AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 janvier 2004), que la société Pierre et soleil (la société), représentée par son ancien dirigeant M. X..., a relevé appel du jugement du 3 février 2003 lui étendant la liquidation judiciaire de la société Comptoir des parfums ; que M. Y..., désigné en qualité de mandataire ad hoc de la société Pierre et Soleil par ordonnance du 9 septembre 2003, est intervenu à l'instance le 26 septembre suivant ;
Attendu que M. Y..., mandataire ad hoc, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'appel de la société Pierre et soleil alors, selon le moyen :
1 / que la signification du jugement de liquidation judiciaire de la société, faite au représentant légal de cette société dont les fonctions avaient pris fin du fait de ce jugement et qui n'avait plus qualité pour la recevoir, était nulle et n'a pu faire courir le délai d'appel ; que la cour d'appel a violé les articles 1844-7,7 du Code civil, 126 alinéa 2, 528 et 654 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que les jugements sont notifiés aux parties et qu'il y a autant de parties que de personnes ayant un intérêt distinct et séparé ;
que le débiteur en liquidation judiciaire conserve le droit propre de faire appel du jugement prononçant sa liquidation judiciaire ; que la signification du jugement de liquidation judiciaire au mandataire liquidateur ne peut faire courir le délai d'appel de ce jugement à l'encontre du débiteur; que la cour d'appel a violé les articles 677 du nouveau Code de procédure civile et L. 623-1, I, 2 du Code de commerce ;
3 / qu'exiger d'une société en liquidation judiciaire d'obtenir la désignation d'un liquidateur amiable ou d'un mandataire ad hoc et l'intervention de celui-ci dans la procédure dans le délai d'appel de dix jours revient à lui interdire en pratique d'exercer son droit propre de contester la décision ayant prononcé sa liquidation judiciaire ; que la cour d'appel a violé l'article 6, paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, en premier lieu, que si le débiteur est recevable, en vertu du droit propre qu'il tient de l'article L. 623-1.2 du Code de commerce, à former un recours contre le jugement qui statue sur sa liquidation judiciaire, il ne peut, s'agissant d'une personne morale dissoute en application de l'article 1844-7.7 du Code civil et dont le dirigeant est privé de ses pouvoirs à compter de la liquidation judiciaire, exercer ce droit que par l'intermédiaire d'un liquidateur amiable ou d'un mandataire ad hoc; qu'il s'ensuit que la cour d'appel a retenu à bon droit que M. X..., privé de ses pouvoirs de représentation par l'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société, se trouvait dépourvu de qualité pour relever appel de ce jugement au nom de la société et qu'en conséquence l'acte d'appel déposé par lui le 10 février 2003 était frappé de nullité ;
Attendu, en second lieu, que l'ancien représentant légal d'une société, bien que privé de ses pouvoirs de représentation dès le prononcé de la liquidation judiciaire de la société, demeure une personne pouvant se dire habilitée à recevoir la signification du jugement prononçant la liquidation judiciaire ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que la cour d'appel, après avoir constaté que la signification faite à M. X... du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société avait été effectuée le 30 juin 2003 dans les formes de l'article 659 du nouveau Code de procédure civile, a retenu que cette date marquait le point de départ du délai d'appel ; qu'ayant constaté que le mandataire ad hoc n'était intervenu en cause d'appel que le 26 septembre 2003, elle en a exactement déduit, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la deuxième branche et sans encourir le grief de la troisième branche, que cette intervention postérieure à l'expiration du délai d'appel ne permettait pas de régulariser l'acte d'appel du 10 février 2003 ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille cinq.