AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux septembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ARNOULD, les observations de la société civile professionnelle Le BRET-DESACHE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Yannick,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5ème section, en date du 8 septembre 2004, qui, infirmant, sur le seul appel de la partie civile, l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction, l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel sous la prévention d'agressions sexuelles aggravées et tentative d'agression sexuelle aggravée ;
Vu l'article 574 du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 4, 5 et 76 de la loi du 31 décembre 1971, des articles 6 de la Cour européenne des droits de l'homme, 89, 183, 186, alinéa 4, 198 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense et du principe du contradictoire ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'appel interjeté le 30 mars 2004 par Me Gaspar substituant Me Léger avocat de la partie civile (arrêt page 2, alinéa 10 ) ;
"aux motifs que " ... l'appel, régulier en la forme, a été interjeté dans le délai de l'article 186 du Code de procédure pénale puisque la notification faite à la partie civile à une adresse erronée n'ayant pas été effectuée régulièrement, le délai d'appel n'a pas pu courir et était encore ouvert pour elle à la date où il a été formé ..." ;
"alors que, d'une part, en déclarant régulier l'appel formé au nom de la partie civile par un avocat qui ne la représentait pas en première instance et dont il n'est pas justifié qu'il ait reçu mandat de la partie civile pour interjeter appel en son nom, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées de la loi du 31 décembre 1971 ;
"alors que, d'autre part, faute pour la partie civile d'avoir été représentée à l'audience, la chambre de l'instruction n'était saisie d'aucun moyen tendant à constater l'irrégularité de la notification de l'ordonnance de non-lieu ; qu'en se fondant sur des moyens de fait et de droit dont elle n'était pas saisie, pour déclarer recevable l'appel formé hors délai, sans mettre le mis en examen en mesure de présenter ses observations en défense, la chambre de l'instruction a excédé sa saisine et méconnu les droits de la défense ;
"alors que, de troisième part, il résulte des pièces de la procédure notamment la déclaration d'adresse de la partie civile faite lors de la constitution de partie civile, les courriers adressés par l'avocat au juge d'instruction, l'ordonnance du juge d'instruction, que son adresse était bien ... au domicile de son avocat ; qu'en se bornant à affirmer, sans davantage justifier sa décision que la notification faite à la partie civile à cette adresse avait été faite " à une adresse erronée ", et sans permettre à la Cour de cassation de vérifier à qui cette erreur aurait été imputable, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale" ;
Attendu que, d'une part, il résulte des dispositions de l'article 502 du Code de procédure pénale auxquelles renvoie l'article 186 de ce Code, que l'avocat qui fait une déclaration d'appel n'est pas tenu de produire un pouvoir spécial ;
Attendu que, d'autre part, en retenant, pour déclarer l'appel recevable, que l'irrégularité de la notification de l'ordonnance de non-lieu avait eu pour effet de proroger le délai légal, la chambre de l'instruction, qui, dès lors qu'elle était saisie de l'appel, devait statuer sur sa recevabilité, a justifié sa décision ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de la règle non bis in idem, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué, a sur le seul appel de la partie civile, infirmé l'ordonnance de non-lieu entreprise et a renvoyé le mis en examen des chefs d'agressions sexuelles et de tentative d'agression sexuelle commis sur la personne de la partie civile le 15 mai 2002 ;
"aux motifs que les attouchements décrits par Nelly Y... constituent des atteintes de nature sexuelle, les parties de son corps ayant été touchées par les mains ou les lèvres de Yannick X..., étant les lèvres, le sein, et les fesses, et qu'il a essayé d'embrasser son sexe ; que Nelly Y... n'a jamais déclaré que Yannick X... avait usé de violences ou de menaces à son égard ; que le fait de demander à Nelly Y... d'essayer des vêtements dans le cadre des essayages prévus par son contrat de travail, a eu pour conséquence de la faire se dévêtir et se retrouver, dans cette tenue, à l'intérieur d'une petite cabine close seulement par un rideau ; qu'ainsi cette demande apparaît constitutive d'un stratagème permettant de surprendre son consentement et de la contraindre à subir divers attouchements ; que Yannick X... étant le directeur adjoint du magasin Gap où la partie civile était vendeuse, il avait sur elle autorité conférée par ses fonctions et qu'il lui a demandé de faire les essayages en usant de cette autorité ; qu'il y a donc des charges suffisantes que le mis en examen ait commis des agressions sexuelles sur la partie civile, en abusant de l'autorité que lui conféraient ses fonctions et qu'il ait tenté d'en commettre une consistant à lui embrasser le sexe qui n'a manqué son effet que par la résistance de la partie civile ;
"alors que, d'une part, la contradiction et l'insuffisance des motifs équivalent à leur absence totale ; que l'arrêt attaqué ne pouvait sans contradiction, énoncer que la partie civile avait déclaré que le mis en examen n'avait jamais usé à son encontre de violences ou de menaces, et retenir en même temps qu'en agissant dans le cadre de son contrat de travail, il avait abusé de son autorité pour surprendre le consentement de la partie civile alors que si la qualité de personne ayant autorité constitue une circonstance aggravante, elle ne saurait caractériser un acte de contrainte, menace ou surprise, et que l'abus d'autorité implique l'usage d'ordres, menace ou contrainte ;
"alors que, d'autre part, en vertu de la règle non bis in idem un même fait ne saurait donner faire l'objet d'une double déclaration de culpabilité ; qu'en renvoyant le mis en examen devant la juridiction de jugement sous les préventions d'agressions sexuelles et de tentative d'agression sexuelle pour le mêmes faits survenus dans un même laps de temps, au prix d'une distinction arbitraire entre les différentes parties du corps de la plaignante, la chambre de l'instruction a méconnu la règle susvisée" ;
Attendu que le moyen se borne à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives aux charges que la chambre de l'instruction a retenues contre le prévenu et à la qualification qu'elle a donnée aux faits poursuivis ; que, ces énonciations ne présentant aucune disposition que le tribunal saisi de la poursuite n'aurait pas le pouvoir de modifier, le moyen est irrecevable en application de l'article 574 susvisé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Arnould conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;