AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Vu les articles 27,2 et 47 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que les décisions étrangères ne sont pas reconnues en France si l'acte introductif d'instance ou un acte équivalent n'a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant, régulièrement et en temps utile, pour qu'il puisse se défendre ; qu'en vertu du second la partie qui demande l'exécution d'une décision étrangère doit produire tout document de nature à établir que, selon la loi de l'Etat d'origine, la décision est exécutoire et a été signifiée ;
Attendu que pour déclarer exécutoire en France la décision du 12 février 1999 par laquelle la County Court de Kingston Upon Thames (Grande-Bretagne) a condamné M. X... et Mme Y... à payer à la société anglaise Sweet Factory International Limited les redevances impayées d'un contrat de franchise, l'arrêt attaqué retient d'abord que la régularité de la procédure suivie en Grande Bretagne est établie, au regard de cet Etat, par un certificat "du juge d'instance de la Cour Souveraine d'Angleterre et du pays de Galles du 19 avril 1999" selon lequel l'assignation, lancée le 4 janvier 1999 par la juridiction anglaise, avait été signifiée aux défendeurs le 12 janvier 1999 par voie postale, le jugement du 12 février 1999 leur ayant été signifié conformément aux dispositions de la règle 1 de l'ordonnance 22 ; qu'il déclare ensuite que les défendeurs ont été assignés en temps utile pour se défendre ; qu'enfin il précise que l'ordre public n'exige pas que la signification de la décision comporte l'indication des voies de recours existant à l'étranger ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contrôle des deux conditions cumulatives prévues à l'article 27,2 précité, selon les règles étatiques ou conventionnelles en vigueur dans le pays d'origine de la décision présentée à l'exequatur, est confié tant au juge de l'Etat requis qu'au juge de l'Etat d'origine, de sorte qu'il lui appartenait de s'assurer que les défendeurs avaient eu effectivement connaissance de l'instance engagée à l'étranger ou, à défaut, que les prescriptions des articles 20 de la Convention de Bruxelles et 15 de la Convention de la Haye du 15 novembre 1965 avaient été respectées par la juridiction anglaise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 novembre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la société Sweet Factory International Limited aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille quatre.