl "le 140 Avenue Victor Hugo" a signé un procès-verbal de prise en charge, désignant le matériel loué ainsi "divers matériels concernant le bloc opératoire et salle de réveil et de surveillance post-anesthésie suivant détail sur facture pro-forma 960605", pour un montant de 806.000 francs, portant les mentions selon lesquelles le locataire déclare notamment que le matériel " a été intégralement livré ", est " conforme " à la commande ayant fait l'objet du contrat avec le bailleur, est " en bon état de marche ", est " réglementaire ", et aux termes duquel il était précisé " en conséquence, le locataire déclare accepter le matériel sans restriction ni réserve autorisant ainsi le bailleur à en effectuer le règlement " ; que sur présentation du bon de livraison signé par la gérante de la SARL " le 140 Avenue Victor Hugo", la BNP Lease a fait virer la somme de 972.759,60 francs à la société Jag Médical, le 31 juillet 1996 ; qu'il est reproché aux prévenus, en falsifiant le procès-verbal de prise en charge du matériel, d'avoir ainsi effectué des man uvres frauduleuses aux fins de tromper la BNP Lease pour la déterminer à remettre à la société Jag Médical la somme de 972.759,60 francs ; En ce qui concerne Eric Y..., il a été mis directement en cause par Philippe Z... qui indique que c'est lui qui a dit " qu'on allait faire un papier disant que j'avais livré le matériel alors que je ne l'avais pas livré pour que l'argent soit débloqué et afin que le démarrage du chantier puisse intervenir grâce à cet argent M. A... a pu commencer les travaux " ; (les travaux étant prévus pour la somme de 1.326.000 francs toutes taxes comprises alors qu'ils étaient financés par un crédit de seulement 800.000 francs) ; que par ailleurs, il est établi que Eric Y... a fait reprendre du matériel d'occasion qu'il possédait dans un ancien cabinet, moyennant la somme de 90.000 francs, le prix étant surévalué, ce qu'il a lui-même reconnu, matériel comprenant un autoclave figurant sur la facture pour la somme de 20.000 francs ainsi qu'une trousse chirurgicale qui ne figure pas sur la facture, ce qui démontre que malgré ses déclarations, il savait que le matériel n'était pas neuf ;

qu'il doit être souligné aussi qu'il ressort d'une lettre du 1er août 1996 versée aux débats qu'Eric Y... suivait de près les achats de matériel ; que de même, une lettre du 9 septembre 1996 versée aux débats montre son accord sur les manoeuvres effectuées par son épouse et par Philippe Z... puisqu'il écrivait à celui-ci : la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo" a accepté de débloquer les sommes pour le matériel médical financé et réglé à 100 % par un leasing, bien que tout le matériel ne soit pas livré et en état de marche à ce jour, avec l'accord de tous les associés et vous-même pour justement la bonne marche du projet Victor Hugo " ; qu'Eric Y... prétend que la BNP Lease était d'accord avec les man uvres effectuées pour obtenir le déblocage des fonds mais il doit être souligné que rien ne permet d'accréditer cette thèse ; qu'en revanche, les différents éléments qui viennent d'être analysés établissent sans ambiguïté que non seulement Eric Y... était informé de l'absence de livraison du matériel, matériel de surcroît d'occasion alors qu'il aurait dû être neuf, mais encore, qu'il a lui-même organisé la mise en place du procédé permettant le déblocage des fonds en demandant à Philippe Z... et à Danièla Y... son épouse, de signer un faux bon de livraison, effectuant ainsi les actes positifs constituant des manoeuvres frauduleuses ; Sur le préjudice de la victime et l'intention frauduleuse, les prévenus ont soutenu qu'il n'y avait aucun préjudice pour la société BNP Lease ; qu'outre que le délit d'escroquerie peut être caractérisé même en l'absence de tout préjudice subi par la victime, dès lors que la remise a été obtenue par des moyens frauduleux, il doit être constaté que le préjudice de la BNP Lease existe en l'espèce dans la mesure où étant l'acheteur d'un matériel neuf d'une valeur de 970.000 francs, elle s'est retrouvée propriétaire d'un matériel d'occasion, ou même de réforme, qui a été évalué à par un commissaire-priseur à la somme de 150.000 francs en valeur d'utilisation et à 50.000 francs en valeur de réalisation ; que les prévenus ont soutenu également que les époux Y... s'étant portés cautions du contrat de location, ils n'avaient aucun intérêt à escroquer la BNP Lease, et Philippe Z... que cette "opération" ne lui rapportait aucun profit ; que s'il doit être relevé que le profit réalisé par l'auteur de l'escroquerie n'est pas un élément constitutif du délit, force est de constater que tant les époux Y... que Philippe Z... avaient un intérêt ; qu'en effet, Eric Y... a souligné à plusieurs reprises, notamment dans les correspondances, ci-dessus analysées, que le déblocage des fonds était nécessaire pour "la bonne marche du projet Victor Hugo " ;

