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07/09/2004 | FRANCE | N°04-80761

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 septembre 2004, 04-80761


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Geneviève, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de CAEN, en date du 20 janvier 2004, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte

, contre personne non dénommée des chefs d'homicide involontaire et de non-assistanc...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Geneviève, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de CAEN, en date du 20 janvier 2004, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée des chefs d'homicide involontaire et de non-assistance à personne en danger, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-6 et 223-6 du Code pénal, 86, 575-6 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse à des articulations essentielles du mémoire de la partie civile, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré n'y avoir lieu à suivre sur la plainte pour homicide involontaire et non-assistance à une personne en danger déposée par Geneviève X... à la suite du décès de son époux ;

"aux motifs que, si les professeurs Y... et Z... ont considéré que les soins prodigués à Jacques X... par les médecins de l'hôpital de Valognes n'avaient pas été suffisamment attentifs et s'ils ont souligné que la coloscopie décidée tardivement et de manière incomplète avait aggravé l'état du patient, opinion partagée par le docteur A..., ils n'ont pas conclu que la coloscopie avait eu pour conséquence directe et certaine un choc septique en relation avec une bactérie d'origine digestive, cause immédiate du décès de son mari ;

qu'en effet, le professeur Y... a indiqué que lorsqu'il existait des éléments infectieux la coloscopie pouvait entraîner le passage de germes de l'intestin dans la circulation générale sans affirmer que cela s'était produit dans le cas de Jacques X... ; que le professeur Z... a conclu qu'un choc septique en relation avec une bactériémie d'origine urinaire ou digestive apparaissait "beaucoup plus plausible" sans affirmer que ce choc était la cause certaine du décès de Jacques X... ; que si, par ailleurs, Jacques X... a quitté l'hôpital de Valognes alors que son état était "médiocre" et sans qu'aucun diagnostic satisfaisant n'eût été établi, au lendemain d'une coloscopie qui comportait des risques, et s'il a regagné son domicile en véhicule sanitaire léger, il ne résulte pas des travaux des experts que les circonstances dans lesquelles sa sortie de l'hôpital a été réalisée aient eu des conséquences sur l'évolution de son état et son décès intervenu sept jours plus tard ; qu'il convient d'ailleurs de souligner que le professeur Y..., dans son rapport complémentaire, a clairement énoncé qu'aucun élément clinique ou biologique ne révélait d'insuffisance hépato-cellulaire lorsque Jacques X... était hospitalisé à Valognes, qu'il n'existait aucun lien entre le décès de celui-ci et le défaut de soins attentifs susceptible d'être reproché au personnel soignant de cet hôpital et qu'il n'était pas certain, compte tenu de la pathologie qui a entraîné le décès de Jacques X..., qu'un traitement plus précoce ou plus efficace eût pu éviter l'issue fatale ; que de même, le professeur Z... a indiqué dans son rapport que les insuffisances qu'il a relevées à la charge des médecins de l'hôpital de Valognes n'étaient pas en relation certaine de cause à effet avec le décès de Jacques X... ; que c'est dès lors à bon droit que le juge d'instruction, après avoir constaté qu'aucun lien certain n'était établi entre les fautes alléguées et le décès de Jacques X..., a considéré que l'information n'avait pas permis de réunir contre le docteur B..., chef du service dans lequel Jacques X... a été hospitalisé, ni contre aucun autre membre du personnel soignant de cet hôpital, des charges suffisantes d'avoir commis le délit d'homicide involontaire ; que par ailleurs, à supposer même que les manquements relevés par les experts aient été en relation certaine avec la mort de Jacques X..., ces manquements n'auraient pu fonder une poursuite pénale qu'à la condition de constituer une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité que les médecins ne pouvaient ignorer, ainsi que l'énoncent les dispositions combinées des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal ;

