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30/03/2005 | FRANCE | N°04-84905

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 mars 2005, 04-84905


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, et de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Marco, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'i

nstruction de la cour d'appel de DIJON, en date du 21 juillet 2004, qui, dans l'information s...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, et de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Marco, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DIJON, en date du 21 juillet 2004, qui, dans l'information suivie sur sa plainte notamment contre André Y... du chef d'injures publiques envers fonctionnaire public et dénonciation calomnieuse, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 80 et suivants, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat-instructeur ;

"alors que les juridictions d'instruction ont l'obligation de statuer sur les faits dénoncés dans une plainte additionnelle dont le juge d'instruction était régulièrement saisi par la partie civile même en l'absence de réquisitoire supplétif du parquet ; qu'il résulte des pièces de la procédure soumises à la Cour de cassation d'une part que par plainte en date du 31 mars 2003 déposée le 2 avril 2003, Marco X... a dénoncé des agissements répétés de harcèlement moral qui avaient pour objet de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et des faits d'outrage c'est-à-dire des faits d'atteinte à la fonction dont il était investi (D 52) et d'autre part, que par lettre adressée le 9 septembre 2003 (D 73), son conseil a expressément demandé au juge d'instruction de saisir le procureur de la République pour que ce magistrat prenne un réquisitoire supplétif sur ces faits et qu'en se bornant à statuer sur les seuls chefs d'injures publiques et de dénonciation calomnieuse sans se prononcer sur les chefs d'inculpation susvisés de harcèlement moral et d'outrage, la chambre de l'instruction n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer le contrôle qui lui appartient" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 29 de la loi du 29 juillet 1881, préliminaire, 85, 86, 575 alinéa 2, 1 et 6 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du magistrat-instructeur disant qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre André Y... et contre quiconque d'avoir commis le délit d'injures publiques ;

"aux motifs que le paragraphe n° 6 du procès-verbal de réunion du conseil d'administration de l'IUT de Dijon du 18 octobre 2001 et son annexe 1 sont, dans leur intégralité, ainsi libellés : 6-Information du président du conseil d'administration de l'IUT, François Z... informe les conseillers qu'une plainte pour diffamation a été posée par Marco X... contre le directeur de l'IUT ; celui-ci est susceptible d'être mis en examen pour des propos tenus lors d'une réunion ; il s'agit d'un fait grave, qui n'est pas le premier ; ces attaques et recours divers et systématiques qu'exerce Marco X... auprès des tribunaux contre des personnels enseignants ou administratifs de l'IUT notamment nuisent considérablement au fonctionnement général de l'IUT ; un temps précieux est gaspillé pour répondre à des accusations qui portent sur des faits passés qui n'ont plus aucune incidence sur une actualité riche et variée qui engage l'avenir de l'IUT ; l'attitude de Marco X... nuit évidemment à ce conseil d'administration puisqu'elle en écarte nombre de personnalités extérieures ; le conseil d'administration n'est pas resté insensible à tout cela ;

plusieurs de ses membres ont demandé à François Z... de pouvoir présenter une motion ce qui leur a été accordé ; Mme A... lit ce texte (annexe 1) ; avant même qu'une discussion s'engage, M. B..., personnalité extérieure représentant Bourgogne Technologies, prend la parole ; ce qu'il va dire, il l'aurait dit, quand bien même il n'y aurait pas eu dépôt d'une motion dont il a découvert l'existence à l'instant ; depuis le début de la séance, il a chronométré lui-même la durée des interventions de chacun et a constaté que, pendant la première heure de débat, Marco X... a mobilisé la parole 10 minutes soit 1/6ème du temps qu'il a utilisé à mener une guerre privée qui gangrène les réunions et en écarte nombre de personnes ; Marco X... se lève, distribue des documents et tente d'en rétroprojeter certains ; comme ces documents ne concernent pas l'actualité du débat, il en est dissuadé par le président du conseil d'administration ; François Z... recentre la discussion et soumet la motion au vote : 1 abstention, 20 voix pour ; M. C..., qui s'était absenté dès le début de cette discussion, n'a pas pu participer au vote ; Serge D... indique que l'Université n'est pas indifférente à ce qui se passe à l'IUT et qu'elle connaît les difficultés qu'affronte cette composante ; l'IUT doit retrouver le climat de sérénité nécessaire à son fonctionnement ; par deux fois le conseil d'administration et son président ont appelé à un retour à la mesure et à la quiétude ; Serge D... lit l'extrait suivant du procès-verbal du conseil d'administration de l'université en date du 17 septembre 2001 ; le président du conseil E... informe le conseil d'administration de l'université d'une situation qui perdure depuis un certain temps et qui perturbe le fonctionnement d'une composante ; un enseignant a déposé de nombreux recours auprès du tribunal administratif sur le fonctionnement de la composante où il exerce et du laboratoire où il est rattaché ; certains personnels de l'université sont mis directement en cause ; le président souhaite que le conseil d'administration apporte un soutien à ces personnes injustement impliquées et diffamées ; l'université a demandé à un avocat de préparer un recours pour procédure abusive ; le conseil d'administration approuve ces propositions ; Marco X... propose à Serge D... un débat public sur les sujets abordés (heures complémentaires, frasques de mars, concession de logement) ; Serge D... décline cette invitation, rappelle que son rôle est d'apporter le soutien de l'université de Bourgogne au conseil d'administration de l'IUT et à l'IUT lui-même, de veiller à l'avenir des étudiants, souligne qu'il est nécessaire de sérier les problèmes et que l'Histoire saurait trier l'essentiel de l'événementiel ; François Z... adresse les remerciements du conseil d'administration à Serge D... ;

