AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la Mutuelle des architectes français du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés SAEP-Bâtiment, Rineau, Atelier Patrice X..., la compagnie Axa assurances, Mme Y..., veuve X..., la Société d'études de climatisation et d'installations électriques et la société cabinet Claude Mathieu ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2003), que désirant faire procéder à la rénovation de son centre de formation, l'Association professionnelle des hôteliers restaurateurs limonadiers (APHRL) a souscrit, auprès de la Mutuelle des architectes français (MAF) une police unique de chantier et a confié la réalisation des travaux à divers constructeurs ; qu'après réception de l'ouvrage, des nuisances olfactives et acoustiques ont été signalées par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble voisin qui a assigné l'APHRL afin d'obtenir sa condamnation à réaliser, sur son propre immeuble, les travaux nécessaires pour mettre fin aux nuisances ; que l'APHRL a assigné les constructeurs et la MAF afin d'obtenir la garantie de cette dernière ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la MAF fait grief à l'arrêt de déclarer non prescrite l'action de l'APHRL et de la condamner à payer une somme à cette dernière, alors, selon le moyen, que le souscripteur d'une police unique de chantier, qui comporte une assurance de dommages et une assurance de responsabilité des constructeurs, met en oeuvre exclusivement l'assurance de dommages lorsqu'il demande en justice la condamnation de l'assureur au "préfinancement " des travaux, spécialement s'il demande à titre subsidiaire la condamnation des constructeurs sans alors mentionner l'assureur ; que l'action en garantie dirigée contre l'assureur de dommages est soumise à la prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des assurances ; qu'en l'espèce, l'APHRL a demandé au tribunal puis à la cour d'appel de condamner la MAF, qui avait consenti une police unique de chantier, à "préfinancer" les travaux qu'elle devait réaliser, et mettait ainsi en jeu l'assurance de dommages ; que pour déclarer cette action non prescrite, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que l'action directe contre l'assureur en sa qualité d'assureur de responsabilité des constructeurs n'était pas soumise à la prescription biennale ; qu'en opposant ainsi une prescription applicable à une action qui n'avait pas été exercée par l'assurée, la cour d'appel a violé les articles L. 114-1, L. 124-3 du Code des assurances et 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'action engagée par l'APHRL contre la MAF trouvait son fondement dans le droit de la victime à réparation de son préjudice contre l'assureur de responsabilité des constructeurs, et n'était pas prescrite en application de l'article L. 124-3 du Code des assurances, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que les conditions d'application de l'assurance de dommages aient été remplies, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen :
Attendu que la MAF fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une somme à l'APHRL, alors, selon le moyen, que le recours dirigé contre les constructeurs par un maître d'ouvrage condamné à réparer les dommages causés à un tiers par des vices de construction de l'immeuble ne relève pas de la garantie décennale ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la condamnation prononcée contre l'APHRL et dont elle a demandé à être garantie par la MAF et les constructeurs est fondée sur l'existence de troubles de voisinage ; qu'en décidant que le recours de ce maître d'ouvrage contre les constructeurs relevait de la garantie décennale, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le dommage dont il était demandé réparation par l'APHRL n'était pas celui éprouvé par des tiers victimes de troubles anormaux de voisinage, mais exigeait des travaux de reprise nécessaires afin de rendre l'ouvrage appartenant à cette dernière normalement utilisable pour la destination prévue et que le dommage trouvait son origine dans des défauts de conception et d'exécution de certains travaux, la cour d'appel a pu en déduire qu'il engageait la responsabilité décennale des constructeurs, et que la MAF devait sa garantie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Mutuelle des architectes français aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Mutuelle des architectes français à payer à l'Association professionnelle des hôteliers restaurateurs limonadiers la somme de 2 000 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Mutuelle des architectes français ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille cinq.