AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
II - Sur le pourvoi n° F 02-15.331 formé par :
1 / la société anonyme Bureau Véritas,
2 / la société Mutuelle du Mans assurances IARD,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 mars 2002 par la cour d'appel de Paris (23e chambre, section A), au profit :
1 / de la société anonyme Azur assurances,
2 / de la société d'économie mixte du Parc des expositions de Chartres " Chartrexpo ",
3 / de la société Weisrock construction bois,
4 / de la société anonyme Axa assurances IARD, venant aux droits de l'UAP,
5 / de M. Pierre Delattre, en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Weisrock construction bois,
6 / de la société Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres, représentée par son mandataire général pour la France, la société anonyme Lloyd's France,
7 / de Mme Annie Haucourt-Vannier, en qualité de mandataire-liquidateur de la société Les Constructions modernes,
8 / de la commune de Chartres (services techniques),
défendeurs à la cassation ;
Sur le pourvoi n° E 02-20.965 :
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Sur le pourvoi n° F 02-15.331 :
La société Axa assurances IARD, devenue Axa France IARD, la société Weisrock construction bois et M. Delattre, ès qualités, ont formé, par un mémoire déposé au greffe le 31 janvier 2003, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Joint les pourvois n° F 02-15.331 et n° E 02-20.965 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 6 mars et 18 septembre 2002), que la société d'économie mixte du Parc des expositions de Chartres (la société Chartrexpo), maître de l'ouvrage, assurée selon police dommages ouvrage par la compagnie Azur assurances, a, sous la maîtrise d'oeuvre des services techniques de la commune de Chartres, fait construire un bâtiment ; que la société Weisrock construction bois (la société Weisrock), depuis lors en plan de redressement, assurée par la société Axa assurances IARD (la société Axa), était chargée du lot charpente, couverture, bardage métallique, et la société Bureau Véritas, assurée par la société Les Mutuelles du Mans assurances IARD (la MMA), du contrôle technique ; que la société Weisrock a sous-traité les travaux de couverture à la société Les Constructions modernes, depuis lors en liquidation judiciaire, assurée par la société le Lloyd's de Londres ; que des désordres sont apparus après réception ; qu'après déclaration de sinistre et expertise amiable contractuelle, la société Chartrexpo et la compagnie Azur assurances (la compagnie Azur), subrogée après paiement dans les droits de son assurée, ont assigné en réparation les constructeurs et assureurs, qui ont formé entre eux des actions récursoires ; que l'arrêt du 6 mars 2002 ayant, par voie de confirmation du jugement, débouté la société Bureau Véritas et la MMA de leur recours en garantie contre la société Axa, ces parties ont saisi la cour d'appel d'une requête en rectification d'erreur matérielle ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal n° E 02-20.965 :
Attendu que la société Axa, la société Weisrock et M. X..., ès qualités, font grief à l'arrêt du 18 septembre 2002 d'accueillir cette requête, alors, selon le moyen :
1 / que le juge ne peut, sous couvert de rectification d'une erreur matérielle, prononcer une condamnation que ne comporte pas l'arrêt prétendument entaché d'erreur ; qu'en l'espèce, saisi d'une requête en rectification d'erreur matérielle, la cour d'appel a modifié les droits et obligations résultant pour les parties de sa précédente décision du 6 mars 2002 en accueillant une demande en garantie de la société Bureau Véritas et de la MMA contre la société Axa dont son premier arrêt les avait déboutées ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé l'article 462 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'en cas d'incertitude sur la nature de l'erreur invoquée, le juge ne peut modifier l'arrêt sous couvert de rectifier une erreur matérielle ; qu'en l'espèce, il est impossible de savoir avec certitude si la cour d'appel, dans son arrêt du 6 mars 2002, a entendu confirmer ou infirmer le jugement, mais que, cependant, la cour d'appel, dans l'arrêt attaqué, a rectifié l'arrêt du 6 mars 2002 et dit que la société Bureau Véritas et la MMA seraient garanties des condamnations mises à leur charge pas la compagnie Axa assurances ; qu'en conséquence, la cour d'appel a derechef violé l'article 462 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'il résultait des motifs de son précédent arrêt qu'elle avait relevé que l'appel en garantie formé par la société Bureau Véritas et son assureur, la MMA, à l'encontre de la compagnie Axa, assureur de la société Weisrock, était recevable, qu'elle avait dit, appréciant les responsabilités de ces parties en fonction des fautes respectives commises, que cet appel en garantie était fondé puisque l'origine des infiltrations se situait dans le défaut d'exécution imputable au sous-traitant de la société Weisrock, l'absence de réserves dans l'avis donné par la société Véritas constituant seulement un manquement à sa mission sans lien direct avec les désordres, et qu'elle en avait déduit logiquement que la société Bureau Véritas et la MMA devaient être garanties par la compagnie Axa, la cour d'appel, qui, n'ayant pas procédé à une nouvelle appréciation des éléments de la cause, n'a pas modifié les droits et obligations des parties, a pu retenir que la mention, dans le dispositif, de la confirmation du jugement sur ce point, laquelle n'exprimait manifestement pas le sens de sa décision, résultait d'une erreur matérielle pouvant faire l'objet de rectification ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal n° F 02-15.331, ci-après annexé :
Attendu que le premier moyen du pourvoi principal n° E 02-20.965 étant rejeté, le moyen est devenu sans objet ;
Sur le second moyen du pourvoi principal n° E 02-20.965 et le moyen unique du pourvoi incident n° F 02-15.331, réunis :
Attendu que la société Axa, la société Weisrock et M. X..., ès qualités, font grief aux arrêts des 6 mars et 18 septembre 2002 d'accueillir le recours en garantie formé à l'encontre de la compagnie Axa par la société Bureau Véritas et la MMA, alors, selon le moyen :
1 / que commet nécessairement une faute causale, c'est-à-dire à l'origine, même partielle, des désordres, le bureau technique chargé du contrôle des travaux à l'égard du quel il est relevé un manquement consistant à n'avoir effectué ni réserve ni formulé aucun avis concernant la mise en oeuvre d'un procédé de pose de charpente effectué en méconnaissance des règles de l'art par l'entrepreneur, en sorte que l'arrêt, qui constate des carences et omissions de cette nature commises par la société Bureau Véritas et qui exonère celui-ci de toute contribution à la dette au motif que de telles fautes étaient sans lien direct avec le dommage, viole l'article 1147 du Code civil ;
2 / que la cour d'appel, qui retient l'existence d'un manquement de la société Bureau Véritas à sa mission de contrôle de l'exécution des travaux ne pouvait l'exonérer de toute obligation de contribution à la dette, au prétexte que cette faute serait sans lien direct avec les désordres constatés, sans expliquer en quoi l'exécution correcte de sa mission par la société Bureau Véritas n'aurait pas permis d'empêcher la survenance des désordres, prive sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant, par motifs adoptés, relevé, appréciant souverainement la portée du rapport d'expertise dommages ouvrage, que les infiltrations étaient dues à un défaut d'exécution des travaux de couverture consistant en une mauvaise position du joint d'étanchéité par rapport "aux vis de couture" et qu'aucun élément technique ne venait établir la réalité d'un lien de causalité entre ces infiltrations et le procédé de couverture adopté, et retenu que les investigations effectuées au cours de cette expertise n'autorisaient pas la remise en cause de la conception même de la couverture, que le défaut de mise en oeuvre à l'origine des infiltrations n'était pas décelable, que les interventions du contrôleur technique ne s'exerçaient que par sondages et ne comportaient pas d'investigations systématiques, la cour d'appel a pu en déduire qu'aucune faute n'était caractérisée à la charge de la société Bureau Véritas en relation de cause directe avec le dommage ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
I - Sur le pourvoi n° E 02-20.965 :
Condamne la société Axa France IARD, la société Weisrock construction bois et M. X..., ès qualités, ensemble aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Axa France IARD, la société Weisrock construction bois et M. X..., ès qualités, à payer la somme de 1 900 euros à la société Azur assurances et à la société d'économie mixte du Parc des expositions de Chartres " Chartrexpo " ensemble et la somme de 1 900 euros à la société Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD, de la société Weisrock construction bois et de M. X..., ès qualités, de la société Bureau Véritas et de la société Mutuelle du Mans assurances IARD ;
II - Sur le pourvoi n° F 02-15.331 :
Condamne la société Bureau Véritas, la société Mutuelle du Mans assurances assurances IARD, la société Axa France IARD, la société Weisrock construction bois et M. X..., ès qualités, ensemble aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Bureau Véritas et la société Mutuelle du Mans assurances assurances IARD à payer la somme de 1 900 euros à la société Azur assurances et à la société d'économie mixte du Parc des expositions de Chartres " Chartrexpo " ensemble et la somme de 1 900 euros à la société Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Axa France IARD, la société Weisrock construction bois et M. X..., ès qualités, à payer la somme de 1 000 euros à la société Azur assurances et à la société d'économie mixte du Parc des expositions de Chartres " Chartrexpo " ensemble ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD, de la société Weisrock construction bois, de M. X..., ès qualités, de la société Bureau Véritas et de la société Mutuelle du Mans assurances assurances IARD ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille quatre.