qu'il apparaît certes que les époux Y... avaient une situation importante en raison de l'activité très rémunératrice d'Eric Y..., étaient propriétaires notamment d'un appartement à Neuilly, mais il apparaît aussi qu'il étaient fortement endettés et rencontraient des problèmes de trésorerie ainsi que le démontre clairement la transaction conclue avec la BNP versée aux débats ; que le déblocage des fonds a donc permis de remédier à cette absence de trésorerie et à faire avancer les travaux d'installation du 140 avenue Victor Hugo ; que par ailleurs, l'argument relatif à leurs engagements de cautions est inopérant puisque les époux Y... sont en fin de compte bénéficiaires de ces engagements car malgré la mise en liquidation de la Sarl "le 140 Avenue Victor Hugo", Eric Y... poursuit son activité professionnelle dans ses locaux et que la SCI dont les époux Y... sont associés deviendra propriétaire desdits locaux à l'issue du contrat de location-vente immobilier conclu avec la BNP ;

"alors d'une part, que les juridictions correctionnelles ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'aux termes de l'ordonnance de renvoi en date du 23 janvier 2002, qui seule fixe les limites de la prévention, il était reproché à Eric Y... d'avoir commis le délit d'escroquerie, en employant des manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en falsifiant le procès-verbal de prise en charge du matériel médical et en le remettant à la banque, pour la déterminer à remettre une somme de 972.759,60 francs à la société Jag Médical ; qu'en l'espèce, pour déclarer le demandeur coupable d'escroquerie, la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés des premiers juges, qu'Eric Y... aurait suggéré à Philippe Z... d'établir un document permettant le déblocage des fonds indépendamment de la livraison du matériel litigieux, qu'il aurait fait reprendre du matériel d'occasion, qu'il suivait de près les achats de matériel, avait donné son accord sur les manoeuvres effectuées par ses coprévenus, et qu'il était informé de l'absence de livraison du matériel ; qu'en retenant ainsi, à la charge du demandeur, des faits non visés à la prévention, et à propos desquels il ne résulte pas de l'arrêt que l'intéressé ait accepté d'être jugé, la cour d'appel a violé l'article 388 du Code de procédure pénale ;

"alors d'autre part, que nul n'est pénalement responsable que de son propre fait ; qu'en l'espèce, il était reproché à Eric Y... d'avoir commis le délit d'escroquerie en employant des manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en falsifiant le procès-verbal de prise en charge du matériel médical et en le remettant à la banque, pour la déterminer à remettre une somme de 972.759,60 francs à la société Jag Médical ; que, dès lors, en se bornant à énoncer, pour retenir la culpabilité du prévenu, qu'Eric Y... aurait suggéré à Philippe Z... d'établir un document permettant le déblocage des fonds indépendamment de la livraison du matériel litigieux, qu'il aurait fait reprendre du matériel d'occasion, qu'il suivait de près les achats de matériel, avait donné son accord sur les manoeuvres effectuées par ses coprévenus, et qu'il était informé de l'absence de livraison du matériel, la cour d'appel, qui ne caractérise pas la participation personnelle de l'exposant à la falsification du procès-verbal de prise en charge, ni à la remise de ce document à la banque, a violé l'article 121-1 du Code pénal" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 313-1 du Code pénal, 2, 3, 388, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Danièla X... épouse Y... coupable d'escroquerie et en répression l'a condamnée à une peine d'emprisonnement de 4 mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs propres, que les premiers juges, après rappel de la procédure et des termes de la prévention, ont exactement relaté les circonstances de la cause ; qu'il convient de s'en rapporter, à cet égard, aux énonciations du jugement déféré ;

que par voie de conclusions au développement desquelles la Cour se réfère expressément, Eric Y... et Danièla X... épouse Y... sollicitent la réformation du jugement entrepris et leur relaxe ; que, se défendant à nouveau de tout agissement délictueux, ils soutiennent que le délit d'escroquerie n'est constitué en aucun de ses éléments, à leur encontre ; que la Cour observe que les prévenus ont repris, au soutien de leur appel, la même argumentation qu'en première instance et n'ont apporté, au terme des débats, aucun moyen nouveau de nature à faire échec aux énonciations du jugement déféré qui, par des motifs pertinents dont il est fait adoption, a estimé que le délit dénoncé par la prévention était caractérisé, tant en son élément matériel qu'en son élément intentionnel, à la charge d'Eric Y... et de Danièla X... épouse Y... ; qu'il convient de confirmer la décision attaquée sur les déclarations de culpabilité (arrêt, page 5) ;