"annexe 1" : proposition de motion : réunis le 18 octobre 2001, en présence de François Z... leur président, d'André Y... leur directeur, et de Serge D..., premier vice-président de l'université représentant Bernard E..., président, les membres du conseil d'administration de l'IUT de Dijon affirment qu'ils se désolidarisent totalement de toutes les actions conduites depuis plusieurs années par l'un d'entre eux à l'encontre de l'IUT et de certains de ses responsables ; qu'ils déplorent que quiconque puisse se livrer à de telles manoeuvres qui mettent en cause nommément de nombreux collègues et responsables de l'institut ; qu'ils estiment que ces agissements sont injurieux et calomnieux pour les personnes mises en cause, mais aussi pour l'IUT en tant qu'institution et, par voie de conséquence, pour chacun des acteurs qui le composent ; qu'ils sont prêts à mettre tout en oeuvre pour que la personne manifestement malveillante qui se rend coupable de tels actes soit sommée de stopper ses agissements ; ils proclament solennellement que les missions de l'IUT visent, pour leur part majeure, le devenir professionnel des étudiants et que, à ce titre, ce lieu de formation ne doit pas devenir le terrain de règlements de comptes personnels, corporatistes, et/ou institutionnels ; que l'université, à laquelle appartient l'IUT est vectrice de valeurs humanistes que l'on ne doit pas laisser, sans réagir, bafouer par un individu sans scrupules ; qu'ils sont déterminés à faire le nécessaire pour mettre un terme à l'emprise de la suspicion systématique, afin que le travail puisse se poursuivre dans la sérénité (tant au sein des conseils et commissions que pour la conduite des enseignements et des activités annexes) et que règne à nouveau, à l'IUT, un climat positif orienté vers une réelle réflexion approfondie sur les sujets qui engagent l'avenir des étudiants et de l'institution elle-même ;

que sont imputés à la partie civile, aux termes des document susénoncés, des faits précis (engagement d'actions en justice qualifiées de manoeuvres et d'agissements injurieux et calomnieux, utilisation de l'IUT comme terrain de règlement de comptes personnels, corporatistes et/ou institutionnels), de nature à porter atteinte à son honneur et à la considération de sa personne ; que les expressions et imputations incriminées dans la plainte comme injurieuses ne sauraient être isolées de ces imputations auxquelles elles se rattachent directement et avec lesquelles elles se confondent, imputations qui auraient pu faire l'objet d'une preuve de la part des mis en cause ; qu'elles ne peuvent en conséquence être poursuivies sous la qualification d'injures ;

"1 ) alors qu'en matière de diffamation et d'injure publique délits visés par la loi sur la liberté de la presse, il appartient à la Cour de cassation de se reporter à l'écrit incriminé lui-même et de vérifier la qualification que lui a donnée la décision déférée ; qu'il résulte de l'écrit incriminé joint à la plainte avec constitution de partie civile que si des faits précis étaient imputés à Marco X..., ils avaient trait exclusivement à l'exercice du droit par celui-ci d'ester en justice ; que l'imputation d'introduire des recours devant les juridictions judiciaires et administratives qui ne porte pas par elle-même atteinte à l'honneur et à la considération de la personne concernée et que dès lors l'injure ne pouvait en l'espèce s'absorber dans la diffamation, seules les expressions injurieuses pouvant être retenues et qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a contredit le sens et la portée de l'écrit qui lui était soumis en sorte que sa décision ne satisfait pas en la forme, en raison de cette contradiction, aux conditions essentielles de son existence légale ;

"2 ) alors que les juridictions d'instruction ont l'obligation d'informer sur la plainte de la partie civile faute de quoi celle-ci est recevable à se pourvoir contre la décision par laquelle elles ont déclaré n'y avoir lieu à suivre et que constitue une décision de refus d'informer la décision par laquelle la chambre de l'instruction, saisie par la partie civile de faits constitutifs d'une infraction à la loi sur la liberté de la presse, se prononce, quant à la qualification des faits, au vu des seules énonciations de l'écrit joint à la plainte sans avoir procédé à aucune investigation quant au contexte dans lequel cet écrit a été élaboré et publié" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du magistrat-instructeur disant qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre André Y... et contre quiconque d'avoir commis le délit de dénonciation calomnieuse ;

"aux motifs qu'il ne résulte par ailleurs pas de l'information que les faits imputés à la partie civile dans le procès-verbal de réunion du conseil d'administration de l'IUT de Dijon du 18 octobre 2001 et son annexe 1 soient faux - observation étant faite à cet égard que la partie civile ne justifie ni même n'allègue qu'aucune des actions par elle engagées ait été déclarée bien fondée - et de nature à entraîner à son encontre des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires ;

"alors que les décisions des chambres de l'instruction doivent être motivées et qu'en ne résumant pas, fût-ce succinctement les investigations réalisées au cours de l'information, privant ainsi la Cour de cassation du droit de vérifier leur réalité, la décision de la chambre de l'instruction ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante et limité aux seules infractions d'injures publiques et de dénonciation calomnieuse, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que le demandeur se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, les moyens sont irrecevables, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;

Par ces motifs,

DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-84905
Date de la décision : 30/03/2005
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Dijon, 21 juillet 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 mar. 2005, pourvoi n°04-84905


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.84905
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