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26/10/2004 | FRANCE | N°04-81582

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 octobre 2004, 04-81582


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de Me ROUVIERE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Michel,

- La SOCIETE ETABLISSEMENTS X...,

contre l'arrêt de cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre, en date du 5 février 2004, qui a condamné le premier, pour i

nfractions à la législation relative à la sécurité des travailleurs, à deux amendes de 750 e...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de Me ROUVIERE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Michel,

- La SOCIETE ETABLISSEMENTS X...,

contre l'arrêt de cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre, en date du 5 février 2004, qui a condamné le premier, pour infractions à la législation relative à la sécurité des travailleurs, à deux amendes de 750 euros et la seconde, pour homicide involontaire, à 7 500 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-2, 121-3, 221-6, 221-7 du Code pénal, L. 231-1, L. 231-2, L. 263-2, L. 263-6 du Code du travail, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;

"en ce que, l'arrêt attaqué a confirmé le jugement déclarant Michel X... et la SA X... coupables des faits qui leur étaient reprochés, les a en répression condamnés respectivement à deux amendes de 750 euros et une amende de 7 500 euros, et déclarés responsables du préjudice subi par Maurice Y... ;

"aux motifs que l'extrait du registre du commerce et des sociétés concernant la SA X... versé aux débats par les prévenus mentionne que Pierre X... en est le président du conseil d'administration et Michel X... un administrateur, à la date du 7 août 2002 ; que, toutefois, Michel X... a établi une attestation de conduite de chariots automoteurs de manutention, conformément à l'arrêté du 2 décembre 1998, au bénéfice de Maurice Y..., datée du 14 mars 2000 ; qu'il résulte de cette pièce, que Michel X... était nécessairement titulaire d'une délégation de pouvoirs en tout le moins de fait en matière de sécurité dans l'entreprise ; que de surcroît, Michel X... est directeur général de la SA X..., administrateur au conseil d'administration de cette société ; qu'il s'est reconnu dans le cadre de son audition comme étant l'employeur de la victime ; que dès lors, il ne peut s'exonérer de sa responsabilité en soutenant qu'il n'est pas le dirigeant social de la SA X..., et que la procédure ne démontre pas qu'il aurait bénéficié d'une délégation de pouvoirs ; que l'attestation du 14 mars 2000 précise que la victime avait une qualification de chauffeur poids-lourds et de cariste ;

que cependant sur ce point, l'enquête a révélé que Maurice Y..., employé de manière récente par la SA X..., n'était pas titulaire de son permis cariste ; qu'il n'est pas démontré de même, que la victime aurait bénéficié d'une formation spécifique de cariste, en dehors de la simple affirmation de son employeur, au moment de son embauche ; qu'au contraire, une formation à laquelle devait participer Maurice Y... avait été prévue du 17 juillet au 21 juillet 2000, alors que l'accident s'est produit le 26 juin 2000 ; que, dans ces conditions, Michel X... délégataire de pouvoirs en matière de sécurité dans l'entreprise et employeur de la victime d'après ses propres déclarations a méconnu les dispositions relatives à la formation de ce salarié, l'exposant ainsi à un danger d'une particulière gravité ; qu'en outre la procédure de la gendarmerie, notamment les photographies des lieux de l'accident, et les procès-verbaux de l'inspection du travail des transports insistant sur l'encombrement des locaux et sur l'exiguïté des allées de circulation ; que, sur ce point, Michel X... ne justifie pas, au mépris de sa délégation de pouvoirs, avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de ses employés au cours des déplacements qu'ils sont amenés à faire dans les locaux de l'entreprise ; que dès lors le jugement déféré sera confirmé sur la déclaration de culpabilité de Michel X..., et sur la peine prononcée qui est équitable ; que sur l'infraction reprochée à la société X..., celle-ci par l'intermédiaire de Michel X... directeur général et délégataire de pouvoirs en matière de sécurité, en ayant employé un salarié à la conduite d'un chariot automoteur, alors qu'il n'était pas titulaire d'un permis de cariste, qu'il n'avait effectué aucune formation particulière pour conduire ce type d'engins, dans les locaux de surcroît encombrés, a commis des fautes particulièrement graves à l'origine de l'accident au cours duquel Maurice Y... est décédé ; que les premiers juges ont justement estimé que ces fautes avaient largement contribué au défaut d'appréciation et au manque de précaution par ailleurs relevé à l'encontre de la victime ; que, dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé sur la déclaration de culpabilité de la SA X... ainsi que sur la peine prononcée ; que le jugement entrepris sera également confirmé en ses dispositions civiles ;

