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20/10/2004 | FRANCE | N°01-02845

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 20 octobre 2004, 01-02845


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 octobre 2000) que le Crédit du nord (la banque) a fait inscrire, le 22 mars 1990, une hypothèque judiciaire provisoire en garantie d'une créance évaluée à 300 000 francs, sur un immeuble appartement à Mme X..., caution, avec les époux Y..., de la société VLF micrographique, à hauteur de la somme de 200 000 francs, en principal, outre les intérêts au titre d'un cautionnement du 28 mai 1985 ; que, le 4 octobre 1990,

M. Z..., notaire, a reçu l'acte de vente du bien grevé et s'est libéré du p...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 octobre 2000) que le Crédit du nord (la banque) a fait inscrire, le 22 mars 1990, une hypothèque judiciaire provisoire en garantie d'une créance évaluée à 300 000 francs, sur un immeuble appartement à Mme X..., caution, avec les époux Y..., de la société VLF micrographique, à hauteur de la somme de 200 000 francs, en principal, outre les intérêts au titre d'un cautionnement du 28 mai 1985 ; que, le 4 octobre 1990, M. Z..., notaire, a reçu l'acte de vente du bien grevé et s'est libéré du prix entre les mains du vendeur ; que la vente a été publiée le 23 octobre 1990 ;

que, le 19 novembre 1990, le conservateur des hypothèques a rejeté l'inscription provisoire sollicitée sur la totalité de l'immeuble déclaré comme étant la propriété exclusive de Mme X... alors qu'elle ne détenait sur cet immeuble que des droits indivis ; que la formalité a été définitivement réalisée le 29 novembre 1990 ; que par jugement du 7 septembre 1992, la créance du débiteur principal a été fixée à la somme de 303 263,18 francs et que la caution a été condamnée à payer la somme principale de 200 000 francs augmentée des intérêts conventionnels échus depuis le 18 janvier 1989, la somme de 79 022,83 francs réclamée au titre d'un second cautionnement du 30 juin 1987, ayant fait l'objet d'une mesure d'expertise qui n'a jamais été diligentée ; que la banque a assigné la société civile professionnelle de notaires Llosa Vallet et M. Z... en responsabilité, pour avoir vendu l'immeuble grevé d'une inscription d'hypothèque judiciaire et s'être dessaisi du prix entre les mains des vendeurs ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable, après avis de la Deuxième chambre civile sur les troisième et quatrième branches :

Attendu que la SCP Llosa Vallet et M. Z... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés au paiement d'une indemnité, alors, selon le moyen :

1 / que la responsabilité du notaire exige pour être engagée que soit caractérisée l'existence d'un lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice invoqué ; qu'en l'espèce, si l'inscription provisoire ou à tout le moins l'inscription définitive n'avaient pas été valablement effectuées par le créancier, l'inscription d'hypothèque n'aurait pu prendre rang antérieurement à la vente et, partant, le notaire n'aurait pu débloquer les fonds à son profit même s'il les avait consignées, ce qui aurait privé le préjudice de tout lien de causalité avec une quelconque faute du notaire ;

qu'en décidant, néanmoins, pour condamner la SCP Llosa Vallet et M. Z... à réparation que, d'une part "si les notaires intervenants avaient levé un état hypothécaire lors de la vente, l'inscription d'hypothèque provisoire initiale aurait figuré sur l'état et aurait été prise en considération" et que, d'autre part, le débat relatif à la validité de l'inscription définitive étant sans portée, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

2 / que l'inscription hypothécaire ne peut faire l'objet d'une régularisation lui permettant de prendre rang à la date du dépôt initial quand est en cause la nature des droits conférés ; qu'en l'espèce, l'inscription hypothécaire initiale portait sur la totalité du bien détenu en pleine propriété et la nouvelle inscription portait sur la quote-part indivise de sorte que cette dernière qui se distinguait par ses effets ne pouvait constituer une simple régularisation ; qu'en relevant, néanmoins, pour condamner les notaires à réparation, que la régularisation intervenue avait eu pour effet de lui faire prendre rang à la date du dépôt initial, la cour d'appel a violé l'article 2148 du Code civil par fausse application ;

