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05/10/2004 | FRANCE | N°02-41780

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 octobre 2004, 02-41780


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 janvier 2002) et les pièces de la procédure, que Mme X..., salariée de la société Air France au sein de laquelle elle occupait en dernier lieu un emploi de chef de cabine, a été déclarée inapte définitivement à ses fonctions dans le personnel navigant de la compagnie à la suite d'un accident du travail, par décision du conseil médical de l'aéronautique civile du 28 juillet 1994 ; qu'il a été mis fin Ã

  son contrat de travail en conséquence de cette décision à compter du 27 juillet 1994...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 janvier 2002) et les pièces de la procédure, que Mme X..., salariée de la société Air France au sein de laquelle elle occupait en dernier lieu un emploi de chef de cabine, a été déclarée inapte définitivement à ses fonctions dans le personnel navigant de la compagnie à la suite d'un accident du travail, par décision du conseil médical de l'aéronautique civile du 28 juillet 1994 ; qu'il a été mis fin à son contrat de travail en conséquence de cette décision à compter du 27 juillet 1994, alors qu'elle était dans sa cinquante et unième année ; que l'employeur, estimant lui avoir servi à tort l'allocation spéciale de départ à cinquante ans prévue par le règlement du personnel navigant commercial de l'entreprise, lui a réclamé le remboursement des sommes versées à ce titre puis, s'étant heurté au refus de l'intéressée, a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société Air France fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant au remboursement de la somme correspondant au montant de l'allocation spéciale de départ à cinquante ans et de l'avoir condamnée à verser à Mme X... des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par son action, alors, selon le moyen :

1 / que la réglementation du personnel navigant commercial (RPNC) de la société Air France, partie intégrante du statut de l'entreprise constituant un acte administratif réglementaire, dispose en son article 57 que l'âge normal de la cessation définitive d'activité du personnel navigant commercial est fixé à 55 ans mais que ce personnel a la possibilité de faire valoir ses droits à la retraite dès son 50e anniversaire ; que cette RPNC comporte en page 94 une note complémentaire relative à "l'allocation de départ à le retraite" dont le bénéfice est subordonné dans le "cas général" à des conditions d'âge et de droits à la jouissance d'une pension de retraite qui sont celles-là même auxquelles l'article 57 subordonne la possibilité de faire valoir ses droits à la retraite entre 50 et 55 ans, mais est également étendu dans des "cas particuliers" à d'autres agents, dont, sous d'autres conditions, ceux qui sont contraints de cesser leur activité par suite d'une inaptitude définitive ; que la RPNC comporte encore en page 93 une note complémentaire relative à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" dont le bénéfice est subordonné à la double condition que l'agent cesse toute activité au cours de sa 51e année et ait droit à la jouissance d'une pension de retraite, aucun cas particulier d'extension de cette allocation n'étant prévu ; que du rapprochement de ces trois textes, il résulte que la seule différence entre les conditions du "cas général" d'octroi de "l'allocation de départ à la retraite" et celles de l'octroi de "l'allocation de départ à 50 ans" tient à ce que la première est versée aux agents qui, en application de l'article 57 de la RPNC, soit partant à la retraite à l'âge normal de 55 ans, soit usant du droit de demander à le faire entre 50 et 55 ans, tandis que la seconde est versée à ceux qui, parmi ces derniers, usent de ce droit au cours de leur 51e année, l'allocation spéciale étant précisément destinée à les inciter à user de ce droit dès qu'ils en ont la possibilité, c'est-à-dire dès qu'ils ont atteint l'âge de 50 ans ; qu'ainsi, le bénéfice de "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" est, comme celui de "l'allocation de départ à la retraite" dans le "cas général", subordonné aux conditions d'application de l'article 57, dont il n'est pas contesté qu'elles n'étaient pas remplies par Mme X..., dont le contrat de travail avait fait l'objet d'une rupture de plein droit en application de l'article 523 de la RPNC par suite de la perte de sa licence survenue après l'âge de 50 ans et qui n'avait donc pas usé du droit ouvert par l'article 57 de demander sa mise anticipée à la retraite ;

qu'en jugeant au contraire que la note complémentaire relative à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" ne fait aucune référence à l'article 57 et que le droit à cette "allocation spéciale" n'est pas subordonné à une demande de mise à la retraite, la cour d'appel a méconnu la portée des différentes dispositions statutaires en cause, faute de les avoir rapprochées, et a ainsi violé par fausse interprétation celles de la note complémentaire relative à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" figurant en page 93 de la RPNC ;

2 / que l'article 523 de la RPNC dispose que lorsque la perte de licence intervient après 50 ans, âge d'ouverture du droit à la retraite, elle entraîne la rupture du contrat de travail ; que ce texte n'ouvre par lui-même aucun droit ni à "l'allocation de départ à le retraite" ni à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" ; que si cette dernière est versée, sous certaines conditions, aux agents tombant comme Mme X... sous le coup de l'article 523 de la RPNC, c'est uniquement en vertu des dispositions des "cas particuliers" prévus par la note complémentaire relative à cette "allocation spéciale de départ à 50 ans" qui en étendent le bénéfice à certaines catégories d'agents ne remplissant pas les conditions de l'article 57 de la RPNC ; que ces "cas particuliers" ne sont cependant pas repris par la note complémentaire relative à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" ; que, dès lors, en retenant que l'article 523 ne prive le salarié concerné par ce texte ni de "l'allocation de départ à la retraite" ni de "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" et que le droit de la salariée au bénéfice de la première n'était pas contesté, la cour d'appel s'est déterminée par des considérations inopérantes qui privent sa décision de base légale au regard des dispositions de la note complémentaire relative à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" figurant en page 93 de la RPNC, ensemble celles de la note complémentaire relative à "l'allocation de départ à la retraite" figurant en page 94 de le RPNC et celles de l'article 523 de la RPNC ;

3 / qu'il résulte clairement des dispositions de la RPNC que la perte de licence entraîne ipso facto la cessation de service du personnel navigant commercial et que si elle intervient après le 50e anniversaire de l'intéressé elle emporte également de plein droit rupture du contrat de travail (article 523), ce qui exclut toute possibilité de reclassement au sol, lequel n'est possible que si la perte de licence intervient avant le 50e anniversaire de l'agent (article 522), hypothèse dans laquelle celui-ci ne peut en aucun cas, en raison même de son âge, avoir droit à "l'allocation de départ à 50 ans" ; que, dès lors, en se fondant sur la considération que l'application de la disposition relative à cette allocation spéciale à un navigant commercial qui s'est vu retirer sa licence ne priverait celle-ci de tout effet inactif puisqu'elle serait de nature à dissuader le salarié de demander un reclassement au sol, alors qu'il s'agit d'une hypothèse radicalement impossible, la cour d'appel a violé les 522 et 523 de la RPNC, ensemble la note complémentaire relative à "l'allocation spéciale de départ à 50 ans" figurant en page 93 de la RPNC ;

Mais attendu qu'il résulte des articles 5, 521, 523 et 57 de la réglementation du personnel navigant commercial de la société Air France que l'âge de cessation définitive d'activité de ce personnel est fixé à cinquante-cinq ans et que l'inaptitude définitive au vol prononcée par le conseil médical de l'aéronautique civile, qui entraîne la rupture du contrat de navigant et la perte de la licence, entraîne également la rupture du contrat de travail lorsqu'elle intervient après l'âge de cinquante ans, âge d'ouverture du droit à la retraite ; que selon le point 1 de la note complémentaire ayant pour objet l'allocation spéciale de départ à cinquante ans, ladite allocation est versée au personnel navigant commercial cessant toute activité à la compagnie durant sa cinquantième année et ayant droit à la jouissance d'une pension de retraite de la caisse de retraite du personnel navigant professionnel (CRPNP) ; qu'enfin, en vertu du point 12 de la note complémentaire ayant pour objet l'allocation de départ à la retraite, le bénéfice de celle-ci est accordé aux personnels navigants qui, avant d'avoir atteint la limite d'âge, sont contraints de cesser leur activité à la compagnie par suite d'une invalidité, reconnue par le conseil médical de l'aéronautique civile comme entraînant une inaptitude définitive à l'exercice de la profession, à la double condition qu'ils ne soient pas reclassés au sol et qu'ils aient droit à la jouissance immédiate d'une pension de la CRPNP, laquelle est accordée si l'invalidité est consécutive à un accident du travail ou à une maladie imputable au service ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la rupture du contrat de travail d'un personnel navigant commercial de la société Air France durant sa cinquante et unième année, consécutive à son inaptitude définitive au vol imputable à un accident du travail ou une maladie en rapport avec le service est une cessation d'activité qui ouvre droit à la jouissance d'une pension de retraite et entraîne le bénéfice de l'allocation spéciale de départ à cinquante ans ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la salariée avait cessé toute activité à la société Air France et qu'il avait été mis fin à son contrat de travail au cours de sa cinquante et unième année, à la suite de la déclaration, par le conseil médical de l'aéronautique civile, de son inaptitude définitive à ses fonctions, dont elle a fait ressortir qu'elle était imputable à un accident du travail, a pu décider que l'allocation spéciale de départ à cinquante lui avait été versée à juste titre par l'employeur et, par voie de conséquence, que ce dernier n'était pas fondé à en réclamer la répétition ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Air France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Air France à verser à Mme X... la somme de 2 300 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02-41780
Date de la décision : 05/10/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (21e chambre B), 17 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 oct. 2004, pourvoi n°02-41780


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CHAGNY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.41780
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