AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... employé depuis le 29 décembre 1990 par la société Mazet comme chauffeur, et délégué du personnel, a participé du 18 juin au 31 juillet 1995 à une grève pour contester les conditions de mise en oeuvre dans l'entreprise du contrat de progrès relatif au temps de service des conducteurs grands routiers ; qu'après sa mise à pied et le refus de l'inspecteur du travail d'autoriser son licenciement, il a repris son activité et a saisi le conseil de prud'hommes de demandes tendant à la réparation de son préjudice et au paiement des jours de grève ; qu'il a démissionné de son emploi le 6 mai 1996 en invoquant les conditions de travail imposées par l'employeur depuis la reprise du travail ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée au paiement des jours de grève pour des motifs pris de la violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que les juges du fond ont relevé que l'employeur avait de façon unilatérale procédé à une réduction du temps de travail d'une partie des salariés, ce qui avait pour résultat une réduction de leur rémunération ; qu'ils ont ainsi caractérisé la situation contraignante dans laquelle les salariés se sont trouvés, les obligeant à cesser le travail pour faire respecter leurs droits essentiels directement lésés par le manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les trois premiers moyens réunis du pourvoi principal :
Vu les articles 455 du nouveau Code de procédure civile et L. 425-1 du Code du travail ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X... en paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts, la cour d'appel, statuant sur renvoi (Soc. 24 avril 2003), a retenu que l'examen des documents salariaux produits relatifs à l'exécution du contrat de travail permettait de constater qu'il avait été engagé à Aubenas et qu'il ne pouvait pas être utilement reproché à l'employeur de lui faire effectuer des livraisons et des enlèvements à partir de cette ville ;
Qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions du salarié qui alléguait que l'employeur avait, depuis la reprise de travail, modifié sans son accord ses conditions de travail et manqué à ses obligations contractuelles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes de paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêt, l'arrêt rendu le 3 mai 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Mazet aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Mazet à payer à M. X... la somme de 900 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille cinq.