"1/ alors que, Michel X... ne pouvait être poursuivi et condamné sans que soit établie l'existence d'une délégation expresse, en matière d'hygiène et de sécurité, émanant du seul responsable légal de l'entreprise, en l'occurrence Pierre X... ; que la cour d'appel qui se borne à affirmer, au regard d'une fonction contestée de directeur général de la société et de celle d'administrateur de Michel X..., qu'il était nécessairement titulaire d'une délégation de pouvoir, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;

"2/ alors que, Michel X... ayant été poursuivi sur le seul fondement des dispositions du Code du travail, la cour d'appel ne pouvait le déclarer responsable du préjudice subi par Maurice Y... sans caractériser le lien de causalité entre les manquements reprochés, à les supposer établis et le décès du salarié ; qu'ainsi l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard des textes visés au moyen ;

"3/ alors que, la cour d'appel ne pouvait retenir la culpabilité de Michel X... et de la société X... sans constater que le premier avait, à travers les faits incriminés, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, éléments constitutifs de l'infraction qui se seraient dès lors reportés sur la personne morale ; qu'ainsi, l'arrêt est entaché d'une violation des textes visés au moyen" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'un cariste de la société Etablissements X... est mort écrasé par une palette de papier qu'il était occupé à transporter à l'intérieur d'un hangar ; qu'à la suite de ces faits, Michel X..., directeur de l'entreprise, a été poursuivi pour infractions à la réglementation sur la sécurité des travailleurs tandis que la personne morale l'a été pour homicide involontaire ;

Sur le moyen pris en sa première branche :

Attendu que le moyen se borne à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, dont ils ont déduit, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, que Michel X... était titulaire d'une délégation de pouvoirs aux fins d'assurer, au sein de la société Etablissements X..., le respect de la réglementation relative à la sécurité des travailleurs ;

Qu'un tel grief ne peut être admis ;

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Attendu que, pour déclarer la société Etablissements X... coupable d'homicide involontaire, l'arrêt retient que celle-ci, par l'intermédiaire de Michel X..., directeur général et délégataire de pouvoirs en matière de sécurité, en employant un salarié à la conduite d'un chariot automoteur alors qu'il n'était pas titulaire d'un permis de cariste et n'avait reçu aucune formation pour conduire ce type d'engins, dans des locaux de surcroît encombrés, a commis des fautes particulièrement graves à l'origine de l'accident ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance, d'où il résulte que le président de la société ou son délégataire en matière de sécurité n'a pas accompli toutes les diligences normales pour faire respecter les prescriptions qui s'imposaient à la personne morale en ce domaine, la cour d'appel a caractérisé une faute d'imprudence ou de négligence engageant la responsabilité de celle-ci et ainsi justifié sa décision au regard des articles 121-2 et 121-3, alinéa 3, du Code pénal ;

D'où il suit que le grief ne saurait être accueilli ;

Mais sur le moyen pris en sa deuxième branche

:

Vu l'article L. 451 -1 du Code de la sécurité sociale ;

Attendu que, selon ledit article, aucune action en réparation du préjudice causé par un accident du travail ne peut, en dehors des cas prévus par ce texte, être exercée conformément au droit commun, par la victime contre l'employeur ou ses préposés ;

Attendu qu'après avoir déclaré à bon droit recevable la constitution de partie civile de l'ayant droit de la victime de cet accident du travail, les juges du second degré ont confirmé le jugement ayant déclaré Michel X... et la société Etablissements X... responsables du préjudice subi par cette victime ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi sur le principe même de la responsabilité civile de l'employeur, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 5 février 2004, mais en ses seules dispositions disant Michel X... et la société Etablissements X... responsables du préjudice subi par Maurice Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et attendu qu'il ne reste rien à juger ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-81582
Date de la décision : 26/10/2004
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre, 05 février 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 oct. 2004, pourvoi n°04-81582


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.81582
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