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23/03/2005 | FRANCE | N°04-85858

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 mars 2005, 04-85858


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire SALMERON, les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Christine,

- Y... Philippe,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 3 septem

bre 2004, qui a condamné la première, pour abus de biens sociaux, à 1 an d'emprisonnement ave...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire SALMERON, les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Christine,

- Y... Philippe,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 3 septembre 2004, qui a condamné la première, pour abus de biens sociaux, à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende et le second, pour banqueroute, à 100 jours-amende à 40 euros ;

Vu le mémoire produit ;

I - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé pour le compte de Philippe Y... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II. Sur le pourvoi en ce qu'il est formé pour le compte de Christine X... :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3, L. 241-9 du Code de commerce, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christine X... coupable d'abus de biens sociaux et, en répression, l'a condamnée à douze mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende ;

"aux motifs que : " la SARL Franco Européenne de Services (SFEDS), dont Christine X... est la gérante, est une société créée en 1993, toujours en activité, et qui a pour raison sociale la sélection, le recrutement et le placement de personnels médicaux et paramédicaux ; que l'information a permis d'établir que des virements inexpliqués avaient été effectués par cette société sur le compte de Mireille Z..., à savoir une somme de 901,94 euros (5 916,37 francs) au mois d'août 1998, ainsi que sur celui de Marc Olivier Y..., à savoir 304,90 euros (2 000 francs) le 3 juin 1997 et 302,34 euros (1 983,25 francs) le 14 août 1997 ; qu'il apparaît que ni Mireille Z..., qui n'est au demeurant pas employée par la SFEDS, ni Christine X... ne rapportent la preuve précise et détaillée d'une quelconque prestation ou service ayant pu expliquer un tel paiement ; qu'en effet, les documents versés au dossier de la procédure par la prévenue et qui portent mention d'une catégorie "Opération diverse" dans le Grand livre des comptes de la SFEDS, s'ils n'apportent de surcroît aucune précision supplémentaire sur la cause d'un tel versement, contribuent à tout le moins à entretenir son caractère obscur et équivoque ; concernant les sommes versées à Marc Olivier Y..., que si Christine X... allègue des prestations de service en informatique de la part de ce dernier à la SFEDS, elle ne fournit de ce chef que des factures de déplacement ou des extraits de compte non détaillés quant à la cause des sommes litigieuses, ni aucune pièce permettant d'attester la qualité de prestataire en informatique de Marc Olivier Y... pour la SFEDS ; par ailleurs, qu'il ressort des éléments du dossier de la procédure ainsi que de l'audition de Christine X... devant les enquêteurs, que celle-ci a offert à Marc Olivier Y... un ordinateur d'une valeur de 5 160,73 euros (33 852,14 francs) sur les fonds de la SFEDS ; que cet achat effectué le 21 août 1997 n'ayant été remboursé que le 31 octobre 1997, il n'y a pas de concomitance exonératoire entre les deux opérations ; qu'en outre, Christine X... ne saurait invoquer une erreur du comptable de l'époque, voire même sa propre ignorance quant à la comptabilité, sans se voir opposer tant sa qualité de gérante elle-même, que sa propre fonction de gérante confirmée ; également, que Marc Olivier Y... avait à sa disposition un téléphone portable appartenant à la SFEDS sans que ne soit apporté un quelconque élément probatoire permettant de justifier du "service après-vente" allégué à titre de justification ; enfin, qu'il est établi que Christine X... a retiré en octobre 1998 une somme de 45 734,71 euros (300 000 francs) sur le compte de la SFEDS ;

que, si une partie des fonds, soit 5 793,06 euros (38 000 francs) a été déposée sur les comptes respectifs des sociétés Performance et Terra Nova, l'autre partie soit 39 941,64 euros (262 000 francs) a été retrouvée lors de la perquisition effectuée au domicile de Christine X..., alors que cette dernière tentait de les dissimuler aux recherches des enquêteurs en les cachant dans le sac de sa fille de 6 ans ; que, dès lors, il y a lieu de constater que le versement sur les comptes des deux sociétés, ainsi que l'attitude répréhensible de la prévenue, sont autant d'éléments tendant à démontrer la rechercher manifeste d'une affection frauduleuse de l'argent de la SFEDS " ;

