AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que la Cour de justice des communautés européennes ayant dit pour droit (affaire C-408-01 X... Salomon c/ Fitness World trading) qu'un Etat membre, lorsqu'il exerce l'option offerte par l'article 5 2 de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, est tenu d'accorder la protection spécifique en cause en cas d'usage par un tiers d'une marque ou d'un signe postérieur, identique ou similaire à la marque renommée enregistrée, il résulte du texte visé, qui met en oeuvre l'option ainsi ouverte par cette directive, que l'emploi d'un signe identique ou similaire à une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou s'il constitue une exploitation injustifiée de cette marque ;
Attendu que la société Cartier, titulaire de la marque "Must" enregistrée sous le n° 1.546.417, ayant recherché la responsabilité de la société Oxypas à raison du dépôt et de l'usage de la marque "Pedimust", l'arrêt attaqué rejette cette demande, aux motifs que l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, qui instaure une exception au principe de la spécialité, doit être interprété restrictivement, et qu'il ne permet de faire sanctionner que l'emploi par un tiers d'un signe identique à la marque jouissant d'une renommée, mais non l'utilisation d'un signe voisin par sa forme ou les évocations qu'il suscite ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'action en responsabilité intentée par la société Cartier l'arrêt rendu le 28 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Oxypas aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille cinq.