AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf janvier deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller PONROY, les observations de Me HEMERY, avocat en la Cour et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AMIENS,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 4 février 2004, qui, pour agressions sexuelles aggravées, atteintes sexuelles sur mineure de 15 ans, complicité de ces délits, corruption de mineure de 15 ans, a condamné Michel X... et Bernadette Y..., épouse X..., chacun, à 2 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis et mise à l'épreuve ;
Vu le mémoire et les observations produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire et des articles 380-6 et 515, alinéa 3, du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit que Me Franquet, avocat de la victime et de ses parents ne pouvait intervenir à l'audience, motif pris du défaut d'appel au civil ;
"alors que l'article préliminaire du Code de procédure pénale édicte que l'autorité judiciaire veille à l'information et à la garantie des droits des victimes au cours de la procédure pénale ;
que ceux-ci ne sauraient se résumer dans le seul droit à réparation ou à indemnisation ; qu'en effet, la loi du 15 juin 2000, en son même article préliminaire, affirme le caractère équitable et contradictoire de la procédure pénale et donc, la préservation de l'égalité des droits et des parties ; qu'au stade du jugement et des voies de recours, le principe d'égalité fonde le droit de la victime constituée partie civile à être entendue devant une cour d'appel, nonobstant le défaut général d'appel sur les dispositions civiles ; qu'aucune disposition législative n'autorise l'éviction arbitraire des parties civiles en cour d'appel du fait de l'extinction de l'action civile alléguée ; qu'au contraire, les articles 515, alinéa 3, et 380-6 du Code de procédure pénale, consacrent explicitement les droits de la victime non appelante, en cause d'appel correctionnel et d'assises ; que ces articles, ensemble combinés, érigent en principes généraux de la procédure pénale, d'une part, que la partie civile peut toujours demander en cause d'appel une augmentation des dommages-intérêts pour le préjudice souffert depuis la première décision, d'autre part, que même lorsqu'il n'a pas été fait appel de la décision sur l'action civile, la victime constituée partie civile en premier ressort peut exercer devant la juridiction d'appel, les droits reconnus à la partie civile jusqu'à la clôture des débats" ;
Attendu que, par jugement du tribunal correctionnel, les époux X... ont été condamnés, notamment pour agressions sexuelles aggravées et complicité, chacun, à six ans d'emprisonnement et à payer diverses sommes aux victimes régulièrement constituées parties civiles ;
Attendu que, saisie des appels interjetés par le ministère public et les prévenus sur les seules dispositions pénales du jugement, la cour d'appel a écarté des débats l'avocat des victimes ;
Attendu qu'en cet état, les juges du second degré ont fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet, les dispositions civiles du jugement étant devenues définitives, les victimes étaient irrecevables à intervenir en qualité de parties civiles devant la cour d'appel ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gall conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Ponroy conseiller rapporteur, MM. Pelletier, Arnould, Mme Koering-Joulin, M. Corneloup conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron, M. Lemoine, Mme Labrousse conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Chemithe ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;