AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, et les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN et THOUVENIN, avocat en la Cour ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... André,
- Y... Paul,
- Z... Armand,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 19 décembre 2003, qui les a condamnés, le premier, pour abus de biens sociaux, recel, complicité de faux et d'usage, le deuxième, pour complicité d'abus de biens sociaux, de faux et d'usage, le troisième, pour faux et usage, complicité et recel d'abus de biens sociaux, chacun, à 3 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel :
Attendu que ce mémoire, produit au nom d'Armand Z... par un avocat au barreau de Tarascon, ne porte pas la signature du demandeur ; que, dès lors, en application de l'article 584 du Code de procédure pénale, il n'est pas recevable ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour André X... et Paul Y..., pris de la violation des articles 121-6, 121-7, 321, 441-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré les prévenus (André X... et Paul Y..., les demandeurs), respectivement complices des délits de faux et d'usage de faux ainsi que du délit de recel de faux et les a condamnés de ces chefs ;
"aux motifs que si Paul Y... et Armand Z... tentaient de justifier l'émission de la facture par la Sarl A2G en arguant de la réalité d'une prestation de service qu'ils auraient eux-mêmes effectuée auprès de Mata SA ou de Mata Industrie, ils n'étaient ni salariés de cette société, ni expressément mandatés par elle pour une telle prestation ; que par ailleurs Armand Z... n'avaît perçu ni salaire, ni honoraires de la part d'A2G pour la réalisation d'une prestation correspondant à celle facturée par cette société ; que si le fait d'émettre cette facture et d'en réclamer le montant non dû, auprès de la société Mata SA, ne constituait qu'un écrit mensonger qui ne pouvait à lui seul caractériser l'infraction reprochée, la production de ce qui paraissait être, au demeurant, un rapport plus fictif que surévalué, ainsi que les allégations de prestations de service et de conseil non démontrées par les prévenues, étaient autant d'éléments matériels et verbaux destinés à donner force et crédit à la facture mensongère ; que dès lors, de par son inscription dans un contexte où elle devenait la preuve d'agissements frauduleux, celle-ci constituait un faux ;
"alors que, d'une part, après avoir relevé qu'Armand Z... avait la qualité de gérant de la Sarl A2G, émettrice de la facture litigieuse du 10 juin 1998 correspondant à une étude intitulée projet-partage réalisée par lui-même et par Paul Y..., facture adressée à la société Mata Industrie, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, énoncer ensuite que la réalité de la prestation de service était démentie par le fait qu'Armand Z... n'avait perçu aucun salaire, ni honoraires de la part d'A2G, pour la réalisation d'une prestation correspondant à celle facturée par cette société quand, dans le cadre de son activité de gérance, le dirigeant perçoit une rémunération globale au titre de ses fonctions ;
"alors que, dautre part, la rédaction d'une facture, portant prétendument sur des opérations imaginaires, constitue une simple allégation soumise à vérification qui ne peut, du seul fait des prétentions verbales du rédacteur ou d'autres intervenants, caractériser le délit de faux et son usage tels que définis par l'article 441-1 du Code pénal" ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour André X... et Paul Y..., pris de la violation des articles 242-6,3 du Code de commerce, 121-6 et 121-7 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré les prévenus (André X... et Paul Y..., les demandeurs) respectivement coupables du délit d'abus de biens sociaux, comme auteur et comme complice, et les a condamnés de ces chefs ;
"aux motifs que si André X... avait indiqué s'être adressé à Armand Z... et Paul Y..., parce qu'il les connaissait, sans se soucier de savoir s'ils appartenaient ou non à la société A2G, il lui incombait cependant en sa qualité de président du conseil d'administration, avant de payer un montant aussi important que la somme de 241 000 francs, de vérifier les liens de ces derniers avec A2G ainsi que l'exactitude de l'origine de la facture ;
"alors que le délit d'abus de biens sociaux n'est constitué qu'autant que son auteur, dans sa fonction de dirigeant, a fait des biens de la société un usage qu'il savait contraire aux intérêts de celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait reprocher à André X... de ne pas avoir vérifié les liens unissant l'un des rédacteurs de l'étude, Armand Z..., et la Sarl A2G, émettrice de la facturation litigieuse, tout en constatant que le 10 juin 1998, jour de l'émission de la facture, le premier avait accepté le protocole de cession de 1 % des actions qu'îl détenait dans la société Mata SA au profit de la société A2G gérée par le second, signataire de l'accord, motifs contradictoires qui excluaient la prétendue mauvaise foi du dirigeant susceptible de caractériser le délit d'usage abusif de biens" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;