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28/09/2004 | FRANCE | N°04-81369

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 septembre 2004, 04-81369


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... François,

- LA SA X... PRINTEMPS REDOUTE, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, en date du 18 février 2004, qui, après rel

axe de Serge Y... et Renaud Z... du chef de diffamation publique envers un particulier, a pro...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... François,

- LA SA X... PRINTEMPS REDOUTE, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, en date du 18 février 2004, qui, après relaxe de Serge Y... et Renaud Z... du chef de diffamation publique envers un particulier, a prononcé sur l'action civile ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 23, 29, alinéa 1, 32, alinéa 1, et 35 bis de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a reconnu le bénéfice de la bonne foi aux prévenus et a rejeté en conséquence les demandes des parties civiles du chef de diffamation ;

"aux motifs que, sur le seul appel des parties du jugement de relaxe, la Cour n'est saisie que de l'action civile ; qu'il convient donc d'examiner si Serge Y... et Renaud Z... ont commis une faute sur le fondement de la poursuite ouvrant droit à réparation au profit de la partie civile ; qu'à travers les propos incriminés, il est imputé en premier lieu aux parties civiles d'avoir offert un avantage personnel au directeur de la caisse des dépôts et consignations (CDC), sa nomination au conseil de surveillance de la société X... Printemps Redoute, afin que cet établissement public renonce à apporter ses parts lors de l'OPA lancée par François X... pour racheter les actions de la société commerciale de l'Ouest Africain qu'il n'avait pas encore acquises, permettant ainsi à la société X... Printemps Redoute de rester au-dessous du seuil de 95 % du capital social de la SCOA ; que les faits qui leur sont ainsi imputés sont susceptibles de recevoir la qualification pénale de corruption ; qu'en second lieu, il est allégué que François X... et la société X... Printemps Redoute ont obtenu une dérogation, à titre exceptionnel, de la part du conseil des bourses de valeur (CBV) leur permettant d'éviter que les échanges de titre effectués lors de l'OPA soient répertoriés et, partant, que soit révélé la renonciation de la CDC à apporter ses titres, alors que le président du CBV, M. de la A..., également vice-président de la banque de François X..., est lui-même devenu ensuite président du conseil de surveillance de la société X... Printemps Redoute ;

considérant que, comme l'a retenu à bon droit le tribunal et contrairement à ce qui est soutenu par la défense, de telles imputations de corruption et de collusion, même formulées par voie d'insinuation, sont attentatoires à la réputation des parties civiles ;

"que les premiers juges, par des motifs pertinents que la Cour a fait siens, a procédé à une exacte analyse des documents de la cause et des documents versés aux débats par la défense, en accordant à Serge Y... et Renaud Z... le bénéfice de la bonne foi ; qu'en effet, la note du groupe Indosuez du 31 octobre 1996, signée Christophe B..., sur laquelle le journaliste s'est notamment appuyé, indique bien que la CDC est actionnaire de la SCOA à hauteur de 4,37 % et fait ressortir l'intérêt s'attachant à ce que la SCOA puisse conserver un statut de tête de groupe fiscal qu'elle perdrait si la CFAO venait détenir plus de 95 % du capital de la SCOA ; que Renaud Z... était fondé à invoquer les informations précises et apparemment étayées contenues dans cette note, même si leur fiabilité a été remise en cause ensuite, plusieurs mois après la publication de l'article litigieux, dans un écrit de M. C... datant du 24 avril 2001 ; que l'intérêt de la conservation par la SCOA de son statut de tête de groupe fiscal et l'importance à cet égard du seuil de 95 % de possession du capital sont également évoquées dans la note confidentielle du groupe X... Printemps Redoute du 18 décembre 1996 émanant de M. D... ; que la note de la société des Bourses Françaises du 10 avril 1996 relative à l'OPA sur des actions de la SCOA indique que les opérations de règlement/livraison des négociations s'effectueront hors filière bourse Relit par dérogation exceptionnelle et entre les sociétés de bourses vendeurs et la société de bourses acheteurs CCF ; qu'il n'est pas autrement contesté que M. Philippe E..., directeur de la CDC, et M. de la A..., président du CBV, sont respectivement devenus membres du conseil de surveillance de la société X... Printemps Redoute et président de ce même conseil de surveillance ; qu'ainsi, les éléments dont disposait Renaud Z... lui permettaient, dans le but légitime d'informer le public des opérations menées par un groupe financier particulièrement connu, de donner connaissance aux lecteurs des faits évoqués dans les propos incriminés, et de mettre ces faits en relation en leur donnant une interprétation exprimée prudemment sous forme d'interrogation et sans aucune animosité à l'égard des intéressés ; qu'il ne peut enfin être reproché au journaliste d'un quotidien ne relevant pas de la presse spécialisée en matière économique et financière de ne pas avoir procédé à une vérification plus approfondie de la pertinence des informations en sa possession, provenant de professionnels du monde des affaires ; qu'en conséquence, en l'absence de faute commise par le directeur de publication et le journaliste sur le fondement de la poursuite, le jugement sera confirmé sur l'action civile et les parties civiles déboutées de leurs prétentions (arrêt, pages 6 à 8) ;

"1 ) alors que, d'une part, la source essentielle des renseignements exploités par le journaliste provenant d'une partie civile vindicative dans le cadre d'une instruction en cours, l'enquête préalable du journaliste ne saurait être sérieuse à défaut pour lui d'avoir confronté les thèses en présence et vérifié le point de fait erroné sur lequel repose toute la construction de son article ; qu'en se bornant à relever que l'erreur ici commise a été établie de manière patente après la publication de l'article sans autrement rechercher si le journaliste pouvait éviter pareille erreur dans le cadre d'une vérification élémentaire et contradictoire, la Cour n'a pu légalement retenir le fait justificatif de bonne foi, lequel ne peut, en aucun cas, être déduit d'éléments postérieurs à la diffamation publiée ;

"2 ) alors que, d'autre part, le sérieux de l'enquête journalistique préalable a lieu d'être apprécié de manière identique dans le cadre de la presse spécialisée et dans le cadre d'un article spécialisé publié dans un journal d'information générale ; qu'il en va de plus fort ainsi quand l'information litigieuse tend à suggérer, sur la foi d'indications inexactes et d'ailleurs partisanes, l'éventuelle implication de tiers dans des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale ; que la Cour, en l'espèce, n'a pu légalement affirmer que l'enquête du journaliste pouvait être moins approfondie pour un motif pris de la nature du journal dont s'agit et non pas de celle de l'article litigieux" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, abstraction faite de motifs surabondants, a, sans insuffisance ni contradiction, exposé les circonstances particulières invoquées par les prévenus et énoncé les faits sur lesquels elle s'est fondée pour justifier l'admission à leur profit du bénéfice de la bonne foi ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Chanet conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-81369
Date de la décision : 28/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11ème chambre, 18 février 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 sep. 2004, pourvoi n°04-81369


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.81369
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