AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller PONROY, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Chantal,
contre l'arrêt de la cour d'assises du VAR, en date du 17 mars 2004, qui, pour complicité d'assassinat, l'a condamnée à 28 ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 272, 273, 274, 276, 277, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Chantal X... coupable de complicité d'assassinat et, en répression, l'a condamnée à la peine de 28 années de réclusion criminelle ;
"alors que cinq jours au moins avant l'ouverture des débats, le président de la cour d'assises doit interroger l'accusé et l'inviter à choisir un avocat pour l'assister dans sa défense ; que ces formalités sont prescrites à peine de nullité et doivent être consignées dans un procès-verbal signé par le président, le greffier et l'accusé ; qu'au cas d'espèce, le procès-verbal constatant l'interrogatoire de Chantal X... par le président ne figure pas au dossier et aucune autre pièce du dossier ne peut suppléer à cette carence, de sorte que la chambre criminelle est dans l'impossibilité de s'assurer que les formalités prescrites, à peine de nullité par les articles 272 et suivants du Code de procédure pénale, ont bien été accomplies ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué doit être censuré pour violation des textes susvisés" ;
Attendu qu'en application des articles 305-1 et 599, alinéa 2, du Code de procédure pénale, l'accusée n'est pas recevable à présenter, comme moyen de cassation, une nullité concernant son interrogatoire préalable par le président, qu'elle n'a pas invoquée devant la cour d'assises conformément au premier de ces textes ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles 315, 316, 326, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que par arrêt incident du 16 mars 2004, la Cour a refusé de reporter les débats à une session ultérieure pour que puissent être entendus les témoins Clotilde Y..., Pierre Y..., Alain Z..., Christophe A..., Michèle B..., Nadia C... et Miranda D... et a décidé de passer outre leur audition ;
"aux motifs que, "l'instruction de l'affaire est en voie d'achèvement, la Cour ayant entendu tous les témoins et experts présents et ayant recueilli les explications des accusés ; qu'en ce qui concerne les témoins Clotilde Y..., Pierre Y... et Alain Z..., ceux-ci ont adressé à la cour d'assises des certificats médicaux faisant état de leur impossibilité, pour raisons médicales, d'être présents devant la cour d'assises du Var ; que, compte tenu de cette impossibilité attestée par des hommes de l'art, la Cour ne peut provoquer leur comparution forcée ; qu'en ce qui concerne les témoins Christophe A..., Michèle B..., Nadia C..., et Miranda D..., ceux-ci n'ont pu être destinataires de la citation qui leur a été délivrée à leur dernière adresse connue ; que les exploits ont été délivrés à parquet et qu'il a été fait application des dispositions de l'article 560 du Code de procédure pénale ; que, nonobstant la mise en application de ces dispositions, l'adresse de ces quatre témoins n'a pu être révélée ; que de surcroît, interrogée par le président de la cour d'assises au cours des débats, l'accusée Valéria E... a précisé qu'elle ignorait l'adresse de sa fille Michelle B..., alors que, pour sa part, l'accusé Nadi F... a déclaré ne pas connaître l'adresse de son neveu Christophe A... ; que dès lors toutes les investigations utiles ont été mises en oeuvre pour la découverte de l'adresse des témoins et leur comparution devant la cour d'assises, mais celles-ci se sont avérées infructueuses ; que la Cour ne peut donc, comme sollicité dans les conclusions de la défense de Chantal X..., ordonner que ces témoins soient immédiatement amenés devant la Cour, pour y être entendus ; que le renvoi de l'affaire à une session ultérieure, outre qu'il n'offre aucune garantie quant aux chances de retrouver l'adresse de ces témoins, retarderait inutilement le jugement de cette affaire dont les faits remontent au mois de décembre 1995 et ne permettrait pas le jugement des accusés dans un délai raisonnable ; que, de surcroît, à ce stade des débats, la déposition des témoins défaillants, n'apparaît pas indispensable à la manifestation de la vérité" (procès-verbal des opérations et de formation du jury de jugement et des débats, p.13) ;
"alors que, premièrement, lorsque l'accusé demande le renvoi des débats à une autre session en raison de l'absence de témoins régulièrement acquis aux débats, les juges du fond ne peuvent rejeter cette demande que s'ils justifient que la comparution des témoins s'avère impossible même à une session ultérieure ;
qu'au cas d'espèce, en énonçant pour les témoins Clotilde Y..., Pierre Y... et Alain Z... qui produisaient des certificats médicaux justifiant leur impossibilité de comparaître sans dire en quoi leur état de santé ne leur permettrait pas de comparaître à une session ultérieure, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"et alors que, deuxièmement, en énonçant que la déposition des témoins défaillants n'apparaissait pas indispensable à la manifestation de la vérité, sans expliciter cette affirmation, les juges du fond n'ont pas motivé leur décision et ont violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'en prononçant, par les motifs reproduits au moyen, la Cour a souverainement apprécié, au vu des résultats de l'instruction à l'audience, l'opportunité de refuser le renvoi et de passer outre, sans méconnaître les textes légaux et conventionnels invoqués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Ponroy conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;