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16/11/2004 | FRANCE | N°01-11911

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 novembre 2004, 01-11911


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, tant du pourvoi principal que du pourvoi incident :

Attendu que, de 1988 à 1992, des vidéogrammes incorporant des phonogrammes publiés à des fins de commerce ont été diffusés par les sociétés de télévision Canal plus et Métropole télévision (M 6) ; que, la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) s'abstenant de recouvrer auprès

d'elles la rémunération prévue par la loi à l'intention des artistes-interprètes de p...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, tant du pourvoi principal que du pourvoi incident :

Attendu que, de 1988 à 1992, des vidéogrammes incorporant des phonogrammes publiés à des fins de commerce ont été diffusés par les sociétés de télévision Canal plus et Métropole télévision (M 6) ; que, la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) s'abstenant de recouvrer auprès d'elles la rémunération prévue par la loi à l'intention des artistes-interprètes de phonogrammes lorsque ceux-ci donnent lieu à radiodiffusion, la Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (SPEDIDAM) et le Syndicat national des artistes musiciens de france (SNAM), agissant par la voie oblique, les ont assignées en paiement ; que la société Canal plus a alors appelé en garantie la Société civile pour l'exercice des droits des producteurs phonographiques (SCPP), la société M 6 faisant de même à son égard et à celui de la Société des producteurs de phonogrammes en France (SPPF) ; que l'action de la SPEDIDAM et du SNAM, à laquelle s'était associée la Société pour l'administration des droits des artistes musiciens interprètes (ADAMI), a été dite recevable mais mal fondée ;

Attendu que ces trois dernières sociétés font grief à la décision attaquée (Paris, 9 mai 2001) d'avoir jugé que le régime invoqué de licence légale est sans application à la radiodiffusion de phonogrammes utilisés pour sonoriser des vidéogrammes, et ordonné le remboursement de sommes perçues par provision en première instance, violant ainsi à trois reprises, selon le moyen, l'article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle : d'abord, en ce que cette disposition, à relier aux articles 3 et 12 de la Convention de Rome du 26 octobre 1961 sur la protection des artistes-interprètes, se suffit à elle-même et a pour seule condition d'application la radiodiffusion de la séquence son telle que préalablement fixée et publiée ; ensuite, parce que l'incorporation d'un phonogramme dans un vidéogramme détermine une oeuvre composite, réservant conséquemment les droits voisins des artistes-interprètes, à l'instar de ceux de l'auteur lui-même, et leur ouvrant la rémunération de moitié inhérente à la licence légale ; pour la raison, enfin, que l'article L. 215-1, concernant seulement les droits des producteurs de vidéogrammes, n'affecte en rien les droits des artistes-interprètes, exclusivement régis par les articles L. 212-1 à L. 214-5 du même Code ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu, d'une part, que les articles L. 212-3 à L. 215-1 du Code de la propriété intellectuelle soumettent, à titre de principe, la reproduction et la communication au public des phonogrammes à l'autorisation cumulative du producteur et de l'interprète, et, d'autre part, que le régime de licence légale de l'article L. 214-1, texte propre aux phonogrammes déjà publiés à des fins de commerce et faisant l'objet d'une communication directe au public ou d'une radiodiffusion ou télédiffusion, ne pouvait recevoir application en dehors des cas ainsi strictement définis ; qu'elle a par ailleurs justement énoncé que ces dispositions internes écartaient les prévisions de l'article 12 de la Convention de Rome, ce que permet son article 16 ;

D'où il suit qu'en décidant que, si le vidéogramme réalisé par incorporation d'un phonogramme publié détermine une oeuvre distincte, les droits de l'artiste-interprète au titre de l'oeuvre ainsi incorporée relèvent du régime conventionnel général précité, l'arrêt est légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi provoqué éventuel :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne d'une part, la société SPEDIDAM et le Syndicat national des artistes musiciens de France d'autre part, la société ADAMI, aux dépens afférents à leur pourvoi respectif ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 01-11911
Date de la décision : 16/11/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droits voisins du droit d'auteur - Dispositions communes aux artistes-interprètes et aux producteurs de phonogrammes - Licence légale - Domaine d'application.

Le régime de licence légale de l'article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle, texte propre aux phonogrammes déjà publiés à des fins de commerce et faisant l'objet d'une communication directe au public ou d'une radiodiffusion ou télédiffusion, ne peut recevoir application en dehors des cas ainsi strictement définis. Le vidéogramme réalisé par incorporation d'un phonogramme publié détermine une oeuvre distincte de celui-ci et les droits de l'artiste-interprète au titre de l'oeuvre ainsi incorporée relèvent du régime conventionnel général prévu aux articles L. 212-3 et L. 215-1 du Code précité.


Références :

Code de la propriété intellectuelle L214-1, L. 212-1 à L. 215-1
Convention de Rome du 26 octobre 1961 art. 3, 12, 16

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 mai 2001

Sur le domaine d'application de l'article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle, dans le même sens que : Chambre civile 1, 2002-01-29, Bulletin, I, n° 33 (1), p. 25 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 nov. 2004, pourvoi n°01-11911, Bull. civ. 2004 I N° 274 p. 229
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2004 I N° 274 p. 229

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Ancel.
Avocat général : Avocat général : M. Sainte-Rose.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Gridel.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Baraduc et Duhamel, Me Capron, la SCP Boutet, la SCP Piwnica et Molinié, la SCP de Chaisemartin et Courjon.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:01.11911
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