AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-14-3, L. 321-1 et L. 321-1-2 du Code du travail ;
Attendu qu'en janvier 1994, la SECE, employeur de Mme X..., a, pour raison économique, proposé aux quatre salariés de l'entreprise une diminution de salaire à compter de février 1994, sans leur envoyer la lettre recommandée avec avis de réception, prévue par l'article L. 321-1-2 du Code du travail ; que la salariée, qui a été licenciée le 25 avril 1997, et dont le salaire avait été diminué, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de rappel de salaire, de 13e mois et en complément d'indemnité de licenciement ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt, après avoir relevé qu'il ressort des attestations que la SECE n'a pas adressé à chaque salariée une lettre recommandée, mais que l'intéressée a reçu directement de l'employeur l'information portant à la fois sur la modification envisagée et sur le délai de réflexion d'un mois dont elle disposait pour manifester son refus, énonce que, selon les dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 321-1-2 du Code du travail, la lettre recommandée a pour objet d'informer le salarié de la modification envisagée et du délai de réflexion dont il dispose pour manifester son refus ; que la lettre recommandée, qui apporte date certaine pour faire courir le délai de réflexion d'un mois, ne constitue pas une condition de fond, mais un moyen de preuve, et conclut que les garanties d'information et de délai de réflexion prévues par l'article susvisé ont été respectées à l'égard de Mme X..., laquelle n'ayant pas manifesté de refus, a accepté, au terme du délai de réflexion légal, la modification du contrat de travail ;
Attendu, cependant, que la modification du contrat de travail pour motif économique est soumise aux formalités prescrites par l'article L. 321-1-2 du Code du travail ; qu'il en résulte que l'employeur qui n'a pas respecté ces formalités ne peut se prévaloir ni d'un refus, ni d'une acceptation de la modification du contrat de travail par le salarié ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 février 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Européenne de conseils d'entreprise aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille cinq.