AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mlle X..., au service de la société Hauky en qualité d'aide comptable depuis le 9 février 1986, élue déléguée du personnel en 1991, a été licenciée le 20 juillet 1993 après obtention le 15 juillet d'une autorisation administrative qui a été annulée par le ministre du travail, le 14 janvier 1994 ;
Sur le deuxième moyen qui est préalable :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir réduit l'indemnité au titre des frais de transport alors, selon le moyen, qu'il est constant que l'employeur, malgré les réclamations de la salariée, avait toujours refusé de lui rembourser les frais de transport au titre de la loi n° 82-684 du 4 août 1982 ; que dès lors, c'est à lui qu'il incombait d'établir qu'il s'était libéré de cette obligation à cet égard ; qu'en se fondant sur le fait que la salariée ne justifiait pas, au titre de la période considérée, avoir utilisé régulièrement les transports publics de la région parisienne dans les conditions prévues par le décret du 30 septembre 1982, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ;
Mais attendu que, sous réserve de modalités autres, fixées par accord collectif, l'article 3 du décret n° 82-835 du 30 septembre 1982 relatif à l'application de la prise en charge par les employeurs du trajet domicile-travail, subordonne cette prise en charge à la remise ou, à défaut à la présentation du ou des titres par le bénéficiaire ; d'où il suit que la cour d'appel qui a limité le montant de l'indemnité due au titre des frais de transport à celui correspondant aux titres qui ont été versés aux débats, a légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que la salariée reproche encore à la cour d'appel de l'avoir déboutée de son indemnité de repas, alors, selon le moyen, que si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise, placés dans une situation identique puissent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables au moment des résultats ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions, la salariée faisait valoir qu'elle versait aux débats les bulletins de paye de quatre salariées faisant apparaître la paiement de cet avantage et que cette prestation "avantage nourriture" figurait sur les comptes de l'entreprise ; que dès lors, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si d'autres salariés, placés dans une situation identique ne bénéficiaient pas de cet avantage, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a constaté que la salariée bénéficiait d'une indemnité de repas depuis 1992 n'avait pas à se livrer à une recherche que ses constatations rendaient inopérante ;
Mais, sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 122-14-3, L. 122-14-4, L. 412-19, L. 425-3 et L. 436-3 du Code du travail et l'article 14 de l'accord de mensualisation du 22 juin 1979 annexe I de la convention collective des industries agricoles et alimentaires n° 3128 ;
Attendu que, pour fixer à une certaine somme le montant de l'indemnité due à la salariée en application de l'article L. 425-3 du Code du travail, la cour d'appel a déduit du montant des salaires augmenté de la prime d'ancienneté et de l'avantage en nourriture qu'elle aurait dû percevoir jusqu'au 21 mars 1994, l'indemnité compensatrice de préavis de deux mois versée par l'employeur et n'a pas intégré dans le calcul opéré le montant correspondant à la part mensuelle de la prime annuelle versée en fin d'année ;
Attendu, cependant, d'une part, que lorsque l'autorisation administrative de licencier le salarié protégé est annulée par l'administration, celui-ci a droit, s'il ne demande pas sa réintégration, aux indemnités de rupture et à une indemnité distincte correspondant au préjudice subi à la suite de l'annulation du licenciement, que d'autre part, l'article 14 de l'accord de mensualisation du 22 juin 1979, relatif à la convention collective des Industries agricoles et alimentaires n° 3128 prévoit qu'en cas de départ en cours d'année, quel qu'en soit le motif, le salarié reçoit la fraction de prime qui lui est acquise à la date de cessation d'effet du contrat ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en retenant que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité le montant de l'indemnité revenant à Mlle X... au titre du statut protecteur, l'arrêt rendu le 9 janvier 2001, entre les parties, par la cour d'appel Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par Mme Morin, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile, en l'audience publique du dix-huit mai deux mille cinq.