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23/03/2005 | FRANCE | N°04-81544

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 mars 2005, 04-81544


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Monique, épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, en date du 19 février 2004, qui, pour abus de confian

ce aggravé, l'a condamnée à 1 an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, et a...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Monique, épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, en date du 19 février 2004, qui, pour abus de confiance aggravé, l'a condamnée à 1 an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 314-1 et 314-2 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Monique Y... coupable d'abus de confiance aggravé ;

"aux motifs que l'enquête effectuée par les services de la Poste a mis en évidence que les retraits litigieux du compte courant d'Emile Z... se sont retrouvés de façon concomitante sur les comptes CCP et UECM de Monique Y..., comptes dont l'examen a mis en évidence des flux financiers inexpliqués à hauteur de la somme litigieuse ; que Monique Y... ne peut expliquer ces flux financiers par le fait qu'elle aurait " liquéfié " les salaires perçus par chèques par son mari du temps de son emploi à l'armurerie de Rohan ; qu'en effet, si, poursuivant ses investigations, M. A... - enquêteur de la Poste - a confirmé que les salaires de Monique Y... provenant de l'armurerie étaient habituellement versés sur le compte de son fils Frédéric et retirés immédiatement en espèces grâce à la levée de réserve d'encaissement que Monique Y... effectuait et qu'ils étaient encaissés en espèces sur son compte à elle, il a cependant maintenu le caractère inexpliqué des autres versements en numéraires conformément à ses tableaux, toujours concomitamment avec les retraits litigieux au préjudice d'Emile Z... pour un total de 141 000 francs ainsi que confirmé devant le juge d'instruction ;

"alors que la culpabilité du prévenu doit être affirmée en termes non hypothétiques ; qu'en énonçant, pour déclarer Monique Y... coupable d'avoir commis des détournements de fonds au préjudice d'Emile Z..., dont elle gérait les comptes ouverts par lui à la Poste, que des versements " inexpliqués " avait été effectués sur les comptes de cette fonctionnaire de la poste à hauteur des sommes que ce client lui reprochait d'avoir détournées, la cour d'appel, qui a ainsi assis la déclaration de culpabilité qu'elle prononçait sur une simple supposition de détournements de fonds, dont le caractère certain n'est en conséquence pas constaté, n'a pas donné une base légale à sa décision" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Monique Y..., conseiller financier à La Poste, a régulièrement prélevé sur les comptes d'un client de cet établissement des sommes d'argent dont elle ne lui remettait qu'une partie, détournant à son profit le surplus ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'abus de confiance dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 800, 800-1 et R. 93 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Monique Y... aux frais de justice visés par l'article R. 93 du Code de procédure pénale ;

"alors que les dépenses énumérées par l'article R. 93 du Code de procédure pénale sont, aux termes de ce texte, assimilées aux frais de justice criminelle, correctionnelle et de police, lesquels sont à la charge de l'Etat et sans recours envers les condamnés en vertu de l'article 800-1 du même Code ; que, dès lors, en condamnant la prévenue aux frais de justice visés par l'article R. 93 du Code de procédure pénale, la cour d'appel a entaché sa décision d'une erreur de droit" ;

Attendu que la prise en charge par l'Etat des frais de justice criminelle, correctionnelle et de police au titre de l'article 800-1 du Code de procédure pénale ne concernant que les frais énumérés à l'article R. 92 pris en application de l'article 800 dudit Code, l'arrêt attaqué n'encourt pas le grief allégué ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de la loi des 16 et 24 août 1790 et des articles 1382 du Code civil, 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Monique Y... à payer à Michel Z... la somme de 22 500 euros à titre de dommages-intérêts ;

"aux motifs que, selon des conclusions datées du 17 décembre 2003, Michel Z... s'est constitué partie civile en sa qualité de légataire universel de la victime et conclut à la condamnation de Monique Y..., in solidum avec la Poste, civilement responsable des agissements de ses préposés, à lui payer une somme de 32 009,22 euros à titre de dommages-intérêts ;

qu'au titre des détournements de fonds dont Monique Y... a été déclarée coupable et des préjudices consécutivement subis, la Cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 22 500 euros le montant des dommages-intérêts, toutes causes confondues ; que, compte tenu de la qualité de fonctionnaire de Monique Y..., ce sera à la juridiction administrative de déterminer si la faute commise par elle, objet de la présente condamnation, est ou non détachable du service et donc de se prononcer sur la condamnation in solidum de la Poste ;

"alors que la juridiction judiciaire est compétente pour statuer sur la réparation des conséquences dommageables de la faute commise par un agent public si celle-ci revêt le caractère d'une faute personnelle, détachable de la fonction ; que, dès lors, en retenant qu'il appartenait à la seule juridiction administrative de déterminer si les détournements commis par Monique Y... dans l'exercice de ses fonctions de conseiller financier à la Poste revêtait ou non le caractère d'une faute détachable du service, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

"et alors qu'en condamnant Monique Y... à réparer personnellement les conséquences dommageables du délit d'abus de confiance qu'elle l'a déclarée coupable d'avoir commis à l'occasion de l'exercice de ses fonctions de conseiller financier de la Poste sans constater que cette infraction, à la supposer établie, était détachable du service, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision" ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 ;

Attendu que l'agent d'un service public n'est personnellement responsable des conséquences dommageables de l'acte délictueux qu'il a commis que si celui-ci constitue une faute détachable de ses fonctions ;

Attendu qu'en se reconnaissant compétente pour statuer sur la responsabilité civile de la prévenue sans rechercher si la faute imputée à celle-ci, fonctionnaire de la Poste, présentait le caractère d'une faute détachable de la fonction, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions civiles, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Colmar, en date du 19 février 2004, toutes autres dispositions étant expréssement maintenues, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Colmar, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-81544
Date de la décision : 23/03/2005
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de COLMAR, 19 février 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 mar. 2005, pourvoi n°04-81544


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.81544
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