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03/11/2005 | FRANCE | N°04-85787

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 novembre 2005, 04-85787


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller THIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de Me SPINOSI, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Daniel,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BASTIA, chambre correctionnelle, en date du 8 septembre 2004, qui, p

our abus de confiance, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement, dont un an avec sursis,...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller THIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de Me SPINOSI, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Daniel,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BASTIA, chambre correctionnelle, en date du 8 septembre 2004, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement, dont un an avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 du Code de procédure pénale, 313-1 et 314-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique soulevée par Daniel X... et déclaré ce dernier coupable des faits reprochés ;

"aux motifs que, " si en principe la prescription (3 années pour les délits) court du jour où l'infraction est commise, le point de départ du délai, en cas d'infraction non apparente pour la victime, est reporté au jour où cette dernière a connaissance de sa commission ; en l'espèce, il ressort du dossier et des débats à l'audience que, même si la dissolution de la SCI X... - Marina Di Caprone a été annoncée dans le journal Nice-Matin le 17 novembre 1994, ( ) rien ne pouvait l'inciter (Germaine Y...) à prêter attention aux annonces légales mentionnées en petits caractères dans un espace réduit du journal local qu'elle n'était pas tenue de lire ; il en ressort ensuite que, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, ce n'est que par courrier du 9 septembre 1996 que Germaine Y..., par l'intermédiaire de son avocat, a écrit à Daniel X... pour lui réclamer le paiement de la somme remise ; cette date, qui est celle à laquelle Germaine Y... a constaté, en l'absence de réponse, que Daniel X... n'avait pas respecté ses droits et qu'une infraction pénale pouvait avoir été commise, est donc le point de départ du délai de prescription ( ) ; que Daniel X... avait manifestement l'intention dès le départ de la tromper en lui faisant croire à l'acquisition d'un bien immobilier en sachant que tel ne serait jamais le cas, ceci afin d'obtenir d'elle le versement d'une somme d'argent maximale à des fins strictement personnelles " ;

"alors, d'une part, que, selon les propres constatations de l'arrêt attaqué, Daniel X... se serait rendu coupable d'escroquerie, infraction instantanée consommée par la remise des fonds, meubles, obligations ou billets frauduleusement obtenus, dont le point de départ de la prescription est le jour de l'acte de consommation de l'infraction, c'est-à-dire le jour de la remise prétendument frauduleuse, et non point le jour où Germaine Y... aurait constaté que Daniel X... n'avait pas respecté ses droits ; qu'ainsi, en refusant de constater la prescription de l'action introduite le 17 mars 1998 visant l'escroquerie qu'aurait commise Daniel X..., lequel aurait trompé Germaine Y... en lui faisant croire à l'acquisition d'un bien immobilier pour obtenir d'elle le versement d'une somme d'argent, qui lui sera remise en mai 1992, c'est-à-dire plus de trois ans avant la plainte avec constitution de partie civile du 17 mars 1998, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse la prescription du délit d'abus de confiance, à le supposer caractérisé, devait commencer à courir, sauf dissimulation de l'affectation réelle des fonds, du jour où la victime prétendue a pu connaître le détournement ou la dissipation, et non du jour où elle l'a effectivement constaté ; qu'en fixant, ainsi, le point de départ de la prescription à la date à laquelle Germaine Y... a constaté l'absence de réponse à sa demande en remboursement de la somme remise, soit le 9 septembre 1996, et non à la date de la publication de la dissolution de la SCI dans laquelle elle détenait des parts, le 17 novembre 1994, la cour d'appel, qui ne caractérisait pas la dissimulation de cet événement qui matérialisait le détournement litigieux, a méconnu les textes susvisés" ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de prescription de l'action publique, l'arrêt attaqué retient que la partie civile, qui a remis à Daniel X... une somme de 1 million de francs au mois de mai 1992, afin d'acquérir des parts d'une société civile immobilière et d'investir dans une opération à réaliser par cette société, à l'issue de laquelle elle devait obtenir la propriété de plusieurs appartements, n'a pu connaître le détournement de cette somme, par le prévenu, qu'après lui en avoir vainement réclamé le remboursement par lettre du 9 septembre 1996, et qu'ainsi, l'action publique n'était pas éteinte lors du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile, le 17 mars 1998 ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que le prévenu était poursuivi sous la seule qualification d'abus de confiance, la cour d'appel, qui a souverainement fixé le jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 et 314-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et contradiction de motifs, manque de base légale, violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, méconnaissance des droits de la défense, excès de pouvoir ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement en date du 19 septembre 2003 du tribunal correctionnel de Bastia ayant déclaré Daniel X... coupable des faits qui lui étaient reprochés ;

