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09/11/2004 | FRANCE | N°03-42902

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 novembre 2004, 03-42902


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 19 février 2003), M. X..., ancien cadre de la société Rhône-Poulenc agrochimie, aux droits de laquelle est la société Bayer Cropscience, après avoir constaté que le montant de l'allocation de retraite qui lui était servie par l'institution gestionnaire du régime de retraite complémentaire instauré par accord d'entreprise était calculé sans tenir compte de la partie variable de sa rémunération, a saisi la juridiction prud'homale d'

une demande d'indemnité en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 19 février 2003), M. X..., ancien cadre de la société Rhône-Poulenc agrochimie, aux droits de laquelle est la société Bayer Cropscience, après avoir constaté que le montant de l'allocation de retraite qui lui était servie par l'institution gestionnaire du régime de retraite complémentaire instauré par accord d'entreprise était calculé sans tenir compte de la partie variable de sa rémunération, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande d'indemnité en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Bayer Cropscience fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser au salarié, à titre de dommages-intérêts, sa vie durant, chaque trimestre, une somme, arrêtée au 30 septembre 2002, majorée des revalorisations échues et à échoir depuis cette date jusqu'à celle du paiement, outre revalorisation à échoir ultérieurement, une somme correspondant au rappel dû, arrêté au 30 septembre 2002, outre les sommes à intervenir chaque trimestre ultérieurement jusqu'au jour du paiement avec revalorisations éventuelles, outre intérêts au taux légal à compter de chaque échéance trimestrielle, et une somme correspondant aux intérêts au taux légal sur le rappel arrêté au 30 septembre 2002, alors, selon le moyen :

1 / que, pour être obligatoire, l'usage doit correspondre à une pratique suivie par le chef d'entreprise de manière générale, constante et fixe ; que l'exigence de généralité implique que l'avantage soit accordé à un groupe déterminé de salariés et le critère de constance que l'attribution se fasse de manière continue et durable ; que, pour retenir l'existence d'un usage dans l'entreprise consistant à intégrer les rémunérations variables dans le calcul de l'allocation complémentaire de retraite, la cour d'appel s'est fondée sur les témoignages de quatre cadres affirmant avoir bénéficié, lors de leur départ en retraite en 1991 et 1992, d'une allocation complémentaire de retraite calculée selon les modalités fixées par la note du 5 février 1991 ; qu'en se déterminant au regard de ces quatre seuls cas, quand le groupe Rhône-Poulenc comprend plusieurs milliers de salariés, la cour d'appel n'a pas caractérisé le critère de généralité ni de constance que doit présenter l'usage, qui seul aurait obligé l'employeur à prendre en compte dans le calcul de l'allocation complémentaire de retraite du salarié, sa rémunération variable et, partant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

2 / qu'il appartient au salarié qui revendique l'existence d'un usage de rapporter la preuve de son existence et de son étendue ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé qu'il existait dans l'entreprise un usage consistant à intégrer les rémunérations variables dans le calcul de l'allocation complémentaire de retraite après avoir énoncé que les attestations des cadres produites par le salarié établissaient qu'ils avaient bénéficié des modalités de calcul issues de la note du 5 février 1991, "sans qu'à l'inverse la société défenderesse puisse citer pour les années 1990, 1991, 1992 un seul cas dans lequel un cadre concerné par l'intégration de sa rémunération variable dans son régime de retraite "maison" n'en ait pas bénéficié" ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;

3 / que la société Bayer Cropscience faisait valoir que le salarié ne se trouvait pas dans le champ d'application de la note du 5 février 1991 dans la mesure où, ayant été licencié économique et n'ayant pas liquidé sa retraite au moment de son départ de l'entreprise, il ne pouvait prétendre cumuler l'intégration de sa rémunération variable dans le calcul de l'indemnité de licenciement et dans le calcul de son régime de retraite maison ; que la cour d'appel a constaté que l'objet de la note était énoncé "dans son préambule par l'expression "intégration de cette rémunération dans les calculs soit des régime de retraite "maison", soit de la prime de départ ou de licenciement" ; qu'en affirmant néanmoins que la note ne contenait aucune disposition excluant l'intégration des rémunérations variables dans le calcul de l'un si le salarié en a bénéficié dans l'autre, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 1134 du Code civil et la note du 5 février 1991 ;

