AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq octobre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Patrick,
- Y... Joseph,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 8 novembre 2004, qui, pour injures publiques envers des citoyens chargés d'un mandat public, les a condamnés chacun à 1 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux deux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 388, 512, 591 à 593 du Code de procédure pénale, 23, 29 et 33, alinéa 1er, de la loi du 29 juillet 1881, violation des droits de la défense et des articles 6 I et 6 III a et b de la Convention européenne des droits de l'homme, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a reconnu coupables et condamné Patrick X... et Joseph Y... en qualité d'auteurs du délit d'injures publiques envers un citoyen chargé d'un mandat public ;
"aux motifs que Patrick X... et Joseph Y... ont été poursuivis pour complicité d'injures publiques envers des personnes investies d'un mandat public, la citation visant les articles 23, 29, alinéa 2, et 33, alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881 ; que dans le journal " La Provence " ont été rapportés des propos qu'ils avaient tenus au cours de deux réunions publiques ; que le caractère injurieux de ces propos n'est pas contesté ; que, cependant, seuls les auteurs des propos ayant été poursuivis, ceux-ci, par application de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881, doivent être déclarés coupables du délit poursuivi en tant qu'auteurs principaux " ;
"alors que la citation visait la complicité d'injures publiques par voie de presse, et non le délit d'injures au cours d'une réunion publique ; qu'en condamnant Patrick X... et Joseph Y... en qualité d'auteurs du délit d'injures publiques, et en requalifiant in fine dans son arrêt les faits dénoncés dans la citation directe, sans avoir informé les prévenus de ce changement de qualification afin qu'ils puissent exercer leurs droits de la défense sur ce point d'une manière concrète, effective et en temps utile, la cour d'appel a violé les articles 388 et 512 du Code de procédure pénale, ainsi que les articles 6 I et 6 III a et b de la Convention européenne des droits de l'homme" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le maire et les conseillers municipaux de La Ciotat ont cité devant le tribunal correctionnel Patrick X... et Joseph Y... du chef de complicité d'injures publiques envers des citoyens chargés d'un mandat public, ensuite de la parution, dans le quotidien régional "La Provence", d'articles de presse reproduisant des propos que ceux-ci avaient tenus au cours de réunions publiques à l'intention de la nouvelle équipe municipale et ainsi libellés "Les affaires et les voyous sont de retour" et "... un groupe composé d'une majorité d'arrivistes, d'opportunistes, quand il ne s'agit pas tout bonnement d'escrocs, pour l'instant dissimulés derrière la fausse bonhomie de leur chef d'occasion" ;
Attendu qu'après avoir relevé le caractère injurieux des propos litigieux qui visaient le maire et les conseillers municipaux en raison de leur appartenance à la nouvelle majorité municipale et avaient vocation à être publiés, l'arrêt attaqué retient qu'en application de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881, les prévenus, étant seuls poursuivis, doivent être déclarés coupables du délit en tant qu'auteurs principaux ;
Attendu qu'en cet état, les demandeurs ne sauraient se faire un grief de ce que les juges du second degré, sans débat contradictoire, aient requalifié en délit d'injures la complicité de cette infraction seule visée dans l'acte introductif d'instance, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que, contrairement à ce qu'énonce l'arrêt attaqué, les propos retenus à la charge des prévenus caractérisent leur participation à la commission de l'infraction en qualité de complices, peu important que le directeur de publication de l'organe de presse les ayant diffusés n'ait pas été poursuivi, de sorte que la requalification n'avait pas lieu d'être ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;