"aux motifs des premiers juges que Daniel X... est prévenu d'avoir détourné ou dissipé au préjudice de Germaine Y... et de Jean-Louis Y..., qui en étaient propriétaires, des deniers ou écrits contenant ou opérant obligation ou décharge qui ne lui avaient été remis qu'à charge de les rendre, représenter ou en faire un usage déterminé, en l'espèce un acte de cession de parts sociales signé entre les parties le 14 avril 1992, et en dissipant la somme de un million de francs qui avait été confiée pour l'acquisition de biens immobiliers gérés par la SCI, infraction prévue par l'article 313-1, alinéa 1, du Code pénal ;

"et aux motifs propres que " le tribunal a déclaré Daniel X... coupable d'escroquerie ( ) ; en l'espèce ( ) il ressort d'abord que Daniel X..., à cette époque salarié du Crédit Lyonnais, a pris contact avec Germaine Y... en mai 1992 ( ) ;

que Daniel X... a fait signer à Germaine Y..., le 14 avril 1992, un acte de cession de parts de la SCI X... - Marina Di Caprone, à hauteur de 5 000 francs pour 50 parts, et en conséquence que cette dernière est devenue associée de cette société civile ; ( ) or il est démontré qu'après cette cession de parts et le versement du million de francs, rien n'a jamais été entrepris en ce sens, la SCI n'ayant jamais aucune activité quelconque ( ) ; ceci prouve que dès le mois de mai 1992 Daniel X... savait que cette SCI dont il était le gérant ne construirait jamais rien ( ) ; il avait manifestement l'intention dès le départ de la (Germaine Y...) tromper en lui faisant croire à l'acquisition d'un bien immobilier en sachant que tel ne serait jamais le cas, ceci afin d'obtenir d'elle le versement d'une somme d'argent maximale à des fins strictement personnelles ; Daniel X... a donc bien détourné l'argent reçu de sa finalité exclusive, et a ainsi commis l'infraction d'abus de confiance " ;

"alors, d'une part, que l'arrêt, qui constatait que le prévenu avait voulu tromper Germaine Y... en lui faisant croire à l'existence d'une entreprise fictive pour obtenir d'elle le versement d'une somme d'argent, ne pouvait déduire de ces constatations que Daniel X... avait commis l'infraction d'abus de confiance, qui suppose une remise préalable et spontanée de la chose, ensuite détournée ; que, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que pas davantage l'arrêt n'a justifié une condamnation du chef d'escroquerie en constatant tout à la fois que Daniel X... avait détourné l'argent reçu de Germaine Y... de sa finalité exclusive à des fins personnelles, et qu'il avait trompé la partie civile pour obtenir d'elle le versement d'une somme d'argent à des fins personnelles, en lui faisant croire à l'acquisition d'un bien immobilier ; qu'en effet ces constatations de fait contradictoires sont aussi exclusives l'une de l'autre dans la mesure où elles créent une incertitude sur le point de savoir si la remise a été provoquée par les manoeuvres frauduleuses, ou si la remise a précédé et permis le détournement des fonds de leur finalité ; qu'en l'état l'arrêt attaqué n'est pas légalement motivé ;

"et alors, enfin, que l'incertitude qui pèse tant sur les faits exacts visés par la prévention que sur ceux retenus par la juridiction de jugement ainsi que sur leur qualification prive la condamnation prononcée de toute base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'abus de confiance dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que Daniel X... devra payer à Germaine Y... au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Thin conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-85787
Date de la décision : 03/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de BASTIA, chambre correctionnelle, 08 septembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 nov. 2005, pourvoi n°04-85787


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.85787
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