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09/11/2004 | FRANCE | N°04-80292

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 novembre 2004, 04-80292


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf novembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de la société civile professionnelle BOULLEZ, de Me ROUVIERE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Mohamed,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 5 novembre 2003, qui l'a condamné a 1

500 euros d'amende pour diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat pub...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf novembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de la société civile professionnelle BOULLEZ, de Me ROUVIERE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Mohamed,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 5 novembre 2003, qui l'a condamné a 1 500 euros d'amende pour diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881, de l'article 14-27 de la loi du 6 août 2002, des articles 591 et 503 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mohamed X... coupable de diffamation envers un citoyen chargé d'un mandat public, après avoir écarté l'application de la loi d'amnistie du 6 août 2002, et qu'il l'a condamné à payer une amende ainsi qu'une indemnité de 1 500 euros à Alain Y..., in solidum avec l'association de défense des intérêts collectifs des contribuables et consommateurs de Plachy-Buyon ;

"aux motifs que, dans sa citation devant le tribunal correctionnel d'Amiens du 30 mars 2001, Alain Y... précise, à la première ligne de l'objet de sa demande, qu'il exerce sa profession d'agriculteur, et, à la deuxième ligne, qu'il était chargé, en outre, d'un mandat public, dans lequel il assurait les fonctions de premier adjoint communal, ainsi que celles de vice-président du syndicat de l'eau et qu'il est resté ainsi en fonction jusqu'au samedi 24 mars 2001, date de la formation de la nouvelle équipe municipale ; que, dans le dispositif de cette citation, il demande au tribunal correctionnel d'Amiens de dire que Mohamed X... s'est rendu coupable du délit de diffamation prévu par les articles 23, 29, 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881, et que l'article 31 précise que la diffamation commise par les mêmes moyens envers un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public ce qui en l'espèce, en raison des fonctions précitées d'Alain Y... ; que même si Alain Y... n'est pas expressément nommé, il est identifiable de manière sûre puisque le prospectus fait état d'un élu qui a cette qualité et celle d'exploitant et propriétaire et cette année là, Alain Y... était le seul à réunir ces deux qualités, au sein du conseil municipal de cette commune de 700 habitants , que le tract vilipende les manipulations qu'auraient commises Alain Y... qui, en se servant de son mandat de maire-adjoint, aurait détourné l'institution communale pour son intérêt personnel et se serait opposé à un projet concernant la maîtrise des eaux, dans un but strictement personnel ; que l'article L. 14-27 de la loi d'amnistie du 6 août 2002 dispose que sont exclus du bénéfice de l'amnistie, les délits de diffamation commis à l'encontre d'une personne chargée d'une mission de service public ;

"et qu'il est rappelé dans le tract que "cette façon de faire", s'analyse comme un "délit d'initié" et le tract souligne encore :

"nous disons non et non à ces dérives de l'éthique d'un élu" ; il est encore écrit : "très informé et très rusé, il savait que les services de la préfecture allaient prendre des mesures draconiennes de protection par zones rapprochées ou éloignées ; toutes ces mesures coercitives génèrent des obstacles à ses intérêts particuliers ; il fallait donc qu'il se mette vite en conformité en faisant détruire notre château d'eau" ;

ce tract est très clair sur les manipulations d'Alain Y..., qui se serait servi de son mandat de maire-adjoint pour détourner l'institution communale à son profit exclusif en s'opposant à un projet concernant la maîtrise des eaux dans un but strictement personnel ; ces diverses allégations sont à l'évidence diffamatoires comme portant atteinte à l'honneur et à la considération d'Alain Y... alors qu'elles ont été distribuées dans un tract remis à la population de cette commune de Plachy-Buyon de 700 habitants ;

l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 précise que la publication directe de cette imputation est punissable même si elle vise une personne non expressément nommée mais dont l'identification est rendue possible par les termes de l'imprimé ; dans ces conditions, la déclaration de culpabilité exprimée en première instance devra être purement et simplement confirmée ; la Cour estime qu'il convient de ne pas envenimer le débat et de maintenir la peine de 1 500 euros d'amende qui s'avérera suffisante pour cet enseignant âgé de 65 ans, décoré de la croix volontaire du combattant et chevalier des palmes académiques et au passé sans tâche ; la Cour, cependant, n'estime pas devoir amplifier le différend qui opposait les deux hommes et qui s'est cantonné à cette petite commune de Plachy-Buyon en ordonnant la publication dans le Courrier Picard dont il sera dispensé en appel ; dans la mesure où la culpabilité de Mohamed X... a été confirmée, il devra être débouté de ses demandes de 2 500 euros au titre du préjudice moral et de 6 000 euros pour les frais non compris dans les dépens qui ne peuvent être alloués qu'à la victime ;

"1) alors que les imputations dirigées contre Alain Y..., dans le tract diffusé le 1er janvier 2001, ne le visaient pas en qualité de premier adjoint au maire, mais seulement de conseiller municipal, dès lors qu'il était reproché à un "élu" d'avoir agi dans son intérêt personnel, en s'opposant à la création d'un captage d'eau, lors d'une séance du conseil municipal à laquelle il n'aurait pas dû participer ; qu'en décidant qu'Alain Y... était désigné dans sa qualité d'adjoint au maire, la cour d'appel a ajouté au tract, la mention d'une qualité qui n'y figurait pas, qu'ainsi, elle l'a dénaturé ;

"2) alors qu'à supposer même qu'Alain Y... ait été désigné implicitement sous sa qualité officielle de premier adjoint au maire, il est encore nécessaire, pour qu'un citoyen investi d'un mandat public, puisse être considéré comme diffamé à raison de sa fonction ou sa qualité, que les imputations dirigées à son encontre se rapportent à un acte relevant de ses fonctions même ; qu'en s'abstenant d'expliquer en quoi l'opposition manifestée par Alain Y... à la construction d'un nouveau captage d'eau relevait de ses fonctions de premier adjoint au maire, plutôt que de son mandat de conseiller municipal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"3) alors en toute hypothèse que la qualité de dépositaire ou d'agent de l'autorité publique ou de citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public, au sens de l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881, n'est reconnue qu'à celui qui accomplit une mission d'intérêt général en exerçant des prérogatives de puissance publique ; qu'en reconnaissant cette qualité à un conseiller municipal, sans constater qu'Alain Y... fût investi d'une délégation de compétence ou de signature de nature à lui conférer une prérogative de puissance publique, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à établir qu'il accomplissait une mission d'intérêt général en exerçant des prérogatives de puissance publique" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux conclusions dont elle était saisie, a exactement apprécié le sens et la portée des propos litigieux et caractérisé, en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public dont elle a reconnu le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier ne la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Chanet conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-80292
Date de la décision : 09/11/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, 05 novembre 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 nov. 2004, pourvoi n°04-80292


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.80292
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