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20/10/2004 | FRANCE | N°03-85767

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 octobre 2004, 03-85767


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de Me COSSA, et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Daniel,

- Y... Celal,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 11 avril 2003, qui, pour pa

rticipation à la tenue d'une maison de jeux de hasard et infractions à la législation sur l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de Me COSSA, et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Daniel,

- Y... Celal,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 11 avril 2003, qui, pour participation à la tenue d'une maison de jeux de hasard et infractions à la législation sur les contributions indirectes, a condamné le premier, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, le second, à 15 mois d'emprisonnement dont 7 mois avec sursis et mise à l'épreuve, et les a condamnés solidairement à des amendes et pénalités fiscales ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi formé par Celal Y... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II - Sur le pourvoi formé par Daniel X... :

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er et 3 de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 modifié par la loi n 92-1336 du 16 décembre 1992, 591, 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Daniel X... coupable de participation à la tenue d'une maison de jeux de hasard où le public est librement admis et, en conséquence, l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs propres que c'est sans insuffisance ni contrariété de motifs et par une juste appréciation des faits et des circonstances de la cause tels qu'ils ont été relatés dans le jugement déféré en un exposé que la Cour adopte, que les premiers juges ont déclaré fondée la prévention à l'encontre de Celal Y... et Daniel X... ; qu'il ressort de l'information et des débats et de l'exposé des faits repris dans le réquisitoire définitif de renvoi auquel la Cour se réfère expressément que Celal Y... a acquis le fonds de commerce "Le Lion de Belfort" et que dès l'origine il y organisait des jeux de hasard ce qui de son propre aveu lui procurait des gains suffisants pour honorer des engagements financiers ; que Daniel X... a toujours reconnu son activité de joueur et de responsable des tables de jeux "rami-poker" ce qui lui assurait parallèlement des gains substantiels ; que s'agissant de l'infraction pénale les prévenus ont toujours admis le principe de culpabilité ;

qu'ils se bornent à remettre en cause la sévérité du tribunal ainsi que le montant des pénalités fiscales ; que la peine infligée par les premiers juges constitue une sanction proportionnée à la gravité des faits, adaptée à la personnalité des prévenus et conformes aux exigences de la défense de l'ordre public ( ) ; que Daniel X... doit recevoir un avertissement sérieux ;

"et aux motifs adoptés que les déclarations plus ou moins développées des joueurs interpellés le 6 mai ainsi que celles des joueurs identifiés par la suite au cours de l'instruction confirmaient sans ambiguïté la pratique habituelle de jeux de hasard dans le restaurant le "Lion de Belfort" et décrivaient les rôles respectifs de Celal Y... et Daniel X... dans l'administration et l'organisation des jeux ; que les prévenus, au cours de l'instruction et de l'audience ne contestaient pas dans l'ensemble les faits qui leur étaient reprochés, même s'ils n'admettaient pas en avoir tiré un grand profit ; qu'il résultait ainsi de l'ensemble des déclarations recueillies que lorsque Celal Y... a financé en 1997 l'acquisition du fonds de commerce le "Lion de Belfort", c'était avec l'intention d'y exploiter une maison de jeux de hasard, qui existait déjà auparavant selon lui, seul moyen de parvenir, toujours selon ses déclarations à l'audience, à une exploitation bénéficiaire ; qu'il avait fait appel au concours de Daniel X..., fonctionnaire de l'Education Nationale en disponibilité, qu'il connaissait comme un joueur professionnel, très respecté dans le milieu des joueurs de cartes, ce que ce dernier ne conteste pas ; que les deux prévenus s'accordaient pour définir leurs rôles respectifs, Daniel X... se chargeant de diriger comme "chef de table" les parties de cartes et de contribuer au bon déroulement de ces jeux (rami-poker et rami-bulle notamment), Celal Y... se réservant la gestion des jeux de hasard (barbu et passe anglaise) ; que les deux prévenus percevaient des droits d'entrée ou des droits de table selon les jeux pratiqués, par joueur et par partie, avant et au cours de chaque partie ("cagnottage") ; que Daniel X... dans son rôle de "chef de table" encaissait ainsi les droits de tables, les sommes jouées, distribuait les jetons et, au terme des parties, les gains des joueurs ; ( ) qu'il ressort de l'analyse proposée par l'administration des douanes et étayée par les pièces du dossier que les gains obtenus depuis l'ouverture de cette maison de jeux de hasard, jusqu'à l'intervention de police du 6 mai 1999 par Celal Y... et Daniel X... peuvent être estimés respectivement à 1.890.000 francs et 543.600 francs (Cf. le jugement p. 7 et 8) ;

