La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/04/2005 | FRANCE | N°01-17494

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 avril 2005, 01-17494


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le Comité économique régional agricole fruits et légumes de Bretagne (le CERAFEL) a assigné le GAEC des Quatre Vents, producteur de choux-fleurs, selon la méthode de l'agriculture biologique, en paiement des cotisations, dues selon le CERAFEL, pour les années 1996 et 1997 ; que le GAEC des Quatre Vents a fait valoir que les produits biologiques avaient fait l'objet d'une réglementation communautaire spécifique par

le règlement CEE du 14 juin 1991 et que les règles de production et de...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le Comité économique régional agricole fruits et légumes de Bretagne (le CERAFEL) a assigné le GAEC des Quatre Vents, producteur de choux-fleurs, selon la méthode de l'agriculture biologique, en paiement des cotisations, dues selon le CERAFEL, pour les années 1996 et 1997 ; que le GAEC des Quatre Vents a fait valoir que les produits biologiques avaient fait l'objet d'une réglementation communautaire spécifique par le règlement CEE du 14 juin 1991 et que les règles de production et de commercialisation édictées par le CERAFEL de Bretagne n'étaient pas applicables à ces produits ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, pour rejeter la demande du CERAFEL, l'arrêt retient qu'elle est dépourvue de fondement juridique en droit interne, dès lors qu'il n'est pas établi que le Conseil ait approuvé l'arrêté d'extension du 18 juin 1992 ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le CERAFEL fondait sa demande sur l'arrêté d'extension du 10 juillet 1995, la cour d'appel a modifié l'objet du litige dont elle était saisie et violé le texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l'article 3 du règlement (CEE) 2092/91 du Conseil du 24 juin 1991, concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires ;

Attendu que, selon ce texte, les dispositions relatives aux produits de l'agriculture biologique s'appliquent sans préjudice des autres dispositions communautaires régissant la production, la préparation, la commercialisation, l'étiquetage et le contrôle des produits ; qu'il s'ensuit que le règlement n° 1035/72 du Conseil du 18 mai 1972, portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes, tel que modifié par le règlement n° 3284/83 du Conseil, du 14 novembre 1983 s'applique aux produits, quel que soit leur mode de production ;

Attendu que, pour dire le règlement n° 1035/72 du Conseil inapplicable aux produits de l'agriculture biologique, l'arrêt retient que, selon le règlement n° 2092/91 du 24 juin 1991, le mode de production biologique constitue un mode particulier de production au niveau de l'exploitation agricole ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le troisième moyen :

Vu l'article 15 ter, paragraphe 1, du règlement n° 1035/72 du Conseil du 18 mai 1972 ;

Attendu que pour rejeter les prétentions du CERAFEL, l'arrêt retient que celui-ci n'est pas un organisme représentatif en matière de production agricole biologique, faisant ainsi une distinction entre les divers modes de production pratiqués par les agriculteurs ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la représentativité de l'organisme doit s'apprécier par rapport au produit et non par rapport au mode de production, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le cinquième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 15 ter, paragraphes 1 et 8 du règlement n° 1035/72 du Conseil, du 18 mai 1972, portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes, tel que modifié par le règlement n° 3284/83 du Conseil du 14 novembre 1983 ;

Attendu que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit (ordonnance du 18 janvier 2004, affaire C-381/02) qu'un Etat membre qui a fait application dudit paragraphe 1, en rendant certaines règles de production et de commercialisation édictées par une organisation de producteurs obligatoires pour les producteurs établis dans la circonscription de cette organisation et non-adhérents à celle-ci, ne peut, sans méconnaître le principe de non-discrimination, faire application du paragraphe 8 de ladite disposition en rendant ces derniers redevables de tout ou partie des cotisations versées par les producteurs adhérents, sans rechercher si les producteurs non-adhérents se trouvent ou non dans une situation objectivement différente de celle des producteurs adhérents, et que les producteurs non-adhérents se trouvent dans une situation objectivement différente de celle des producteurs adhérents lorsque les règles adoptées par ladite organisation ne trouvent pas ou ne trouvent que marginalement à s'appliquer à leurs produits et que les actions entreprises par cette dernière ne bénéficient pas ou ne bénéficient que marginalement auxdits produits ;

