AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller CORNELOUP, les observations de Me CAPRON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Khemissi,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la LOIRE, en date du 6 février 2004, qui, pour viols aggravés, l'a condamné à 13 ans de réclusion criminelle et 10 ans de suivi socio-judiciaire avec obligation de soins, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 331, alinéa 4, et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que le procès-verbal des débats se borne à énoncer qu'à l'audience des débats du 4 février 2004, les témoins Chantal Y..., Ouacine Z..., Rachid A..., Djamel A..., Guillaume B... et Giovanna C... (cf., procès-verbal des débats, p. 10), et, à l'audience des débats du 5 février 2004, les témoins Gérard D..., Patrick E... et Myriam F... (cf., procès-verbal des débats, p. 12) ont, avant leur déposition, satisfait à toutes les prescriptions contenues dans l'article 331 du Code de procédure pénale, ont prêté serment dans les termes exacts prévus à l'article 331, alinéa 3, du Code de procédure pénale et ont déposé séparément ;
"alors qu'il doit résulter du procès-verbal des débats que les témoins n'ont pas été interrompus dans leur déposition, ainsi que le prescrit l'article 331, alinéa 4, du Code de procédure pénale ; que tel n'est pas le cas en l'espèce" ;
Attendu que, selon le procès-verbal des débats, les témoins ont été entendus après avoir satisfait à toutes les prescriptions de l'article 331 du Code de procédure pénale et ont répondu, après leur déposition, aux questions qui leur étaient posées ;
Attendu qu'à défaut de constatations contraires, il résulte de ces mentions qu'ils ont été entendus sans être interrompus ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 231, 348, 352 et 366 du Code de procédure pénale, ensemble les articles 6.1 et 6.3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le principe du respect des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Khemissi X... coupable du crime de viol sur la personne de Sandes G... et l'a condamné, en conséquence, à la peine de treize ans de réclusion criminelle et a ordonné à son encontre un suivi socio-judiciaire, comprenant, notamment une injonction de soins ;
"alors que, de première part, les mentions de la feuille de questions et les énonciations de l'arrêt de condamnation doivent, à peine de nullité, être en concordance ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, puisqu'il existe une discordance entre les mentions de la feuille des questions et l'arrêt de condamnation quant à l'identité de la victime du viol reproché à Khemissi X..., la feuille des questions mentionnant que la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question n° 1 libellée en ces termes : "l'accusé Khemissi X... est-il coupable d'avoir à Lyon (69), dans la nuit du 26 au 27 juin 2001, commis sur la personne de Sandra G..., par violence, contrainte, menace ou surprise, un acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu'il soit ?" tandis que l'arrêt de condamnation énonce que Khemissi X... s'est rendu coupable du crime de viol "sur la personne de Sandes G..." ;
"alors que, de deuxième part, la cour d'assises ne peut connaître d'aucune autre accusation que celle résultant de l'arrêt de mise en accusation ; que la cour d'assises ne pouvait, dès lors, connaître de l'accusation formulée à la question n° 1 à l'encontre de Khemissi X... d'avoir commis "sur la personne de Sandra G..., par violence, contrainte, menace ou surprise, un acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu'il soit", accusation qui était substantiellement différente de celle résultant du dispositif de l'ordonnance de mise en accusation, Khemissi X... ayant été accusé, aux termes de cette ordonnance, d'avoir commis ces faits "sur la personne de Sandes G...", et sur une autre victime que celle indiquée à la question n° 1 ;
"alors qu'enfin, et en tout état de cause, la lecture des questions par le président de la cour d'assises est obligatoire quand elles ne sont pas posées dans les termes du dispositif de l'arrêt de renvoi ; qu'en l'espèce, le président de la cour d'assises s'est abstenu de lire à l'audience la question de culpabilité n° 1, qui n'était pourtant pas conforme au dispositif de l'ordonnance de renvoi, l'identité de la victime indiquée à cette question étant différente de celle retenue dans le dispositif de l'ordonnance de mise en accusation ; qu'une telle abstention ne saurait être justifiée par le pouvoir qu'a le président de la cour d'assises de rectifier, tant qu'il ne modifie ni la substance ni la nature des faits imputés à l'accusé, une éventuelle erreur sur l'identité de la victime de l'infraction, dès lors que le président de la cour d'assises a déclaré, à l'audience, que les questions auxquelles la Cour et le jury auraient à répondre seraient posées dans les termes de l'arrêt de renvoi, et qu'il n'a nullement indiqué qu'il convenait d'apporter une modification portant sur l'identité de la victime" ;
Attendu que le moyen, qui se fonde sur une simple erreur matérielle de la feuille de questions portant sur le prénom d'une des victimes, ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 131-36-1 et 131-36-4 du Code pénal ;
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné à l'encontre de Khemissi X... un suivi socio-judiciaire, comprenant, notamment une injonction de soins, et fixé à cinq ans la durée maximum d'emprisonnement encouru en cas d'inobservation des obligations qui lui seront imposées ;
"alors que, d'une part, il ne résulte ni du procès-verbal des débats ni de l'arrêt de condamnation que le président de la cour d'assises ait, comme l'y obligeaient les articles 131-36-1, alinéa 4, et 131-36-4, alinéa 2 et 3, du Code pénal, averti Khemissi X..., d'une part, des obligations résultant du suivi socio-judiciaire et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation, d'autre part, de ce qu'aucun traitement ne pourrait être entrepris sans son consentement, mais de ce que s'il refusait les soins qui seraient proposés, l'emprisonnement de cinq années prononcé à son encontre pourrait être mis à exécution, et, enfin, de ce qu'il aurait la possibilité de commencer un traitement pendant l'exécution de la peine de réclusion criminelle prononcée à son encontre ;
"alors que, d'autre part, le prononcé de l'injonction de soins est, aux termes de l'article 131-36-4, alinéa 2, du Code pénal, subordonné à l'établissement, après une expertise médicale, que la personne poursuivie est susceptible de faire l'objet d'un traitement ;
que, dès lors, qu'il ne résulte ni de l'ordonnance de renvoi ni de l'arrêt de la cour d'assises ayant statué en première instance, ni du procès-verbal des débats ni de l'arrêt de condamnation qu'il ait été établi, après une expertise médicale, que Khemissi X... était susceptible de faire l'objet d'un traitement, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer que les conditions posées par la loi au prononcé d'une injonction de soins à son encontre aient été respectées en l'espèce" ;
Attendu que le visa, dans l'arrêt de condamnation, des articles 131-36-1 à 131-36-8 du Code pénal suffit à établir que, conformément aux prescriptions de ces textes, l'obligation de soins a été imposée au vu d'une expertise médicale et que le président, après le prononcé de la décision, a donné à l'accusé les divers avertissements prévus aux articles 131-36-1 et 131-36-4 ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Corneloup conseiller rapporteur, MM. Le Gall, Pelletier, Mme Ponroy, M. Arnould, Mme Koering-Joulin conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron, M. Lemoine, Mme Labrousse conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Finielz ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;