AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que par jugement du 16 novembre 2000, un tribunal d'instance a condamné M. et Mme X... à payer à Mme Y... une certaine somme, en deniers ou quittances, à titre de rappel de loyers, et a condamné Mme Y... à restituer à M. et Mme X..., en deniers ou quittances, le montant de leur dépôt de garantie, avec intérêts au taux légal à compter d'une certaine date ; que sur le fondement de cette décision, Mme Y... a fait délivrer à M. et Mme X... un commandement aux fins de saisie-vente ; que M. X... a interjeté appel du jugement d'un juge de l'exécution qui l'avait débouté de sa demande d'annulation de ce commandement ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la créance, détenue par Mme Y... sur M. X... en vertu du jugement du 16 novembre 2000, s'était trouvée éteinte par le règlement de la somme de 747,49 euros et, en conséquence, déclaré nul le commandement, alors, selon le moyen, qu'il n'appartient pas à la cour d'appel, investie des pouvoirs du juge de l'exécution, de remettre en cause le titre exécutoire servant de fondement aux poursuites ; qu'en l'espèce, le titre fondant le commandement aux fins de saisie-vente délivré à M. X... à l'initiative de Mme Y... pour un montant global de 9 176,36 francs condamnait les preneurs au versement de la somme, en deniers ou quittances, de 16 075,66 francs à titre de rappel sur indexation des loyers dus sur la période du 1er février 1995 au 30 novembre 1998 et condamnait la bailleresse à restitution du dépôt de garantie, soit la somme de 3 400 francs en deniers ou quittances, outre les intérêts légaux à compter du 1er février 1999 ; qu'en accueillant l'argumentation de M. X... selon laquelle la créance de Mme Y... s'était trouvée éteinte par le règlement, le 9 avril 2001, de la seule somme de 4 905,18 francs (747,79 euros), la cour d'appel a modifié le jugement du 16 novembre
2000 qui avait implicitement mais nécessairement considéré, en ne procédant à aucune condamnation du chef des charges locatives, que les provisions acquittées mensuellement par les preneurs à hauteur de 260 francs avaient couvert, sans nullement l'excéder, le montant global des charges réellement avancé par la bailleresse ; que dès lors, en accueillant la contestation soulevée par M. X... sur le quantum des charges, la cour d'appel a violé l'article L. 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions que Mme Y... ait soutenu devant la cour d'appel que le jugement du 16 novembre 2000 avait implicitement mais nécessairement considéré que les provisions acquittées mensuellement par les preneurs avaient couvert le montant global des charges avancé par la bailleresse ; que le moyen est donc nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article L. 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire ;
Attendu que pour dire que la créance de Mme Y... s'est trouvée éteinte par le règlement de la somme de 747,79 euros et, en conséquence, déclarer nul le commandement aux fins de saisie-vente litigieux, l'arrêt retient que le tribunal d'instance n'a pas précisé si les sommes dues au titre des indexations de loyers devaient porter intérêt et à quel taux et qu'en tout état de cause, le juge de l'exécution ne pouvait se substituer au premier juge en invoquant l'article 1153-1 du Code civil, celui-ci ne prévoyant que les intérêts relatifs aux sommes versées à titre d'indemnité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il entrait dans les pouvoirs du juge de l'exécution de préciser qu'en vertu de l'article 1153 du Code civil, le montant de la condamnation prononcée par le jugement du 16 novembre 2000 à titre de rappel de loyers avait produit de plein droit des intérêts au taux légal à compter de la demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a pris en compte les provisions acquittées mensuellement par les preneurs au titre des charges, l'arrêt rendu le 2 octobre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, signé et prononcé par M. Séné, conseiller le plus ancien, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatre.