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24/02/2005 | FRANCE | N°03-18135

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 février 2005, 03-18135


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 5 juin 2003), que les moniteurs de la société PROMAG, en charge du développement des activités nautiques de voile dans la ville de Gruissan, ont installé, au bord d'un étang, sur la plage, un tremplin, composé d'un plan incliné, pour effectuer des sauts à vélo tout terrain (VTT) dans l'étang ; que, 9 jours après, M. X..., en plongeant, a glissé du sommet du tremplin et s'est blessé en tombant

au droit du tremplin où l'eau était peu profonde ; que M. X..., ses parents, ses s...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 5 juin 2003), que les moniteurs de la société PROMAG, en charge du développement des activités nautiques de voile dans la ville de Gruissan, ont installé, au bord d'un étang, sur la plage, un tremplin, composé d'un plan incliné, pour effectuer des sauts à vélo tout terrain (VTT) dans l'étang ; que, 9 jours après, M. X..., en plongeant, a glissé du sommet du tremplin et s'est blessé en tombant au droit du tremplin où l'eau était peu profonde ; que M. X..., ses parents, ses soeurs et son frère (les consorts X...) ont assigné la société PROMAG et son assureur, la compagnie Axa en réparation de leur préjudice, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie ;

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes, alors, selon le moyen :

1 / que la cour d'appel a constaté que le dommage litigieux avait été provoqué par la chute de la victime à partir d'un tremplin appartenant à la société PROMAG et que celle-ci en avait conservé la garde ; qu'elle a également constaté que la chute de la victime avait eu des conséquences dramatiques, précisément parce que le tremplin avait été placé à un endroit où l'eau était très peu profonde ; qu'elle ne pouvait donc nier le rôle causal joué par le tremplin dans la réalisation de l'accident, sous prétexte qu'il était dans une position "normale", tout en constatant elle-même qu'il avait été, par sa position, l'instrument du dommage ; qu'elle a violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

2 / que, en toute hypothèse, la cour d'appel ne pouvait considérer comme "normal" et "n'ayant rien d'insolite" le fait qu'un tremplin soit abandonné pendant neuf jours au bord d'un étang, et à un endroit où l'eau est peu profonde, à la portée de tous les estivants, en plein mois d'août ; que la cour d'appel a de plus fort, violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

3 / que la faute de la victime, à la supposer démontrée, ne peut exonérer totalement le gardien de la chose que si celui-ci démontre que cette faute revêtait pour lui le caractère d'une cause étrangère imprévisible et irrésistible ; que la cour d'appel, en exonérant totalement la société PROMAG de toute responsabilité, sous prétexte que la victime avait commis une faute en utilisant le tremplin comme un plongeoir, sans constater que cette faute était pour le gardien imprévisible et irrésistible, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

4 / que, dans leurs conclusions d'appel n° 2, les consorts X... avaient longuement développé l'idée que la société PROMAG, déjà responsable en tant que gardien du tremplin, était également responsable en tant que commettant des moniteurs qui l'avaient déplacé au bord de l'étang, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, après avoir insisté sur le fait que le lien de préposition avait été maintenu au moment de l'installation du tremplin ; qu'en affirmant que les consorts X..., parce qu'ils ne concluaient pas à l'infirmation du jugement entrepris, se fondaient exclusivement sur la notion de garde et non sur la notion de subordination, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt retient que le tremplin avait été installé, sur la plage, en limite du plan d'eau, afin de permettre aux utilisateurs de prendre leur élan en roulant avec leur VTT avant de retomber dans l'eau, à une distance éloignée ; que la présence d'un tel tremplin n'avait rien d'insolite et d'anormal dans un lieu d'animation sportive, qu'il ne présentait lui-même aucun caractère de dangerosité alors qu'il était d'une hauteur de 1 m et d'une largeur de 1,20 m ; que M. X... qui connaissait parfaitement les lieux et savait qu'il n'existait aucune profondeur au droit du tremplin, a détourné sciemment l'usage du tremplin qui ne présentait aucun risque dans le cadre de son utilisation normale ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations établissant l'absence d'anormalité de la chose, la cour d'appel a exactement déduit que le tremplin n'avait pas été l'instrument du dommage ;

Et attendu que, la cour d'appel ayant retenu que la faute de M. X... était à l'origine exclusive de son dommage, le moyen, pris en sa troisième et sa quatrième branches, est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... et celle de la société Axa assurances et de la société PROMAG ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 03-18135
Date de la décision : 24/02/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Choses dont on a la garde - Fait de la chose - Chose instrument du dommage - Exclusion - Applications diverses - Tremplin détourné sciemment de son usage par la victime.

Une victime s'étant blessée en plongeant dans un étang à partir d'un tremplin, composé d'un plan incliné et mis en place pour effectuer des sauts à vélo tout terrain, une cour d'appel qui retient que ce tremplin avait été installé sur la plage, en limite du plan d'eau, afin de permettre aux utilisateurs de prendre leur élan en roulant avant de retomber dans l'eau à une distance éloignée, que la présence d'un tel tremplin n'avait rien d'insolite ni d'anormal dans un lieu d'animation sportive, qu'il ne présentait aucun caractère de dangerosité, que la victime, qui connaissait parfaitement les lieux et savait qu'il n'existait aucune profondeur au droit du tremplin, avait détourné sciemment l'usage du tremplin, qui ne présentait aucun risque dans le cadre de son utilisation normale, en déduit exactement, qu'en l'absence d'anormalité de la chose, le tremplin n'avait pas été l'instrument du dommage.


Références :

Code civil 1384 al. 1er

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 05 juin 2003

Sur d'autres applications du même principe, à rapprocher : Chambre civile 2, 1995-01-11, Bulletin 1995, II, n° 18, p. 10 (cassation) ; Chambre civile 2, 2002-07-11, Bulletin 2002, II, n° 175, p. 139 (rejet)

arrêt cité ; Chambre civile 2, 2004-11-25, Bulletin 2004, II, n° 507, p. 433 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 fév. 2005, pourvoi n°03-18135, Bull. civ. 2005 II N° 52 p. 49
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 II N° 52 p. 49

Composition du Tribunal
Président : M. Dintilhac.
Avocat général : M. Domingo.
Rapporteur ?: M. Grignon Dumoulin.
Avocat(s) : Me de Nervo, la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.18135
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