"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo" a commandé le 30 juin 1996 différents matériels médicaux à la société Jag Médical, laquelle a adressé une facture détaillée pour un montant de 972.759,60 francs portant mention d'une date de facturation "le 30 juillet 1996", la livraison devant être effectuée à la même date ; que le 26 juillet 1996, Danièla X... épouse Y..., en qualité de gérante de la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo" a signé un procès-verbal de prise en charge, désignant le matériel loué ainsi " divers matériels concernant le bloc opératoire et salle de réveil et de surveillance post-anesthésie suivant détail sur facture pro-forma 960605", pour un montant de 806.000 francs, portant les mentions selon lesquelles le locataire déclare notamment que le matériel " a été intégralement livré ", est " conforme " à la commande ayant fait l'objet du contrat avec le bailleur, est " en bon état de marche ", est " réglementaire ", et aux termes duquel il était précisé " en conséquence, le locataire déclare accepter le matériel sans restriction ni réserve autorisant ainsi le bailleur à en effectuer le règlement " ; que sur présentation du bon de livraison signé par la gérante de la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo", la BNP Lease a fait virer la somme de 972.759,60 francs à la société Jag Médical, le 31 juillet 1996 ;qu'il est reproché aux prévenus, en falsifiant le procès-verbal de prise en charge du matériel, d'avoir ainsi effectué des manoeuvres frauduleuses aux fins de tromper la BNP Lease pour la déterminer à remettre à la société Jag Médical la somme de 972.759,60 francs ; En ce qui concerne Danièla X... épouse Y..., celle-ci a reconnu avoir signé le bon de prise en charge du matériel mais a prétendu que lors de la livraison, étant occupée par les travaux en cours, elle n'avait pas vérifié le matériel, étant en outre persuadée, compte tenu des relations de confiance existant entre les parties, que tout le matériel était là ; qu'elle a également reconnu qu'elle savait que ce document permettait le virement de la somme de 972.759,60 francs à la société Jag Médical ; que lors de l'audience, elle a fermement maintenu cette position, devant toutefois reconnaître qu'elle savait que tout le matériel n'était pas livré mais qu'il était " à disposition " ; qu'elle a déclaré que c'est seulement par la suite qu'elle a cherché à savoir où se trouvait le matériel manquant et qu'elle a alors adressé des sommations de restituer à la société Jag Médical ; qu'il doit être souligné que cette affirmation est totalement contredite par les déclarations de Danièla Y... elle-même, qui précisait dans sa plainte que " mise en confiance " par Jean-Yves B..., et "assurée de la confiance dont il témoignait à l'égard de la société Jag Médical, la demanderesse a accepté a) pour le matériel médical, que le montant intégral du financement du crédit-bail soit versé à Jag Médical, avant la livraison effective et complète du matériel.. " ;

que force est de constater que même si, contrairement à ce que soutient Philippe Z..., une partie du matériel était livrée lorsque Danièla Y... a signé le bon de prise en charge du matériel, en attestant que " le matériel a été intégralement livré", est "conforme" à la commande, Danièla Y... a commis un faux, destiné à être utilisé pour obtenir le versement des fonds par la BNP LEASE, qui ne les aurait pas versés en l'absence de ce document, effectuant ainsi un acte positif s'analysant en une manoeuvre frauduleuse ; que sur le préjudice de la victime et l'intention frauduleuse, le préjudice de la BNP Lease existe en l'espèce dans la mesure où étant l'acheteur d'un matériel neuf d'une valeur de 970.000 francs, elle s'est retrouvée propriétaire d'un matériel d'occasion, ou même de réforme, qui a été évalué par un commissaire-priseur à la somme de 150.000 francs en valeur d'utilisation et à 50.000 francs en valeur de réalisation ; que les prévenus ont soutenu également que les époux Y... s'étant portés cautions du contrat de location, ils n'avaient aucun intérêt à escroquer la BNP Lease, et Philippe Z... que cette "opération" ne lui rapportait aucun profit ; que s'il doit être relevé que le profit réalisé par l'auteur de l'escroquerie n'et pas un élément constitutif du délit, force est de constater que tant les époux Y... que Philippe Z... avaient un intérêt ; qu'en effet, Eric Y... a souligné à plusieurs reprises, notamment dans les correspondances, ci-dessus analysées, que le déblocage des fonds était nécessaire pour "la bonne marche du projet Victor Hugo" ;

qu'il apparaît certes que les époux Y... avaient une situation importante en raison de l'activité très rémunératrice d'Eric Y..., étaient propriétaires notamment d'un appartement à Neuilly, mais il apparaît aussi qu'il étaient fortement endettés et rencontraient des problèmes de trésorerie ainsi que le démontre clairement la transaction conclue avec la BNP versée aux débats ;que le déblocage des fonds a donc permis de remédier à cette absence de trésorerie et à faire avancer les travaux d'installation du 140 avenue Victor Hugo ; que par ailleurs, l'argument relatif à leurs engagements de cautions est inopérant puisque les époux Y... sont en fin de compte bénéficiaires de ces engagements car malgré la mise en liquidation de la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo", Eric Y... poursuit son activité professionnelle dans ses locaux et que la SCI dont les époux Y... sont associés deviendra propriétaire desdits locaux à l'issue du contrat de location-vente immobilier conclu avec la BNP ;

