LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité joint les pourvois n° G 03-46.065 et C 03-46.451 à B 03-46.473 ;
Sur le moyen unique commun aux différents pourvois :
Vu les articles L. 511-1 du Code du travail et L. 621-125 du Code de commerce ;
Attendu que l'action du salarié qui demande au conseil de prud'hommes, conformément au premier de ces textes, la réparation d'un préjudice causé par l'irrégularité de fond ou de procédure de son licenciement est distincte de celle que le second texte lui ouvre lorsqu'une créance ne figure pas en tout ou partie sur un relevé des créances résultant du contrat de travail ; que la fin de non recevoir tirée de la forclusion ne peut en conséquence être opposée à une demande tendant à la réparation d'un préjudice lié au licenciement ;
Attendu que, par accord collectif de travail en date du 30 avril 1997, la société Desarbre international, qui connaissait des difficultés économiques, a décidé de réduire la durée du travail de l'ensemble des salariés et une partie de leur rémunération et s'est engagée en contrepartie à maintenir l'effectif inscrit au 30 juin 1997 ; que le 30 septembre 1998 la société a été placée en redressement judiciaire et que sa liquidation a été prononcée le 4 novembre 1998 ; que Mme X... et 30 autres salariés ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande en fixation d'une indemnité en réparation du préjudice causé par l'employeur du fait du non-respect de son obligation de maintenir l'emploi ;
Attendu que pour débouter les salariés de leur demande le jugement attaqué retient que les relevés des créances des salariés de l'entreprise ont fait l'objet d'une publicité le 6 août 1999, que dans le délai de forclusion de deux mois aucun des demandeurs ne s'est manifesté ni n'a demandé, dans le délai d'un an, à être relevé de sa forclusion ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action des salariés tendant à obtenir la réparation du préjudice lié au licenciement était distincte de celle ouverte par l'article L. 621-125 du Code de commerce et que les salariés ne pouvaient se voir opposer la fin de non-recevoir tirée de la forclusion, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cour de cassation est en mesure de mettre partiellement fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 15 juillet 2003, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Roanne ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi du fait de la recevabilité ;
Dit recevable l'action des salariés ;
Renvoie devant le conseil de prud'hommes de Saint-Etienne afin qu'il soit statué sur le fond de sa demande ;
Condamne M. Y..., ès qualités aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Y..., ès qualités, à payer à chacun des 31 demandeurs la somme de 75 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille cinq.