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22/09/2004 | FRANCE | N°03-80857

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 septembre 2004, 03-80857


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller DESGRANGE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Raymond,

contre l'arrêt de la cou

r d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 19 novembre 2002, qui, pour ten...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller DESGRANGE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Raymond,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 19 novembre 2002, qui, pour tentative d'escroquerie, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1, 121-5 du Code pénal, 7, 8, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean-Raymond X... coupable de tentative d'escroquerie, en répression, l'a condamné à 18 mois d"emprisonnement ferme et a prononcé sur les réparations civiles ;

"aux motifs que le prévenu s'est présenté le 29 mars 1993 à la Barclays Bank à Paris et obtenu de M. de Y... qu'il authentifie une procuration par laquelle Erwin Z... le désignait comme étant son mandataire ; que dès que M. de Y... a été informé des manoeuvres de Jean-Raymond X... et Erwin Z..., il a adressé le 7 avril 1993 un courrier à la Barclays Bank Of Kenya à Nairobi pour indiquer que cette procuration était "nulle" car ses interlocuteurs "avaient l'intention de l'utiliser comme un nouvel outil frauduleux" ; que Jean Raymond X... qui ne peut justifier de la propriété des fonds qu'il réclame a tenté de créer l'apparence de cette propriété par des manoeuvres frauduleuses ;

que la tentative manifestée par un commencement d'exécution n'a manqué son effet qu'en raison du refus de la banque d'effectuer la remise des fonds ;

"alors, d'une part, que les juges du fond doivent répondre aux moyens de prescription dont ils sont saisis ; que la tentative d'escroquerie, délit instantané, est consommé par la première manoeuvre frauduleuse susceptible de constituer un élément du délit d'escroquerie ; que, dans ses conclusions aux fins de confirmation du jugement de relaxe, le prévenu relevait qu'il s'était manifesté pour la première fois auprès de la Barclays aux fins de règlement de la somme litigieuse dès le mois de mars 1993, de sorte que, à la date de dépôt de la plainte avec constitution de partie civile de la Barclays, soit le 26 novembre 1997, les faits étaient prescrits ; qu'en omettant de s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, d'autre part (et à titre subsidiaire), qu'il résulte des constatations de l'arrêt que, parmi les éléments dénoncés par la Barclays sous la qualification de tentative d'escroquerie, figure la production en mars 1993 d'un télex confirmant le dépôt sur le compte litigieux de la somme réclamée par le prévenu et d'une procuration l'autorisant à agir sur ce compte ; que le délai de prescription ayant ainsi commencé à courir dès le mois de mars 1993, et l'infraction reprochée se trouvant prescrite à la date de dépôt de la plainte avec constitution de partie civile, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, encore, que le délit de tentative d'escroquerie commence à se prescrire au plus tard au jour où la victime, ayant constaté qu'elle était l'objet de manoeuvres frauduleuses commises à son encontre ayant pour but l'obtention prétendument indue de fonds, a manifesté sa volonté d'y faire échec ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la Barclays avait acquis au plus tard en avril 1993 la certitude du caractère prétendument indu des revendications du prévenu, de sorte que l'infraction reprochée se trouvait nécessairement prescrite à la date de dépôt de la plainte avec constitution de partie civile ; que la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, que Jean-Raymond X... est prévenu d'avoir, en employant des manoeuvres frauduleuses, en l'espèce l'usage d'un faux télex, tenté de tromper la Barclay Bank of Kenya pour la déterminer à lui remettre 27 887 056 dollars créditant un compte supposé ouvert à son nom auprès de cette banque ; qu'il est intervenu à plusieurs reprises, notamment le 5 mai 1995, par l'envoi d'un ordre de virement sur son compte au Crédit agricole de Montpellier et, le 25 janvier 1996, par une assignation en référé devant le tribunal de commerce pour faire condamner l'établissement bancaire au paiement de ladite somme ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'il prétend, la prescription de l'action publique n'était pas acquise le 26 novembre 1997, date du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile de la Barclay Bank of Kenya ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1, 121-5 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean-Raymond X... coupable de tentative d'escroquerie, en répression, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement ferme et a prononcé sur les réparations civiles ;

