AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf avril deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LE CORROLLER, les observations de la société civile professionnelle RICHARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Claude, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 14 octobre 2004, qui, dans la procédure suivie contre Christian Y... pour contravention de violences, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles R. 625-1 du Code pénal, 1382 du Code civil, 2,3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a débouté Jean-Claude X... de ses demandes tendant à voir condamner Christian Y... à l'indemniser au titre des divers préjudices, autres que moral, qu'il a subis à la suite de l'agression dont il a été victime le 10 janvier 2002 de la part de ce dernier ;
"aux motifs qu'il ressort du procès-verbal d'enquête de la gendarmerie établi suite à la plainte de Jean-Claude X... que selon les déclarations du plaignant, il a été frappé de plusieurs coups à l'épaule droite, que Christian Y... reconnaissait avoir empoigné Jean-Claude X... par le col et par son anorak au niveau des épaules, mais contestait lui avoir porté des coups ; que les trois témoins des faits déclaraient que Christian Y... avait tenu Jean-Claude X... par le col et par son anorak au niveau des épaules, sans échange de coups (Mesdames Evelyne Z... et Isabelle A...), que Jean B... déclarait avoir vu Jean-Claude X... tenir Christian Y... au niveau des épaules sans avoir vu porter des coups ; qu'il résulte des déclarations concordantes pour l'essentiel du plaignant et de Christian Y... que l'altercation a pour origine des dégâts qu'aurait commis Jean-Claude X... à une nappe appartenant au mis en cause et dont celui-ci réclamait le dédommagement, chose que Jean-Claude X... refusait avant finalement de remettre un billet de 200 francs ; que le différend opposant Jean-Claude X... et Christian Y... et le refus du plaignant de payer le montant supposé des dégâts ne justifiait nullement les voies de fait auxquelles s'est livré Christian Y... sur Jean-Claude X... ; que Christian Y..., en l'absence de faute avérée de Jean-Claude X..., sera déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables des faits ; que dans son certificat initial du 12 janvier 2002, le docteur C... mentionne un préjudice moral, une impotence de l'épaule droite et la présence de 2 hématomes au niveau de la face antérieure du bras droit ; dans son certificat du 15 janvier 2002, le même médecin indiquait que l'examen révélait un syndrome traumatique psychologique avec anxiété et trouble du sommeil, 2 hématomes de la face antérieure du bras droit, absence de lésion osseuse à l'examen radiologique, impotence fonctionnelle de l'épaule droite avec limitation algique des différents mouvements de l'articulation et il prescrivait une ITT de 15 jours ;
que le docteur D..., médecin légiste, notait le 18 janvier 2002 que l'examen clinique ne révélait pas d'ecchymoses et hématomes qui avaient pu disparaître 10 jours après les faits, l'existence de limitations importante de tous les mouvements de l'épaule avec une impotence fonctionnelle notable, le tout justifiant une ITT de 15 jours ; que le docteur E..., expert, a indiqué que Jean-Claude X... a essentiellement présenté suite à l'agression dont il a été victime un traumatisme de l'épaule droite avec luxation du tendon du muscle biceps droit, et désinsertion du tendon sous- scapulaire droit et que ces lésions sont en lien direct et certain avec les faits considérés, et il conclut à une ITT entre le 30 juin 2002 et le 2 août 2002 inclus, pas d'ITP, consolidation au 1er janvier 2003, IPP 2%, quantum doloris 3/7, pretium doloris 1/7, absence de préjudice d'agrément, absence de prise en compte d'un éventuel reclassement ou d'une éventuelle réadaptation professionnelle, les lésions sont stables ; que néanmoins, la lecture du rapport d'expertise montre que l'expert quant au fait générateur des séquelles constatées s'est déterminé au vu des déclarations de Jean-Claude X..., qui lui a indiqué avoir été empoigné au col puis avoir subi une clé au bras droit suivie d'un coup de poing sur la même épaule ; que l'expert ne mentionne pas avoir eu connaissance des déclarations des témoins entendus dans le cadre de l'enquête de gendarmerie qui contredisent la version des faits donnée par Jean-Claude X... ; que d'ailleurs, celui-ci a varié dans la description des coups reçus :
coups à l'épaule droite en présence de témoins (plainte à la gendarmerie), coups de poing à l'épaule droite, prise à l'encolure ayant engendré de nombreuses ecchymoses et un hématome au tiers supérieur du bras n'ayant pu être constatés par le médecin (déclaration au médecin légiste), alors que le docteur C... avait signalé la présence de 2 hématomes au niveau de la face antérieure du bras droit, finalement empoignade puis clé au bras droit et un coup de poing sur la même épaule (déclaration à l'expert) ; que la Cour n'est pas liée par l'avis de l'expert ; qu'elle doit vérifier l'imputabilité du préjudice allégué avec les violences commises par Christian Y... ; qu'en l'état des déclarations contradictoires du plaignant lui-même, de ce qu'il situe la clé au bras et les coups après l'empoignade par le col du vêtement, alors que les trois témoins qui ont vu l'empoignade déclarent de façon concordante qu'il n'y a pas eu de coups, la preuve de l'imputabilité de séquelles constatées avec les violences commises par Christian Y... n'est pas établie ;
"1) alors que si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice dans la limite des conclusions des parties, ils doivent tenir compte de tous les chefs de dommage, aussi bien matériels que corporels ou moraux, découlant des faits objet de la poursuite, pour en réparer l'intégralité ; qu'en se bornant à affirmer que la preuve de l'imputabilité des séquelles de Jean-Claude X... avec les violences commises par Christian Y... n'était pas rapportée, après avoir néanmoins relevé que les divers certificats médicaux, établis après l'agression, avaient fait état d'une impotence fonctionnelle de l'épaule droite, et de diverses lésions justifiant une ITT de 15 jours, sans s'interroger sur la provenance de ces blessures, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
"2) alors qu'en se bornant à affirmer que les déclarations des témoins, qui avaient mentionné l'absence de coups, étaient en contradiction avec la version des faits de Jean-Claude X..., sans rechercher si les témoins interrogés, tous proches de Christian Y..., avaient fait preuve d'impartialité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"3) alors qu'en se bornant à affirmer que Jean-Claude X... avait varié dans ses déclarations, qui apparaissaient contradictoires, sans s'interroger sur l'état psychologique dans lequel il se trouvait au moment de chaque déclaration, afin de déterminer si les divergences résultaient d'une évolution de cet état, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve que la cour d'appel, qui, sur le seul appel du prévenu limité à l'action civile après amnistie, était tenue de vérifier si les faits servant de base à la poursuite étaient ou non constitutifs d'une infraction, a estimé que les violences poursuivies, si elles caractérisaient une contravention, n'avaient entraîné aucune incapacité de travail ;
D'ou il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, Farge conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;