AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, après avis de la Chambre commerciale, financière et économique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 mai 2000) que la société Launet, qui avait exécuté les travaux de construction que lui avait confiés la société Construction et études appliquées, pour le compte de la société civile Batilux (la SCI), a fait pratiquer le 25 janvier 1991 une saisie-arrêt à l'encontre de la SCI entre les mains de la société Union de crédit pour le bâtiment SA, aux droits de laquelle se trouve la société UCB Entreprises (l'UCB) ; que l'UCB avait consenti à la SCI un prêt destiné au financement des travaux de construction, sous la forme d'une ouverture de crédit en compte courant ; qu'au terme de la procédure de saisie-arrêt, un jugement a condamné l'UCB, assignée en déclaration affirmative, à verser, avec exécution provisoire les sommes saisies arrêtées entre les mains de la société Launet ; que l'UCB a interjeté appel de ce jugement ;
Attendu que la société Launet fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à restituer à l'UCB la somme versée au titre de l'exécution provisoire, alors, selon le moyen :
1 / que l'existence d'une ouverture de crédit en compte courant rend le banquier débiteur de sommes liquides et exigibles, peu important qu'elles soient affectées à un but déterminé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que lors de la dénonciation de la saisie-arrêt, l'UCB avait répondu à l'huissier de justice le 4 février 1991 que le crédit ouvert au profit de la SCI présentait un solde disponible de 740 053,50 francs ;
qu'en déclarant néanmoins qu'il existait seulement en faveur de la SCI un droit d'utilisation de la somme de 740 053,50 francs et que cette somme était restée dans le patrimoine du prêteur, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1892 et suivants du Code civil, et les articles 557 et suivants du Code de procédure civile ;
2 / qu'en tout état de cause que la valeur des fonds du débiteur saisi que détient un établissement bancaire doit être appréciée à la date de la saisie-arrêt ; qu'en se fondant sur le décompte de créance produit par l'UCB, arrêté au 20 novembre 1992, pour dire que la somme de 740 053 francs n'avait pas été utilisée par la SCI à la date de la saisie-arrêt effectuée le 25 janvier 1991 et qu'elle n'était en conséquence pas sortie du patrimoine de la banque, la cour d'appel a violé l'article 1134, et les articles 557 et suivants du Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'ouverture de crédit en compte courant, à concurrence de sa partie non utilisée, ne constitue qu'une promesse de prêt à une personne dénommée ; qu'il s'ensuit que la fraction inutilisée de l'ouverture de crédit n'est pas saisissable ;
Et attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a relevé, sans se fonder exclusivement sur le décompte produit par l'UCB, qu'à la date de la saisie-arrêt le crédit ouvert au profit de la SCI présentait un solde disponible d'un certain montant ; qu'ainsi la décision se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Launet aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Launet ; la condamne à payer à la société UCB entreprises la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, signé et prononcé par Mme Bezombes, conseiller le plus ancien non empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en l'audience publique du dix-huit novembre deux mille quatre.