AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que, par actes notariés du 6 et du 27 août 1989, Marthe Le X... a fait donation à M. Y... de ses droits indivis sur des parcelles de terrain ; que les époux Z..., coïndivisaires, ont assigné celui-ci, ainsi que les héritiers de Marthe Le X..., afin de faire juger que ces donations constituaient des ventes déguisées et que la simulation, destinée à faire échec au droit de préemption prévu par l'article 815-14 du Code civil, était frauduleuse ; qu'ils ont en conséquence demandé la nullité de l'opération, tant sur le fondement des articles 815-14 et 815-16 du Code civil que sur le fondement des articles 1131 et 1133 du même Code ;
Attendu que le pourvoi fait grief à la cour d'appel d'avoir rejeté cette demande, alors, selon le moyen, qu'est illicite la cause d'un contrat qui tend à réaliser une fraude ; que selon l'arrêt attaqué, M. Y... s'était livré à une "simulation" qui "avait certes pour but d'éluder les droits que les époux Z... tenaient de l'article 815-14 du Code civil " ; qu'il devait en déduire que les actes litigieux visaient, par leur forme trompeuse délibérément choisie par les parties, à réaliser une fraude aux droits des exposants; qu'en estimant que la cause de ces actes n'aurait pas été illicite, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1131 et 1133 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que Marthe Le X..., en souscrivant les actes secrets litigieux, recherchait un avantage financier, tandis que M. Y... voulait empêcher une opération de construction qui aurait pu gêner sa vue depuis la parcelle voisine dont il était déjà propriétaire ; que la cour d'appel en a exactement déduit que la cause de l'acte secret n'était pas illicite, de sorte que la cession n'était pas nulle en elle-même et que le droit pour les époux Z... de se prévaloir de cet acte et de la qualification d'acte à titre onéreux qu'il révélait constituait en conséquence une sanction suffisante leur permettant ensuite de réclamer la nullité de la vente sur le fondement des dispositions de l'article 815-16 du Code civil, dans la mesure où cette action n'aurait pas été atteinte par la prescription ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux Z... à payer à M. Y... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille cinq.