4 / que les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; que la société Bayer Cropscience faisait valoir dans ses écritures que le salarié ne pouvait se prévaloir des règles fixées par la note du 5 février 1991 dans la mesure où il avait quitté l'entreprise à la fin de l'année 1990, avant que la note ne soit établie; qu'en omettant de répondre, même succinctement, à ce chef des conclusions de l'employeur, déterminant pour la solution du litige, la cour d'appel a méconnu les exigences de motivation posées par l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / que les conventions ou accords collectifs se substituent dès leur entrée en vigueur aux usages antérieurs, même si ces derniers étaient plus favorables aux salariés ; que les statuts de l'institution de retraite et de prévoyance Rhône-Progil, dans leur version modifiée résultant de l'accord du 23 mars 1993, prévoyaient de manière très claire, en leur article 26, que "le traitement annuel de base (TAB) est égal à la somme des douze derniers traitements mensuels de l'intéressé, base horaire normale à temps complet, prime d'ancienneté comprise s'il y a lieu" augmenté "des seules primes et gratifications régulières perçues pendant les douze derniers mois", étant précisé que "pour Rhône-Poulenc agrochimie, le TAB ne comporte que les 12 appointements mensuels, y compris le cas échéant la prime d'ancienneté, et le 13ème mois, à l'exclusion de tout autre élément" ; que les nouveaux statuts, entrés en vigueur le 1er octobre 1993, étaient applicables à M. X... qui n'a demandé la liquidation de ses droits à la retraite que le 1er juillet 1994 ; qu'en jugeant que ce nouveau statut ne remettait pas en cause l'usage institutionnalisé par la note du 5 février 1991 de prendre en compte les rémunérations variables dans le calcul de l'allocation complémentaire de retraite, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et les statuts de l'institution de retraite et de prévoyance Rhône-Progil, dans leur version modifiée résultant de l'accord du 23 mars 1993 ;

Mais attendu, d'abord, que, répondant aux conclusions, la cour d'appel a estimé, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et hors toute dénaturation, que l'employeur avait pris, en septembre 1990, antérieurement au licenciement de M. X... prononcé le 30 novembre 1990, l'engagement d'intégrer la partie variable de la rémunération des cadres dans le calcul de l'allocation complémentaire de retraite ;

Attendu, ensuite, que, la cour d'appel a retenu que l'employeur s'était engagé envers M. X... à l'indemniser du préjudice subi en cas de modification du régime de retraite de l'entreprise entre son départ de celle-ci et sa demande de liquidation de ses droits à l'allocation complémentaire de retraite ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en ce qu'il critique des motifs surabondants en ses première, deuxième et cinquième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Bayer Cropscience fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au salarié une somme correspondant aux intérêts sur le rappel arrêté au 30 septembre 2002, alors, selon le moyen :

1 / que le juge qui décide de fixer le point de départ des intérêts à une date autre que celle du prononcé du jugement doit motiver sa décision ; qu'en condamnant la société Bayer Cropscience à payer au salarié une somme correspondant aux intérêts au taux légal calculés à partir de chaque échéance qu'aurait dû percevoir le salarié et non pas aux intérêts sur le rappel d'allocations à compter du jugement, sans s'expliquer sur le point de départ des intérêts, autrement qu'en affirmant que les intérêts sur les sommes que le salarié aurait dû percevoir au fur et à mesure font partie du préjudice, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1153-1 du Code civil ;

2 / que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne sont dus que du jour de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent ; qu'en condamnant la société Bayer Cropscience à payer au salarié les intérêts sur les sommes que le salarié aurait dû percevoir au fur et à mesure, sans indiquer à quelle date le salarié aurait fait sommation à son employeur de lui payer les sommes réclamées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1153 du Code civil ;

Mais attendu qu'en fixant à une date autre que celle de sa décision le point de départ des intérêts des indemnités allouées au salarié, la cour d'appel n'a fait qu'user de la faculté remise à sa discrétion par l'article 1153-1 du Code civil ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bayer Cropscience aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Bayer Cropscience à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03-42902
Date de la décision : 09/11/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (chambre sociale), 19 février 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 nov. 2004, pourvoi n°03-42902


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CHAGNY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.42902
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