"alors que celui qui se borne à diriger une table de cartes au sein d'une maison de jeux de hasard ne participe pas à la tenue de cet établissement ; qu'après avoir constaté que Celal Y... était propriétaire exploitant du Lion de Belfort et organisateur des jeux de hasard pratiqués dans son établissement tandis que Daniel X... se bornait, en sa qualité de joueur à diriger les tables de rami poker, ce dont il résultait qu'il ne participait pas à la gestion dudit établissement, la cour d'appel n'a pu sans se contredire déclarer celui-ci coupable du délit prévu par l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983 modifiée" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Celal Y..., ayant acquis un fonds de commerce de café-bar-restaurant, a organisé dans ces lieux, dès l'origine, des jeux de hasard clandestins et a fait appel à Daniel X..., joueur professionnel, respecté dans le milieu des joueurs de cartes, le premier se réservant la gestion des jeux de dés, le second étant responsable des tables de jeux de cartes ;

Attendu que, pour déclarer Daniel X... coupable de participation à la tenue d'une maison de jeux de hasard, l'arrêt prononce par les motifs propres et adoptés repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que le prévenu, en dirigeant comme "chef de table" les parties de cartes, encaissant les droits de tables et les sommes jouées, distribuant les jetons et, au terme des parties, les gains des joueurs, et en s'assurant ainsi des gains substantiels, participait, en cette qualité de banquier, au sens de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983, modifié par la loi du 16 décembre 1992, à la tenue d'une maison de jeux de hasard, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 124, 146, 149, 150 à 153, 1559, 1560, 1565 annexe IV du Code général des impôts, 1791, 1797, 1799,1799 A, 1804 B et 1822 du Code général des impôts, 375-2, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Daniel X... coupable de défaut de déclaration fiscale d'ouverture d'une maison de jeux, défaut de tenue d'une comptabilité générale et annexe, défaut d'affichage de la cagnotte, défaut de déclaration de recette, défaut de paiement de l'impôt sur les spectacles et jeux de 4ème catégorie et, en conséquence, l'a condamné solidairement avec Celal Y... à payer 6 amendes de 152,45 euros chacune, une somme de 370.999,92 euros tenant lieu de confiscation, une pénalité proportionnelle de 138.795,68 euros et une somme de 138.795,68 euros au titre de la taxe sur les spectacles et jeux de 4ème catégorie ;

"aux motifs propres que Daniel X... ne saurait contester la solidarité au vu des dispositions de l'article 1800 du Code général des impôts qui dispose que la condamnation doit être prononcée solidairement dès lors que les mis en cause ont été intéressés à la fraude ; que tel est le cas en l'espèce, Daniel X... ayant toujours admis qu'il était responsable des jeux de cartes et qu'une partie de ses gains étaient remis à Celal Y... (cf. l'arrêt p. 6) ;

"et aux motifs adoptés que ( ) les deux prévenus s'accordent pour définir leurs rôles respectifs, Daniel X... se chargeant de diriger comme " chef de table " les parties de cartes et de contribuer au bon déroulement de ces jeux, Celal Y... se réservant la gestion des jeux de dés ; qu'il ressort de l'analyse proposée par l'administration des douanes et étayée par les pièces du dossier que les gains obtenus depuis l'ouverture de cette maison de jeux de hasard, jusqu'à l'intervention de police du 6 mai 1999 par Celal Y... et Daniel X... peuvent être estimés respectivement à 1.890.000 francs et 543.600 francs (cf. le jugement p. 7 et 8) ;