"alors qu'en matière d'escroquerie, l'intention de causer un préjudice à autrui, qui constitue un élément constitutif du délit, doit exister au moment de l'accomplissement des man uvres frauduleuses ; qu'en estimant dès lors, qu'en attestant que le matériel objet du contrat de crédit-bail avait été intégralement livré et était conforme à la commande, Danièla Y... a commis un faux ayant déterminé la banque à verser le prix de vente à la société Jag Médical, pour en déduire qu'elle doit être déclarée coupable d'escroquerie, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par les conclusions d'appel de la prévenue si, au moment où elle signait le procès-verbal de prise en charge, l'intéressée savait déjà que l'intégralité du matériel ne serait jamais livrée et, partant, si elle avait conscience de causer un préjudice à l'établissement de crédit, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du Code pénal, 1382 du Code civil, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale,défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, qui a déclaré Eric et Danielà Y... coupables d'escroquerie, a condamné les prévenus à payer à la société BNP Paribas Lease Group, partie civile, la somme de 148.296,24 euros à titre de dommages-intérêts ;

"aux motifs propres que dans ses conclusions d'appel, la société BNP Paribas Lease Group, anciennement BNP Lease, venant aux droits de la société Natio Equipement, sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu il a condamné solidairement Danièla X..., épouse Y..., Eric Y... et Philippe Z... à lui payer la somme de 148.296,25 euros à titre de dommages-intérêts ; qu'elle demande par ailleurs à la Cour de lui allouer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; que les premiers juges ayant exactement évalué le préjudice direct et personnel subi par la partie civile du fait des agissements délictueux des époux Y... et de Philippe Z..., la Cour confirmera la décision attaquée en toutes ses dispositions civiles ;

"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que le préjudice de la BNP Lease existe en l'espèce dans la mesure où étant l'acheteur d'un matériel neuf d'une valeur de 970.000 francs, elle s'est retrouvée propriétaire d'un matériel d'occasion, ou même de réforme, qui a été évalué par un commissaire-priseur à la somme de 150.000 francs en valeur d'utilisation et à 50.000 francs en valeur de réalisation ;( );que la société BNP Lease se constitue partie civile et demande au tribunal à voir condamner Philippe Z..., Jean-Yves B..., Eric Y... et Danièla X... épouse Y... à lui payer la somme égale au financement accordé à la Sarl "le 140 avenue Victor Hugo" à titre de dommages-intérêts, à savoir la somme de 972.759,60 francs, soit 148.296,24 euros ; qu'il y a lieu de recevoir la BNP Lease en sa constitution de partie civile et de faire droit à sa demande dans les termes du dispositif de cette décision ;

"alors d'une part, que conformément au principe de la réparation intégrale, les dommages-intérêts doivent être évalués de façon à replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu, sans toutefois lui procurer d'enrichissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait condamner les prévenus, à titre de réparation, à régler à la partie civile la somme de 148.296,24 euros, représentant la totalité du financement accordé par l'établissement de crédit, sans répondre aux conclusions d appel d'Eric Y..., d'une part, de Daniéla X... épouse Y..., d'autre part, qui faisaient valoir qu'ils avaient, en qualité de cautions, commencé à rembourser une partie des sommes versées par la banque en exécution du contrat de crédit-bail, de sorte qu'en cet état, le montant de l'indemnisation due à la partie civile ne pouvait être égale à la somme de 148.296,24 euros représentant la totalité du financement accordé par la banque ;

"alors d'autre part, qu en faisant droit intégralement aux demandes de la partie civile qui, à titre de dommages-intérêts, réclamait l'allocation d une somme de 148.296,24 euros, représentant le montant total du financement accordé au crédit-preneur, tout en relevant que le matériel effectivement livré qui, en exécution du contrat de crédit-bail, était demeuré la propriété de la banque - avait tout de même une valeur résiduelle, selon évaluation d'un commissaire-priseur, de l'ordre de 150.000 francs, ce dont il résulte que cette somme devait, pour évaluer le préjudice matériel de la banque, nécessairement venir en déduction du montant total du financement accordé, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes susvisés, ensemble le principe de la réparation intégrale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans excéder la limite de sa saisine et sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, l'escroquerie dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 1 500 euros la somme que Danièla X... et Eric Y... devront payer à la BNP PARIBAS LEASE GROUP au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Nocquet conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-87368
Date de la décision : 03/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 novembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 nov. 2005, pourvoi n°04-87368


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.87368
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