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14/06/2005 | FRANCE | N°02-47320

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 juin 2005, 02-47320


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., engagé en 1946 en qualité de secrétaire technico-commercial par la société Boutin, est devenu président du conseil d'administration de cette société en 1970, après sa transformation en société anonyme et sa fusion avec une société Cellotub, qui a donné naissance à une société CDB ; qu'à la suite du règlement judiciaire de cette société, ainsi que de ses filiales Unideco et Mediaflex, le 10 septembre 1983, les fonds de ces trois sociétés ont été

donnés en location-gérance à une société Manuli auto France, constituée à cette fin,...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., engagé en 1946 en qualité de secrétaire technico-commercial par la société Boutin, est devenu président du conseil d'administration de cette société en 1970, après sa transformation en société anonyme et sa fusion avec une société Cellotub, qui a donné naissance à une société CDB ; qu'à la suite du règlement judiciaire de cette société, ainsi que de ses filiales Unideco et Mediaflex, le 10 septembre 1983, les fonds de ces trois sociétés ont été donnés en location-gérance à une société Manuli auto France, constituée à cette fin, le 29 novembre 1983 ; que la société Manuli auto France a alors conclu le 2 janvier 1984 avec M. X... une convention qui lui confiait pendant une durée de deux années une mission de conseiller extérieur indépendant ; que l'URSSAF ayant refusé l'immatriculation de M. X... comme travailleur indépendant et notifié à la société Manuli auto France un redressement au titre de cotisations sociales, cette dernière a fait assigner M. X... pour obtenir la répétition des sommes versées à l'URSSAF au titre de la part salariale des cotisations sociales ; que M. X... a demandé la requalification de cette convention en contrat de travail et le paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Manuli auto France fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 10 octobre 2002) d'avoir jugé qu'elle était liée à M. X... par un contrat de travail à durée indéterminée et de l'avoir en conséquence condamnée au paiement de diverses sommes alors, selon le moyen :

1 / que la règle de la suspension du contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social ne s'applique pas au cas où ce dernier a continué à exécuter les fonctions exercées avant sa désignation comme mandataire social ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que M. X... avait reconnu avoir poursuivi l'exécution de son contrat de travail pendant l'exercice de son mandat social, celui-ci s'étant, selon lui, cumulé avec son contrat de travail ; qu'en retenant que ce contrat de travail avait été suspendu pendant le temps du mandat social, quand une telle suspension était incompatible avec la poursuite, par le mandataire social, de l'exécution de ses anciennes fonctions, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles L. 121-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

2 / que la société Manuli auto France soutenait, dans ses conclusions d'appel, que les fonctions exercées par M. X... pendant son mandat social, identiques à ses précédentes fonctions salariées, ne pouvaient, en l'absence de lien de subordination, s'analyser en des fonctions techniques distinctes caractérisant un travail salarié, en sorte que M. X... n'avait plus aucun contrat de travail en cours lors de la modification dans la situation juridique de la société CDB ; qu'en retenant au contraire que M. X... bénéficiait d'un contrat de travail en cours, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le mandat social de ce dernier n'avait pas été substitué à son contrat de travail et si les parties à ce contrat n'avaient pas ainsi entendu opérer une novation permettant de considérer que le contrat de travail avait disparu avec tous ses effets au moment de l'obtention du mandat social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'en l'absence de convention contraire, le contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social et qui a cessé d'être lié à la société par un lien de subordination est suspendu pendant la durée du mandat social ;

Et attendu que la cour d'appel a retenu, d'une part, appréciant la commune intention des parties, que lors de la désignation de M. X... comme mandataire social, il n'avait pas été convenu d'une novation du contrat de travail en mandat social ; d'autre part, qu'il n'était pas justifié de l'exercice, pendant la durée du mandat social, de fonctions techniques distinctes, dans un état de subordination à l'égard de la société ; qu'elle en a exactement déduit que le contrat de travail avait été suspendu pendant la durée du mandat social, pour reprendre ses effets à la suite de la location-gérance du fonds à une autre société ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir débouté la société Manuli Auto France de sa demande en remboursement de la part salariale de cotisations sociales versées à l'URSSAF, pour le compte de M. X... alors, selon le moyen :

1 / que la simple erreur du solvens à l'origine du paiement indu ne rend pas irrecevable son action en répétition de l'indu ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que la société Manuli auto France était à l'origine du redressement opéré par l'URSSAF l'ayant conduit au versement de cotisations sociales salariales pour le compte de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1235 et 1376 du Code civil ;

2 / que le versement de sommes nettes à titre de rémunération suppose l'absence d'erreur des parties sur la nature des sommes versées ; qu'en se fondant sur le caractère net des sommes versées à titre de salaires, quand l'erreur commise par les parties quant à la qualification du contrat autorisait l'action en répétition de l'indu de la société Manuli auto France, la cour d'appel a violé les articles 1235 et 1376 du Code civil ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement la commune intention des parties, la cour d'appel a retenu que la rémunération convenue avait été fixée pour un montant net ; qu'elle a par ce seul motif légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen, qui à lui seul ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi,

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Manuli auto France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02-47320
Date de la décision : 14/06/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Suspension - Salarié devenu mandataire social - Condition.

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Lien de subordination - Cessation - Cas - Salarié devenu mandataire social - Condition

Sauf convention contraire, le contrat de travail d'un salarié qui devient mandataire social et qui cesse d'être lié à la société par un lien de subordination est suspendu pendant la durée du mandat social. Ainsi, dès lors qu'elle retient qu'il n'a pas été convenu d'une novation du contrat de travail lorsque le salarié est devenu mandataire social et que ce mandat social a entraîné la suspension du contrat de travail, faute de fonctions techniques distinctes exercées dans un rapport de subordination envers la société, une cour d'appel en déduit exactement que la location-gérance du fonds de la société à une autre personne a mis fin à la suspension du contrat de travail, qui s'est poursuivi avec le locataire-gérant, devenu employeur.


Références :

Code civil 1134
Code du travail L121-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 octobre 2002

Dans le même sens que : Chambre sociale, 1991-06-12, Bulletin 1991, V, n° 295, p. 180 (cassation) ; Chambre sociale, 1992-03-11, Bulletin 1992, V, n° 172, p. 106 (cassation partielle) ; Chambre sociale, 2003-10-08, Bulletin 2003, V, n° 253, p. 260 (cassation) et l'arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jui. 2005, pourvoi n°02-47320, Bull. civ. 2005 V N° 201 p. 177
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 V N° 201 p. 177

Composition du Tribunal
Président : M. Chagny, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : M. Allix.
Rapporteur ?: M. Bailly.
Avocat(s) : la SCP Gatineau, Me Balat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:02.47320
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