"alors qu'une condamnation solidaire ne peut être prononcée à l'égard de plusieurs personnes que pour un même délit ou des délits connexes ; qu'ayant constaté que Celal Y... s'était réservé la direction des jeux de dés tandis que Daniel X... veillait seulement au bon déroulement des parties de cartes auxquelles il participait, la cour d'appel, qui n'a relevé aucun lien de connexité entre ces diverses infractions, ne pouvait pas prononcer à l'encontre Daniel X... la solidarité prévue par l'article 1797 du Code général des impôts à raison non seulement des infractions liées à la table de jeux de cartes qu'il dirigeait mais aussi des infractions résultant de l'organisation de jeux de dés par Celal Y..." ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, sur l'action fiscale, Celal Y... et Daniel X... ont été déclarés coupables de défaut de déclaration fiscale d'ouverture d'une maison de jeux, de défaut de tenue d'une comptabilité générale et d'une comptabilité annexe, de défaut d'affichage de la cagnotte, de défaut de déclaration de recette et de défaut de paiement de l'impôt sur les spectacles et jeux de 4ème catégorie et ont été condamnés solidairement à payer six amendes de 152,45 euros chacune, une somme de 370 999,82 euros tenant lieu de confiscation, une pénalité proportionnelle de 138 795,68 euros et une somme de 138 795,68 euros au titre de la taxe sur les spectacles et jeux de 4ème catégorie ;

Attendu que, pour prononcer la solidarité des deux prévenus pour l'ensemble des condamnations pécuniaires, seule contestée par le demandeur, les juges du second degré retiennent que Daniel X... était intéressé à la fraude, ayant toujours admis qu'il était responsable des jeux de cartes et qu'une partie des ses gains étaient remis à Celal Y... ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que les deux prévenus, en commettant les infractions fiscales au sein de la même maison de jeux non déclarée, ont participé à la même fraude, peu important qu'ils se soient répartis l'organisation des jeux de hasard pratiqués, la cour d'appel a fait une exacte application de l'article 1797, alinéa 2, du Code général des impôts ;

Que le moyen ne saurait donc être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme de la Lance conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-85767
Date de la décision : 20/10/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° JEUX DE HASARD - Maison de jeux - Infraction à la réglementation - Impôts et taxes - Spectacles - jeux et divertissements - Participation à la tenue d'une maison de jeux - Eléments constitutifs.

IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Dispositions spécifiques à certaines marchandises ou prestations - Spectacles - jeux et divertissements - Participation à la tenue d'une maison de jeux - Eléments constitutifs.

1° Participe, en qualité de banquier, à la tenue d'une maison de jeux de hasard, au sens de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983, modifié par la loi du 16 décembre 1992, celui qui dirige comme " chef de table " des parties de cartes, encaissant les droits de table et les sommes jouées, distribuant les jetons et, au terme des parties, les gains des joueurs, s'assurant ainsi des gains substantiels.

2° IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Dispositions spécifiques à certaines marchandises ou prestations - Spectacles - jeux et divertissements - Impôt sur les cercles et maisons de jeux - Pénalités et peines - Condamnations pécuniaires - Solidarité - Prononcé - Cas.

2° Fait une exacte application de l'article 1797, alinéa 2, du Code général des impôts, la cour d'appel qui prononce la solidarité de deux prévenus pour l'ensemble des condamnations pécuniaires intervenues du chef des infractions à la réglementation fiscale sur les cercles et maisons de jeux retenues à leur encontre, dès lors que ceux-ci, en commettant ces infractions au sein de la même maison de jeux non déclarée, ont participé à la même fraude, peu important qu'ils se soient réparti l'organisation des jeux de hasard pratiqués.


Références :

2° :
1° :
Code général des impôts 1797 al. 2
Loi 83-628 du 12 juillet 1983 art. 1
Loi 92-1336 du 16 décembre 1992

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 11 avril 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 oct. 2004, pourvoi n°03-85767, Bull. crim. criminel 2004 N° 250 p. 939
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 250 p. 939

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Davenas.
Rapporteur ?: Mme de la Lance.
Avocat(s) : Me Cossa, Me Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.85767
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