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28/09/2004 | FRANCE | N°03-86802

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 septembre 2004, 03-86802


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de Me BALAT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bruno,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAPEETE, chambre correctionnelle, en date du 16 octobre 2003, qui a déclaré irrecevable son opposition à l'exécution de l'ordo

nnance pénale, en date du 8 octobre 2001, qui, pour excès de vitesse, l'a condamné à 25...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de Me BALAT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bruno,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAPEETE, chambre correctionnelle, en date du 16 octobre 2003, qui a déclaré irrecevable son opposition à l'exécution de l'ordonnance pénale, en date du 8 octobre 2001, qui, pour excès de vitesse, l'a condamné à 25 000 francs Pacifique d'amende et à 45 jours de suspension du permis de conduire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 527, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du principe du droit au procès équitable, et des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'opposition formée par Bruno X... à l'encontre de l'ordonnance pénale, en date du 8 octobre 2001, le condamnant à une amende de 25 000 FCP et à une suspension de permis de conduire pour une durée de 45 jours pour excès de vitesse ;

"aux motifs qu'en application de l'article 527 du Code de procédure pénale, "l'ordonnance pénale est notifiée au prévenu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception... Ie prévenu peut, dans un délai de 30 jours à compter de la date d'envoi de la lettre, former opposition à l'exécution de l'ordonnance... toutefois, s'il ne résulte pas de l'avis de réception que le prévenu a reçu la lettre de notification, l'opposition reste recevable jusqu'à l'expiration d'un délai de 30 jours qui court de la date à laquelle l'intéressé a eu connaissance, d'une part, de la condamnation, soit par un acte d'exécution, soit par tout autre moyen, d'autre part, du délai et des formes de l'opposition qui lui est ouverte" ; qu'il ressort des dispositions de cet article que la notification par lettre recommandée avec demande d'avis de réception n'est pas une condition de forme prévue à peine de nullité ; qu'en Polynésie française, où le courrier est distribué par l'intermédiaire de boîtes postales et non à l'adresse géographique de l'intéressé comme cela est le cas en métropole, la notification par les agents de police municipale est le meilleur moyen de porter à la connaissance d'un intéressé une décision de justice ; que cette forme de notification peut être assimilée dans son principe à la lettre recommandée dans la mesure où le juge, plutôt que de confier son courrier à un facteur qui le porterait dans des conditions parfois difficiles si ce n'est impossibles à la connaissance de l'intéressé, choisit de faire porter ce même courrier et dans les mêmes délais à la connaissance de l'intéressé par l'intermédiaire d'un agent de police ; que dès lors, les deux formes de notification étant comparables dans leur principe, il y a lieu de considérer que le délai pour faire opposition court à compter de la date à laquelle le tribunal a transmis le courrier à l'agent de police municipale ;

qu'en l'espèce, ainsi que l'a constaté le premier juge par des motifs que la Cour adopte, le courrier dont il n'est pas contesté qu'il est parti le 12 octobre du palais de justice, a été porté à la connaissance de Bruno X... le 17 octobre, soit cinq jours plus tard ; qu'il restait alors 25 jours à Bruno X... pour former son opposition dans les délais prévus par la loi, ce qu'il n'a pas fait puisque l'opposition a été reçue le 15 novembre ; qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a déclaré l'opposition de Bruno X... irrecevable et en ce qu'elle a confirmé les termes de l'ordonnance pénale ;

"alors, d'une part, que, si l'ordonnance pénale n'est pas notifiée au prévenu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ce dernier est recevable à former opposition à son encontre jusqu'à l'expiration d'un délai de trente jours commençant à courir au plus tôt à compter de la date où il en a eu connaissance ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que l'ordonnance pénale du 8 octobre 2001 n'a pas été notifiée à Bruno X... par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, mais qu'elle a été portée à sa connaissance le 17 octobre suivant lorsqu'elle lui a été remise par un agent de la police municipale de Punaauia ; que, dans ces conditions, l'opposition formée par Bruno X... le 15 novembre 2001 contre l'ordonnance pénale du 8 octobre 2001, soit moins de trente jours à compter de la date à laquelle ladite ordonnance avait été portée à sa connaissance, était recevable, et qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 527 du Code de procédure pénale ;

"alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, aucun délai ne peut courir si la partie à qui on l'oppose n'a pas été en mesure de connaître le point de départ de ce délai ; que, par suite, même si comme l'ont estimé les juges du fond le fait que l'ordonnance pénale du 8 octobre 2001 n'ait pas été notifiée à Bruno X... par lettre recommandée avec demande d'avis de réception mais qu'elle lui ait été remise par un agent de la police municipale n'était pas de nature à modifier le point de départ du délai de trente jours pour former opposition, qui demeurait le jour de l'envoi à la police municipale de Punaauia par le tribunal de la lettre de notification destinée à Bruno X..., les juges du fond ne pouvaient déclarer l'opposition formée par ce dernier le 15 novembre 2001 irrecevable au seul motif qu'il n'était pas contesté que le courrier de notification adressé à la police municipale de Punaauia était parti du palais de justice le 12 octobre précédent, sans constater que cette information avait été portée à la connaissance de Bruno X... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a donc pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés ;

"et alors, enfin, que, dans tous les cas, aucun délai ne peut courir à l'encontre d'une partie sans que celle-ci en soit informée ; que dès lors, les dispositions de l'article 527, alinéa 3, du Code de procédure pénale, prévoyant que le délai de l'opposition commence à courir à compter de la date d'envoi au prévenu de la lettre de notification de l'ordonnance pénale, et ayant ainsi pour effet de faire courir ledit délai à l'insu du prévenu, ne serait-ce que pour la période comprise entre la date d'envoi de la lettre de notification et la date de sa réception, méconnaissent les dispositions de l'article 6 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'où procède notamment le principe susvisé ; qu'en faisant ainsi application d'un texte incompatible avec les dispositions conventionnelles sus-rappelées, la cour d'appel a donc exposé sa décision à une censure inéluctable" ;

Vu l'article 527 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de l'article 527 du Code de procédure pénale que le prévenu auquel l'ordonnance pénale n'a pas été notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception peut former opposition dans un délai de trente jours à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de la condamnation, soit par un acte d'exécution, soit par tout autre moyen ;

Attendu qu'après avoir relevé que l'ordonnance pénale a été portée à la connaissance de Bruno X... le 17 octobre 2001, par un agent de la police municipale, l'arrêt, pour déclarer irrecevable l'opposition reçue le 15 novembre 2001, retient qu'elle a été formée après l'expiration d'un délai de trente jours suivant le 12 octobre 2001, date à laquelle "le tribunal a transmis le courrier à l'agent de police municipale" ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'ordonnance pénale n'a pas été notifiée au prévenu par lettre recommandée et que celui-ci a formé opposition moins de trente jours après qu'il a eu connaissance de la condamnation, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Papeete, en date du 16 octobre 2003 ;

Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Papeete, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Pometan conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-86802
Date de la décision : 28/09/2004
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONTRAVENTION - Ordonnance pénale - Opposition - Délai - Point de départ.

TRIBUNAL DE POLICE - Ordonnance pénale - Opposition - Délai - Point de départ

Aux termes de l'article 527 du Code de procédure pénale, le prévenu peut former opposition à l'exécution d'une ordonnance pénale dans un délai de trente jours à compter de l'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception par laquelle cette décision lui est notifiée ; si aucune lettre recommandée n'a été envoyée, l'opposition reste recevable jusqu'à l'expiration du même délai qui court de la date à laquelle l'intéressé a eu connaissance de la condamnation, soit par un acte d'exécution, soit par tout autre moyen. Encourt la cassation l'arrêt qui, alors que la notification prévue par le texte précité a été faite par un agent de la police municipale, fixe le point de départ du délai pour former opposition, non à la date à laquelle le prévenu a eu connaissance de l'ordonnance, mais à celle à laquelle a été envoyé à l'agent le courrier portant transmission de la décision.


Références :

Code de procédure pénale 527

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 16 octobre 2003

A rapprocher : Chambre criminelle, 1994-04-27, Bulletin criminel, n° 153, p. 349 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 sep. 2004, pourvoi n°03-86802, Bull. crim. criminel 2004 N° 222 p. 792
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 222 p. 792

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Mouton.
Rapporteur ?: M. Pometan.
Avocat(s) : Me Balat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.86802
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