Attendu que pour rejeter les prétentions du CERAFEL, l'arrêt retient qu'il y a lieu de constater qu'à l'évidence les producteurs biologiques sont dans une situation différente objectivement des producteurs conventionnels, dès lors qu'ils n'ont pas de marché excédentaire et donc ne peuvent être soumis à des cotisations qui garantissent un prix de retrait du marché en cas de production excédentaire et qu'ils font l'objet de règles spécifiques de contrôles et de certifications propres en ce qui concerne leur production ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que les règles adoptées par le CERAFEL ne trouvent pas ou ne trouvent que très marginalement à s'appliquer aux produits de l'agriculture biologique et que les actions entreprises par celui-ci ne bénéficient pas ou ne bénéficient que marginalement à ces produits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 octobre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne le GAEC des Quatre Vents aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du GAEC des Quatre Vents ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 01-17494
Date de la décision : 05/04/2005
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° COMMUNAUTE EUROPEENNE - Agriculture - Fruits et légumes - Règlement 1035/72 - Domaine d'application - Mode de production - Absence d'influence.

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Agriculture - Fruits et légumes - Règlement 1035/72 - Domaine d'application - Produits de l'agriculture biologique.

1° Dès lors que, selon l'article 3 du règlement CEE 2092/91 du Conseil, concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires, les dispositions relatives aux produits de l'agriculture biologique s'appliquent sans préjudice des autres dispositions communautaires régissant la production, la préparation, la commercialisation, l'étiquetage et le contrôle des produits, il s'ensuit que le règlement n° 1035/72 s'applique aux produits, quel que soit leur mode de production.

2° COMMUNAUTE EUROPEENNE - Agriculture - Fruits et légumes - Règlement 1035/72 - Organisation de producteurs - Représentativité - Critère - Définition.

2° La représentativité d'un organisme en matière de production agricole biologique doit s'apprécier par rapport aux produits et non par rapport au mode de production.

3° COMMUNAUTE EUROPEENNE - Agriculture - Fruits et légumes - Règlement 1035/72 - Organisation de producteurs - Extension des règles de production et de commercialisation - Imposition de cotisations - Producteurs non-adhérents.

3° La Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit (ordonnance du 18 janvier 2004, affaire C-381/02) qu'un Etat membre qui fait application du paragraphe 1er du règlement n° 1035/72 du Conseil, portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes, tel que modifié par le règlement n° 3284/83 du Conseil du 14 novembre 1983, en rendant certaines règles de production et de commercialisation édictées par une organisation de producteurs obligatoires pour les producteurs établis dans la circonscription de cette organisation et non-adhérents à celui-ci, ne peut, sans méconnaître le principe de non-discrimination, faire application du paragraphe 8 de ladite disposition en rendant ces derniers redevables de tout ou partie des cotisations versées par les producteurs adhérents, sans rechercher si les producteurs non-adhérents se trouvent ou non dans une situation objectivement différente de celle des producteurs adhérents, et que les producteurs non-adhérents se trouvent dans une situation objectivement différente de celle des producteurs adhérents lorsque les règles adoptées par ladite organisation ne trouvent pas ou ne trouvent que marginalement à s'appliquer à leurs produits et que les actions entreprises par cette dernière ne bénéficient pas ou ne bénéficient que marginalement auxdits produits. En conséquence, en retenant qu'à l'évidence les producteurs biologiques sont dans une situation différente objectivement des producteurs conventionnels, dès lors qu'ils n'ont pas de marché excédentaire et donc ne peuvent être soumis à des cotisations qui garantissent un prix de retrait du marché en cas de production excédentaire, et qu'ils font l'objet de règles spécifiques de contrôle et de certification propres en ce qui concerne leur production, une cour d'appel se détermine par des motifs impropres à établir que les règles adoptées par une organisation de producteurs ne trouvent pas ou ne trouvent que très marginalement à s'appliquer aux produits de l'agriculture biologique et que les actions entreprises par celle-ci ne bénéficient pas ou ne bénéficient que marginalement à ces produits.


Références :

1° :
2° :
3° :
Règlement CEE 1035/72 du 18 mai 1972
Règlement CEE 1035/72 du 18 mai 1972 art. 15 ter par. 1
Règlement CEE 1035/72 du 18 mai 1972 art. 15 ter par. 1 et 8
Règlement CEE 2092/91 du 24 juin 1991 art. 3

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 31 octobre 2001

Sur le n° 3 : A rapprocher : Cour de justice des Communautés européennes, 2004-01-29, aff. C-381/02, recueil de jurisprudence 2004.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 avr. 2005, pourvoi n°01-17494, Bull. civ. 2005 IV N° 79 p. 82
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 IV N° 79 p. 82

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Tricot.
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Favre.
Avocat(s) : Avocats : Me Copper-Royer, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:01.17494
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award