"aux motifs que le télex du 1er mai 1987 est un faux ;

qu'en l'état de l'inexistence du compte mentionné par le télex et en l'absence de dépôt des fonds dont il se prétendait propriétaire, Jean-Raymond X... savait nécessairement que le télex litigieux était un faux en écriture ; que le prévenu a sciemment excipé de ce télex, seul justificatif de la propriété des fonds, pour tenter d'en obtenir la remise ; qu'il s'est présenté le 29 mars 1993 à la Barclays Bank à Paris et obtenu de M. de Y... qu'il authentifie une procuration par laquelle Erwin Z... le désignait comme étant son mandataire ; que dès que M. de Y... a été informé des manoeuvres de Jean-Raymond X... et Erwin Z..., il a adressé le 7 avril 1993 un courrier à la Barclays Bank of Kenya à Nairobi pour indiquer que cette procuration était "nulle" car ses interlocuteurs "avaient l'intention de l'utiliser comme un nouvel outil frauduleux" ;

que Jean-Raymond X... qui ne peut justifier de la propriété des fonds qu'il réclame a tenté de créer l'apparence de cette propriété par des manoeuvres frauduleuses (faux télex, utilisation de l'entrevue avec M. de Y... ... ) ; que ces manoeuvres sont exclusives de toute bonne foi ; que la tentative manifestée par un commencement d'exécution n'a manqué son effet qu'en raison du refus de la banque d'effectuer la remise des fonds ;

"alors, dune part, que l'expert Norek a exclu toute conclusion définitive s'agissant de l'authenticité du télex du 1er mai 1987 en l'absence de production par la Barclays de télex authentiques de la même époque, en provenance de Nairobi et de Francfort ; que, comme le faisait valoir le prévenu, la partie civile s'étant abstenue de toute production susceptible de conforter le défaut allégué d'authenticité, la cour d'appel ne pouvait affirmer que, en l'état des investigations de I'expert Norek, ce télex serait un faux, sauf à dénaturer les constatations du rapport d'expertise auxquelles elle prétend les emprunter ; qu'en statuant pourtant en ce sens, par des motifs impropres à caractériser l'élément matériel de la tentative d'escroquerie imputée au prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors, d'autre part, qu'une tentative d'escroquerie ne peut résulter de la seule production d'un écrit supposé mensonger ;

que la manoeuvre frauduleuse ne peut résulter que de circonstances ayant pour but et pour objet de dissimuler le caractère faux ou mensonger du document, et de tenter d'obtenir la remise indue des fonds litigieux ;

que tel n'est pas le cas de l'authentification par la Barclays d'une procuration faite par Erwin Z... au bénéfice du prévenu laquelle, ne pouvant servir de justification de la propriété des fonds placés sur le compte mentionné par le télex du 1er mai 1987, n'a pu exercer aucune influence directe et immédiate sur la tentative du prévenu de se faire remettre ces fonds ; que la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1, 121-5 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean-Raymond X... coupable de tentative d'escroquerie, en répression, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement ferme et a prononcé sur les réparations civiles ;

"aux motifs qu'en l'état de l'inexistence du compte mentionné par le télex et en I'absence de dépôt des fonds dont il se prétendait propriétaire, Jean-Raymond X... savait nécessairement que le télex litigieux était un faux en écriture ; que Jean-Raymond X... qui ne peut justifier de la propriété des fonds qu'il réclame a tenté de créer l'apparence de cette propriété par des manoeuvres frauduleuses (faux télex, utilisation de l'entrevue avec M. de Y... ... ; que ces manoeuvres sont exclusives de toute bonne foi ;

"alors, d'une part, que ni la prétendue inexistence du compte mentionné par le télex, ni l'absence alléguée de dépôt des fonds par Erwin Z..., ne sont de nature à établir que le prévenu aurait eu conscience de ce que le télex du le, mai 1987 serait un faux en écriture ; que, à défaut, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, d'autre part, qu'en déduisant la mauvaise foi de Jean-Raymond X... de l'impossibilité pour lui de justifier du dépôt et de la propriété des fonds litigieux cependant que, en matière pénale, la charge de la preuve de la mauvaise foi du prévenu incombe à la partie poursuivante, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément intentionnel de l'infraction reprochée et, renversant la charge de la preuve, a méconnu le principe de la présomption d'innocence ;

"alors, en outre, que le jugement infirmé a constaté que la mauvaise foi du prévenu ne pouvait résulter du simple fait que ne serait pas démontré le dépôt de fonds effectué par Erwin Z..., celui-ci ayant pu parfaitement tromper son mandant, à savoir Jean-Raymond X... ; qu'en s'abstenant totalement de s'expliquer sur les motifs des premiers juges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19, alinéa 2, 132-24 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Jean-Raymond X... à la peine de 18 mois d'emprisonnement ferme ;

"aux motifs que, compte tenu de ces éléments et de la personnalité de l'intéressé, la Cour estime équitable de le condamner à la peine de 18 mois d'emprisonnement ferme ;

"alors qu'en s'abstenant de motiver spécialement la peine d'emprisonnement ferme au regard tant de la gravité des faits reprochés que de la personnalité du prévenu, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 132-24 du Code pénal" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué, partiellement reprises aux moyens, mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de tentative d'escroquerie dont elle a déclaré le prévenu coupable et prononcé une peine d'emprisonnement sans sursis par des motifs qui satisfont aux exigences de l'article 132-19 du Code pénal ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Desgrange conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-80857
Date de la décision : 22/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, 19 novembre 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 sep. 2004, pourvoi n°03-80857


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.80857
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