AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf janvier deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l 'Avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jacky,
contre l'arrêt de la cour d'assises de l'ILLE-ET-VILAINE, en date du 29 octobre 2003, qui, notamment, pour vols avec arme, en récidive, l'a condamné à 30 ans de réclusion criminelle en portant la période de sûreté aux deux tiers de la peine, 10 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, a ordonné la confiscation des objets saisis, ainsi que contre l'arrêt du 31 octobre 2003 par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;
Sur le troisième moyen de cassation, proposé dans le mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 6.3,d, de la Convention européenne des droits de l'homme, 281, 310, 316, 329 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que la cour, statuant sur un incident contentieux, par arrêt du 23 octobre 2003 (PV des débats p. 45 et 46), s'est déclarée incompétente pour ordonner une quelconque mesure concernant un témoin défaillant, régulièrement signifié mais non cité, dont l'accusé n'a pas renoncé à l'audition ;
"aux motifs que le témoin, régulièrement signifié, n'a pas été cité et n'a pas comparu à l'audience ; que dès lors, n'étant pas acquis aux débats, il n'entre pas dans les pouvoirs de la Cour d'ordonner une quelconque mesure concernant ce témoin, lequel relève exclusivement du pouvoir discrétionnaire du président ;
"alors que les témoins, régulièrement signifiés mais non cités, sont acquis aux débats ; que dès lors, la Cour est exclusivement compétente pour se prononcer sur sa défaillance et ordonner, en cas de nécessité, qu'il soit amené par la force, ou prononcer le renvoi de l'affaire ; qu'ainsi la Cour a méconnu les textes susvisés" ;
Sur le quatrième moyen de cassation, proposé dans le mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 6 3, d, de la Convention européenne des droits de l'homme, 281, 310, 316, 329, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que la cour, statuant sur un incident contentieux, par arrêt du 24 octobre 2003 (PV des débats p. 53 et 54), s'est déclarée incompétente pour ordonner une quelconque mesure à l'égard de deux témoins défaillants, régulièrement signifiés mais non cités, dont l'accusé n'a pas renoncé à l'audition ;
"aux motifs que les deux témoins, régulièrement signifiés, n'ont pas été cités et n'ont pas comparu à l'audience ; que dès lors, n'étant pas acquis aux débats, il n'entre pas dans les pouvoirs de la Cour d'ordonner une mesure quelconque concernant ces témoins, lesquels relèvent exclusivement du pouvoir discrétionnaire du président ;
"alors que les témoins, régulièrement signifiés mais non cités, sont acquis aux débats ; que dès lors, la Cour est exclusivement compétente pour se prononcer sur leur défaillance et ordonner, en cas de nécessité, qu'ils soient amenés par la force, ou prononcer le renvoi de l'affaire ; qu'ainsi la cour a méconnu les textes susvisés" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 329 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, les témoins appelés par le ministère public ou les parties sont entendus dans le débat, même s'ils n'ont pas été assignés, à condition que leurs noms aient été signifiés, conformément aux prescriptions de l'article 281 dudit Code ;
Attendu que, les témoins Pascal Y..., Frédéric Z... et Guy A... n'ayant pas comparu à l'audience et l'accusé n'ayant pas renoncé à leur audition, la Cour, sur les conclusions déposées par la défense, s'est déclarée incompétente pour ordonner une mesure quelconque les concernant au motif que, régulièrement signifiés mais non cités, ils n'étaient pas acquis aux débats ; qu'à la suite de ces dénonciations, le président a décidé qu'il serait passé outre aux débats ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les noms desdits témoins ayant été régulièrement dénoncés, ces derniers se trouvaient acquis aux débats, la Cour a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens proposés,
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises de l'Ille-et-Vilaine, en date du 29 octobre 2003, ensemble la déclaration de la Cour et du jury et les débats qui l'ont précédée ;
CASSE ET ANNULE, par voie de conséquence, l'arrêt du 31 octobre 2003 par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises du Loiret, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine et sa mention en marge ou à la suite des arrêts annulés ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Sassoust conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;