que le défaut de soins suffisamment attentifs par suite de négligences, d'inattention, d'insuffisance de compétence ou de manque de personnel, que les experts Y... et Z... ont mis en exergue, ne saurait être qualifié de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ni de faute caractérisée qui exposait Jacques X... à un risque d'une particulière gravité que les auteurs des soins insuffisamment attentifs connaissaient parfaitement ;

que par ailleurs, c'est encore à juste titre que le juge d'instruction a considéré que l'infraction de non-assistance a personne en péril ne pouvait être constituée ; qu'en effet, il ne peut être valablement soutenu qu'en autorisant Jacques X... à quitter l'hôpital, étant précisé qu'aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que cette sortie a été imposée à celui-ci, le docteur B... s'est abstenu volontairement de porter à son patient l'assistance qu'il pouvait lui prêter, étant observé que lors de son séjour à l'hôpital de Valognes le diagnostic d'insuffisance hépato-cellulaire n'était pas posé et que l'infraction de non-assistance à péril ne peut être constituée que lorsque la personne mise en cause a conscience de la gravité du danger auquel elle expose autrui par son inaction ;

"alors que, d'une part, après avoir elle-même constaté que les quatre professeurs en médecine, commis en qualité d'experts au cours de l'enquête préliminaire et de l'instruction, les professeurs C..., Y..., Z... et A..., avaient tous mis en cause la coloscopie pratiquée sur le patient sans son accord et suivie de son renvoi à son domicile où son état s'était brutalement aggravé au point que pendant la nuit suivante, il avait dû être hospitalisé de nouveau d'urgence, la chambre de l'instruction, qui a en outre relevé que selon les mêmes experts, cette coloscopie avait pu aggraver l'état général du patient qui n'avait dès lors cessé de se détériorer jusqu à son décès survenu sept jours plus tard, a méconnu l'obligation d'instruire qui résulte de l'article 86, alinéa 4, du Code de procédure pénale en confirmant l'ordonnance de non-lieu sans répondre aux articulations essentielles du mémoire de la partie civile, invoquant les conditions dans lesquelles la coloscopie avait été réalisée et en se bornant à faire valoir qu'il n'existait pas de relation certaine de cause à effet entre les insuffisances relevées et le décès et qu'en tout état de cause les conditions d'application de l'article 221-6 du Code pénal n'étaient pas réunies, la chambre de l'instruction devant au minimum dans ces conditions, ordonner, conformément à la demande de la partie civile, un supplément d'information ;

"alors, d'autre part, qu'après avoir relevé que les experts Y... et Z... avaient estimé que les soins prodigués au patient à l'hôpital de Valognes n'avaient pas été suffisamment attentifs et avoir souligné que le patient avait quitté cet établissement pour regagner son domicile dans un véhicule léger après avoir subi une coloscopie comportant des risques alors que son état était médiocre et sans qu'aucun diagnostic satisfaisant n'eût été établi, ce qui avait entraîné une nouvelle hospitalisation immédiate en urgence, la chambre de l'instruction a violé l'article 223-1 du Code pénal et entaché sa décision d'une contradiction de motifs équivalant à une absence de motifs, privant son arrêt d'une condition essentielle à son existence légale, en confirmant néanmoins l'ordonnance de non- lieu sur les poursuites intentées par la partie civile du chef de non-assistance à personne en péril, au motif inopérant que lors du séjour du patient dans cet hôpital, le diagnostic de la cause immédiate du décès n'avait pas été posé, le texte précité n'imposant pas que l'auteur ait pu connaître précisément la cause de l'affection ayant entraîné le décès de la personne en péril, mais seulement qu'il ait eu conscience de ce péril ou s'agissant d'un médecin, qu'il ait dû avoir cette conscience" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que la demanderesse se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, le moyen est irrecevable et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;

Par ces motifs,

DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Blondet conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-80761
Date de la décision : 07/09/2004
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Caen, 20 janvier 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 sep. 2004, pourvoi n°04-80761


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.80761
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