AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré, que le 15 décembre 1999, la société ATN Technology (la société) a été mise en redressement judiciaire M. X... étant représentant des créanciers et M. Y..., administrateur ; que le 14 juin 2000, le tribunal a arrêté le plan de cession des actifs de cette société, M. Y... devenant commissaire à l'exécution du plan ; que la date de cessation des paiements ayant été reportée au 15 juillet 1999, M. Y..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et M. X..., en celle de représentant des créanciers, ont engagé, le 25 août 2000, une action en rapport relative à des paiements effectués, pendant la période suspecte, par la société au moyen de chèques ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan et le représentant des créanciers reprochent à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'action du représentant des créanciers, pour défaut de qualité, alors, selon le moyen :
1 ) que les conclusions d'appel, déposées au nom de M. X..., agissant en sa qualité de représentant des créanciers, ne précisaient nullement qu'il se bornerait accessoirement à intervenir à l'instance, et demandaient la confirmation du jugement qui avait jugé recevable l'action introduite par le représentant des créanciers tendant au rapport des sommes litigieuses, en application de l'article L. 621-109 du Code de commerce ; que dès lors, en considérant que le représentant des créanciers n'apparaît être dans la cause qu'au soutien des prétentions de ce dernier, sans lui-même faire valoir de droit propre, qu'il n'est donc présent qu'en tant qu'intervenant accessoire au sens de l'article 334 du nouveau Code de procédure civile et que la qualité pour exercer l'action en rapport ne peut donc s'apprécier en sa personne, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions en cause et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2 ) que si, après l'adoption du plan de cession, le représentant des créanciers demeure en fonction pendant le temps nécessaire à la vérification des créances, ses fonctions ne sont pas limitées dans leur objet, et rien n'exclut qu'il exerce alors les actions que la loi lui attribue ; qu'ainsi, en décidant que M. X..., représentant des créanciers, ne pouvait, après l'adoption du plan de cession, exercer l'action prévue par l'article L. 621-109 du Code de commerce, la cour d'appel a violé les articles L. 621-67 et L. 621-109 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé qu'après l'adoption du plan de cession, le représentant des créanciers ne demeure en fonction que pour vérifier le passif et n'a plus qualité pour agir en rapport du montant d'un chèque, l'arrêt retient que le plan ayant été adopté le 14 juin 2000, l'action en rapport engagée par M. X... le 25 août 2000 est irrecevable ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui attaque en sa première branche des motifs surabondants, n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 621-68 et L. 621-109, alinéa 2, du Code de commerce ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'action en rapport engagée par le commissaire à l'exécution du plan, l'arrêt retient que cette action est, aux termes mêmes de l'article L. 621-109 du Code de commerce, attitrée, en ce sens qu'elle n'est confiée, par un texte spécial, qu'à certains organes de la procédure collective dont le commissaire à l'exécution du plan n'est pas, que l'article L. 621-109, alinéa 2, est un texte restrictif et manifestement voulu comme tel par le législateur, puisque, dans l'article L. 621-110 du même Code, qui le suit immédiatement, le législateur n'a pas manqué de prévoir le commissaire à l'exécution du plan parmi les organes pouvant exercer l'action en nullité des actes passés en période suspecte, qu'il faut soigneusement distinguer de l'action en rapport ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le commissaire à l'exécution du plan trouve dans les pouvoirs qui lui sont conférés par l'article L. 621-68, alinéa 2, du Code de commerce, en vue de poursuivre les actions exercées avant le jugement arrêtant le plan, par le représentant des créanciers, pour la défense de leur intérêt collectif, qualité pour engager l'action en rapport prévue par l'article L. 621-109 du Code de commerce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a déclaré M. Y..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société ATN Technology, irrecevable à exercer l'action en rapport, l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Orléans le 5 juin 2003 ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne les sociétés Creuset, Semag, Cimmo et Mecaval, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille quatre.