3 / qu'une décision ne passe en force de chose jugée à l'égard d'une partie que lorsqu'elle n'est plus susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution ; que tel n'est pas le cas lorsque cette partie dispose de la faculté de former un appel incident ou provoqué ; qu'en l'espèce, le jugement n'ayant été signifié aux époux Y... que le 4 novembre 1992, il n'est passé en force de chose jugée à l'égard de Mme X..., qui disposait toujours de la faculté de former un appel incident, que le 4 décembre 1992 ; qu'en décidant néanmoins par motifs adoptés, pour condamner les notaires à réparation, que le jugement était définitif à son égard le 14 novembre 1992, la cour d'appel a violé les articles 500 et 550 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que l'inscription définitive, pour être valable, ne peut être effectuée que dans le délai de deux mois après que la décision ayant statué sur la créance qui sert de fondement à l'inscription ait acquis force de chose jugée ; qu'en l'espèce, l'inscription définitive a été effectuée le 2 décembre 1992, soit antérieurement à la date à laquelle le jugement est passé en force de chose jugée ; qu'en décidant néanmoins, par motifs adoptés, et pour condamner les notaires à réparation, que l'inscription d'hypothèque définitive était valable, la cour d'appel a violé l'article 263 du décret du 31 juillet 1992 ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant retenu que la régularisation dans les délais de la formalité laissée en attente avait eu pour conséquence de lui faire prendre effet à la date du 22 mars 1990 et que le notaire avait libéré la totalité du prix de la vente réalisée le 4 octobre 1990 au lieu de retenir la somme de 300 000 francs, objet de l'inscription d'hypothèque provisoire du 22 mars 1990, sans avoir obtenu préalablement la délivrance d'un état de formalité qui aurait révélé l'inscription provisoire, la cour d'appel a pu en déduire que M. Z... avait commis une faute professionnelle génératrice d'un préjudice pour le créancier ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que le jugement de condamnation du 7 septembre 1992 avait été signifié à Mme X... le 14 octobre 1992, de sorte qu'en l'absence d'exercice de recours, il avait force de chose jugée à son encontre le 14 novembre 1992, date d'expiration du délai d'appel, peu important les dates de signification de cette décision aux autres parties et que l'inscription définitive avait été prise le 2 décembre 1992, soit dans les délais de la loi, la cour d'appel en a exactement déduit que l'inscription d'hypothèque définitive était valable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :

Vu les articles 210 et 260 du décret du 31 juillet 1992, ensemble l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que pour limiter la condamnation du notaire à la somme de 230 977,17 francs l'arrêt retient qu'à la lecture des bordereaux d'hypothèque, il ressortait que l'hypothèque provisoire n'avait pas été renouvelée pour garantir la seconde partie de la créance encore en litige et que ses effets, de ce chef, avaient expiré le 22 mars 1993 en sorte que l'inscription définitive du 16 novembre 1994 n'avait pu la conforter et que n'ayant pris effet qu'à cette date, le notaire n'aurait pas pu retenir les fonds correspondants au-delà du 22 mars 1993 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire avait été prise à hauteur de 300 000 francs et que l'hypothèque définitive avait été inscrite en principal et intérêts pour la somme de 326 694,44 francs, au titre du cautionnement donné à hauteur de 200 000 francs, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a arrêté à la somme de 230 977,17 francs le montant des intérêts conservés par l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, l'arrêt rendu le 19 octobre 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne, ensemble, M. Z... et la société civile professionnelle Llosa Vallet aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... et de la société civile professionnelle Llosa Vallet ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 01-02845
Date de la décision : 20/10/2004
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre civile, section B), 19 octobre 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 20 oct. 2004, pourvoi n°01-02845


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:01.02845
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