AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PELLETIER, les observations de Me SPINOSI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...
Y... Sérafin,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la SAVOIE, en date du 18 novembre 2004, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à 14 ans de réclusion criminelle et à 10 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 331, 346, 591 et 593 du Code de procédure pénale ensemble le principe de l'oralité des débats ;
"en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats (p.8 antépénultième ) que le président de la cour d'assises a fait projeter à la cour et au jury deux cassettes audiovisuelles contenant l'audition de deux parties civiles, citées par le ministère public, avant d'entendre leur déposition à titre de renseignement ;
"alors que le principe de l'oralité des débats commande que lorsqu'une partie civile est présente à l'audience et qu'elle peut et va être entendue oralement par le président à titre de renseignement, ce dernier ne puisse faire projeter avant sa déposition à la Cour et au jury le film de son audition lors de l'instruction, audition dont la teneur avait été déterminante dans la mise en accusation de l'accusé" ;
Attendu qu'en faisant projeter à la Cour et au jury deux cassettes audiovisuelles contenant les dépositions de deux parties civiles qui n'avaient pas encore été entendues, le président a fait de son pouvoir discrétionnaire un usage régulier et n'a pas méconnu le principe de l'oralité des débats, dès lors qu'il a donné connaissance des auditions, non de témoins, mais de parties au procès ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 1 et 6 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 331, 346, 591 et 593 du Code de procédure pénale ensemble le principe du contradictoire et les droits de la défense ;
"en ce qu'aux termes d'un arrêt incident (P.V. p. 11), la cour d'assises a refusé de faire droit à la demande de la défense tendant à faire constater la nullité de la projection des auditions de deux parties civiles, faute pour ces enregistrements de mentionner ni les questions posées ni l'intégralité des réponses données aux enquêteurs ;
"alors que le principe de l'oralité des débats commande que l'instruction du dossier soit faite à nouveau dans son intégralité devant la Cour et le jury ; qu'à cet égard, la cour d'appel qui constatait que les enregistrements diffusés ne constituaient pas la reproduction intégrale des propos des mineures et en tout état de cause des questions qui leur avaient été posées, ne pouvait, pour refuser de faire droit à l'incident de la défense, se borner à relever que cette pièce n'avait fait l'objet d'aucune observation ni demande de nullité lors de l'instruction, la loi n'exigeant en aucun cas que la reproduction intégrale des propos des mineures et des questions qui leur sont posées dans les procès-verbaux nécessairement qui en font la synthèse ; que faute d'avoir jamais recherché si la projection de l'audition partielle des parties civiles était conforme à la réalité de leur déposition, la Cour a privé sa décision de toute base légale" ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal que l'avocat de l'accusé a déposé des conclusions demandant à la Cour de constater que les deux cassettes audiovisuelles contenant les auditions de deux parties civiles n'ont pas fait l'objet d'une retranscription intégrale par procès- verbal et qu'ainsi, les droits de la défense ont été méconnus ;
Attendu que, pour écarter ces conclusions, la Cour relève notamment que l'accusé a eu, au cours de l'information, connaissance du contenu de ces cassettes et des procès-verbaux de retranscription et qu'il n'a formulé aucune observation ni demandé la nullité de ces documents avant la clôture de l'information ou avant l'ouverture des débats ;
Attendu que, par ces seuls motifs, la Cour a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 1 et 6 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 131-26 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ensemble le principe de l'oralité des débats ;
"en ce qu'il résulte de la feuille des questions qu'un tampon humide pré-imprimé a été apposé pour inscrire la mention préétablie " la cour et le jury, à la majorité absolue, ordonnent l'interdiction des droits civils, civiques et de famille de l'accusé pendant 10 ans " ;
"alors que l'apposition de ce tampon dont il résulte une nécessaire indivisibilité entre le prononcé de la peine complémentaire d'interdiction des droits civils et de famille et le maximum légal de son quantum, méconnaît tant le principe fondamental de la personnalisation des peines que le droit à un juge de "pleine juridiction " tel qu'il est garanti par les dispositions de l'article 6 de la Convention et qui commande que le juge pénal puisse moduler la peine qu'il entend retenir ;
"alors qu'au surplus, l'indivisibilité des peines entre elles, et l'indivisibilité de la peine et de la condamnation en matière d'assises devront entraîner la cassation totale de l'arrêt attaqué" ;
Attendu qu'il n'importe que, dans la feuille de questions, la mention relative à la condamnation à 10 ans d'interdiction des droits civils, civiques et de famille ait été apposée à l'aide d'un tampon encreur, dès lors que cette mention a été authentifiée par la signature du président et du premier juré ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 306, 592 du Code de procédure pénale ensemble le principe de l'oralité des débats ;
"en ce qu'il ne résulte d'aucune des mentions de l'arrêt pénal que l'audience à laquelle il a été prononcé ait été publique" ;
Attendu qu'il résulte expressément des mentions du procès-verbal que l'audience, au cours de laquelle l'arrêt pénal a été prononcé, était publique ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Pelletier conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;