AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu l'article 16 d de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957, ensemble l'article 5 du protocole du 22 novembre 1984 n° VII, additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que la décision d'une juridiction étrangère constatant une répudiation unilatérale du mari sans donner d'effet à l'opposition éventuelle de la femme et privant l'autorité compétente de tout pouvoir autre que celui d'aménager les conséquences financières de cette rupture du lien matrimonial, est contraire au principe d'égalité des époux lors de la dissolution du mariage, que la France s'est engagée à garantir à toute personne relevant de sa juridiction, et donc à l'ordre public international, dès lors que les deux époux sont domiciliés en France ;
Attendu que M. X... et Mme El Y..., tous deux de nationalité marocaine, se sont mariés au Consulat général du Maroc à Bordeaux en 2001 ; que Mme El Y... a présenté une requête en séparation de corps devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Montauban ; que M. X... a soulevé l'irrecevabilité de la demande, le divorce ayant été constaté par décision du tribunal de première instance d'Al Hoceima (Maroc) du 18 mars 2002 ;
Attendu que, pour reconnaître la décision marocaine et dire irrecevable la demande de séparation de corps, l'arrêt retient d'abord que le tribunal marocain était compétent, les deux époux étant de nationalité marocaine, et qu'il avait été saisi sans fraude, ensuite que la femme avait été convoquée pour une tentative de conciliation devant le Consul général du Maroc à Toulouse et enfin que les droits pécuniaires de l'épouse avaient été préservés ; qu'en statuant ainsi, alors que le jugement marocain consacrait la répudiation de Mme El Y... par son époux et que les deux époux étaient domiciliés en France, la cour d'appel, qui devait faire respecter le principe d'égalité des époux, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille cinq.