"alors 1 ) que : s'il appartient au dirigeant de démontrer que les fonds sociaux utilisés par lui l'ont été dans l'intérêt de la société, et non dans son intérêt personnel, c'est à la condition que les fonds en cause aient été prélevés de manière occulte ; qu'en imposant à Christine X... de démontrer que les virements réalisés au profit des époux Y... l'ont été dans l'intérêt de la société SFEDS, tout en constatant que les paiements litigieux ont fait l'objet d'une inscription régulière en comptabilité, ce qui exclut que leur soit conféré un caractère occulte, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés ;

"alors 2 ) que la preuve de l'absence de contrepartie à la rémunération versée, constitutive de l'abus de biens sociaux, doit être rapportée ; qu'en retenant l'absence de justification des prestations de service des époux Y..., sans établir que les virements réalisés à leur profit et la mise à disposition d'un téléphone portable étaient dénués de contrepartie effective pour la société SFEDS, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors 3 ) que l'absence de concomitance entre l'achat d'un ordinateur et son remboursement n'implique pas qu'il ait été fait un usage des fonds contraire à l'intérêt social de la société ;

qu'en déduisant l'abus poursuivi de l'absence de concomitance entre l'achat d'un ordinateur pour Marc Olivier Y... et le remboursement de sa valeur à la société SFEDS, sans établir que cette opération temporaire était dénuée de contrepartie effective pour l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors 4 ) que l'abus de biens sociaux consiste à favoriser une société à laquelle le dirigeant poursuivi est personnellement intéressé aux dépens de la société dont il abuse des fonds sociaux ; qu'en déduisant l'abus poursuivi du versement par Christine X... sur le compte bancaire de la société Terra Nova d'une partie des fonds prélevés sur le compte bancaire de la société SFEDS, sans constater que lors de cette opération, elle dirigeait la société Terra Nova ou y était personnellement intéressée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors 5 ) qu'en déduisant l'utilisation abusive par Christine X... des fonds sociaux de la société SFEDS du dépôt sur le compte bancaire de la société Performance d'une partie des fonds prélevés sur le compte bancaire de la société SFEDS et de la présence à son domicile d'une autre partie de ces fonds, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir que les prélèvements opérés sur le compte bancaire de la société SFEDS étaient dénués de contrepartie effective pour celle-ci" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3, L. 241-9 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christine X... coupable d'abus de biens sociaux et, en répression, l'a condamnée à douze mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende ;

"aux motifs que : " la SARL Performance a été créée en 1995 par Christine X..., qui en est la gérante, avec pour raison sociale initiale le recrutement médical ; qu'après une période de "sommeil" jusqu'en juillet 1996, cette SARL a été utilisée, avec l'accord de Christine X..., pour le commerce de papier recyclé, par le couple Marc Olivier Y... et Mireille Z... ; que l'enquête a permis de mettre en exergue que cette SARL Performance, qui était en réalité une "coquille vide" sans activité réelle, avait versé 2 286,74 euros (15 000 francs) mensuels de salaire brut à Mireille Z... à partir d'octobre 1996, alors que celle-ci dirigeait avec son mari la société Terra Nova et ne travaillait pas pour la SARL Performance " ;

"alors 1 ) que la preuve de l'absence de contrepartie à la rémunération versée constitutive de l'abus de biens sociaux doit être rapportée ; qu'en déduisant l'absence de contrepartie de la rémunération versée à Mireille Z... de l'absence d'activité réelle de la SARL Performance, tout en constatant que, après une période de "sommeil", cette société avait été utilisée par les époux Y... pour le commerce de papier recyclé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

"alors 2 ) que le délit d'abus de biens sociaux suppose un comportement intentionnel, qui consiste pour son auteur à se comporter comme le propriétaire des fonds sociaux et à agir dans un intérêt délibérément contraire à celui de la société ; qu'en s'abstenant de caractériser l'infraction poursuivie en son élément intentionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'abus de biens sociaux dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Salmeron conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-85858
Date de la décision : 23/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, 03 septembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 mar. 2005, pourvoi n°04-85858


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.85858
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