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03/06/2004 | FRANCE | N°03-87113

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 juin 2004, 03-87113


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois juin deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de Me ODENT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... François,

contre l'arrêt n° 3 de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 20 octobre 2003, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 18 mois d'empriso

nnement avec sursis, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois juin deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de Me ODENT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... François,

contre l'arrêt n° 3 de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 20 octobre 2003, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'il résulte des pièces de procédure que, le 20 novembre 1998, le directeur des services fiscaux de l'Oise, sur avis conforme de la Commission des infractions fiscales, a déposé plainte auprès du procureur de la République de Senlis contre François X... pour fraude fiscale en matière d'impôt sur le revenu au titre de l'année 1994 ; que l'intéressé a été cité devant le tribunal correctionnel de Senlis qui, par jugement du 23 juin 2000, s'est déclaré territorialement incompétent ; que cette décision est devenue définitive à la suite du désistement de l'administration fiscale devant la cour d'appel d'Amiens constaté par arrêt du 6 février 2001 ; que François X... a été alors cité devant le tribunal correctionnel de Paris pour les mêmes infractions ;

En cet état ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 229 du Livre des procédures fiscales, de l'article 1741 du Code général des impôts, de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des articles 593 et suivants du Code de procédure pénale ;

"en ce qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir écarté l'exception de nullité de la procédure tiré de l'incompétence du service ayant déposé plainte ;

"aux motifs qu'il n'est allégué, de ce fait, une quelconque atteinte aux intérêts du prévenu et que cet aspect de la procédure fiscale est sans effet sur les règles du respect du contradictoire, qui sont seules susceptibles d'affecter la régularité de la procédure pénale ;

"alors que le dépôt de la plainte pour fraude fiscale est l'aboutissement de la première phase des poursuites, ainsi autorisées par la Commission des infractions fiscales et que le caractère non contradictoire de la procédure devant cette Commission exigeait qu'elle soit diligentée par un agent des impôts compétent, de telle sorte que l'arrêt ne pourra qu'être cassé pour violation du principe du contradictoire et atteinte au principe d'exigence d'un procès équitable" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme sur ce point que François X... a soulevé la nullité de la plainte du 20 novembre 1998 et de la procédure subséquente, au motif qu'étant domicilié à Paris à l'époque où les impôts argués de fraude auraient dû être établis et acquittés, le directeur des services fiscaux de l'Oise, auteur de la plainte, n'était pas compétent en application de l'article L. 229 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu que, pour rejeter cette exception, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Que le moyen ne saurait, dès lors, être accueilli ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 230 et L. 231 du Livre des procédures fiscales, des articles 11 et 1741 du Code général des Impôts et des articles 593 et suivants du Code de procédure pénale ;

"en ce qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir refusé de considérer que l'action publique était prescrite au 31 décembre 1998 en raison de l'incompétence territoriale du Procureur de la République de Senlis ;

"aux motifs que l'Administration pouvait considérer qu'il existait à la suite du changement de domicile du prévenu une incertitude sur la compétence territoriale de ses services et qu'en tout état de cause il y a lieu de distinguer l'incompétence territoriale des juridictions, statuant sur le fond, de l'incompétence du Parquet qui ne doit entraîner que son dessaisissement au profit du parquet compétent et non la nullité des actes de poursuite ;

"alors que, d'une part, François X... avait très clairement et régulièrement indiqué sur la déclaration de ses revenus de 1994 qu'il habitait, dès avant le 1er janvier 1995, à Paris et non pas à Coye-La-Forêt (60), de telle sorte que l'arrêt attaqué ne pourra qu'être annulé pour dénaturation de cette déclaration ;

"et alors que, d'autre part, en distinguant entre l'incompétence du Parquet et celle de la juridiction de jugement, l'arrêt attaqué fait une distinction qui ajoute à la loi, de telle sorte que l'arrêt attaqué devra également être annulé pour erreur de droit" ;

Attendu que, pour écarter la demande du prévenu tendant à voir constater la prescription de l'action publique au motif que les instructions aux fins d'enquête données par le procureur de la République de Senlis aux services de police n'avaient pu interrompre la prescription en raison de l'incompétence territoriale de ce magistrat, les juges retiennent que l'administration fiscale pouvait considérer qu'à la suite du changement de domicile du prévenu indiqué par celui-ci dans sa déclaration de revenus, il existait une incertitude sur la compétence territoriale de ses services et que l'incompétence territoriale du procureur de la République, qui apparaît après une plainte et une enquête, ne peut qu'entraîner son dessaisissement au profit du parquet compétent et non la nullité des actes de poursuites ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que l'incompétence territoriale du ministère public n'étant pas manifeste lors du dépôt de la plainte de l'Administration, les actes de poursuite intervenus avaient valablement interrompu la prescription, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 227 du Livre des procédures fiscales, des articles 1741 et suivants du Code général des Impôts et des articles 593 et suivants du Code de procédure pénale ;

"en ce qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir considéré que l'élément intentionnel du délit de fraude fiscale, réprimé par les articles 1741 et suivants du Code général des Impôts, était constitué ;

"aux motifs que François X... déclare avoir eu l'intention de déclarer les plus-values en cause sur le revenu de 1997, soit dans sa déclaration de 1998 ; que force est de constater que, dans cette hypothèse, l'imposition aurait été prescrite au 31 décembre 1997 avant la déclaration envisagée, et que l'importance des plus-values et les fonctions de dirigeant de sociétés de François X... supposaient une certaine connaissance de ses obligations fiscales et, en tout état de cause, exigeaient la présence à ses côtés de professionnels qualifiés qui l'ont informé et conseillé avec exactitude ;

"alors que l'élément intentionnel de l'infraction suppose que soit apportée la preuve d'une volonté manifeste de se soustraire au paiement de l'impôt, sans aucun recours à des arguments hypothétiques ni arbitraires, de telle sorte que l'arrêt ne pourra qu'être cassé pour défaut de motivation et manque de base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, notamment intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme de la Lance conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-87113
Date de la décision : 03/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESCRIPTION - Action publique - Interruption - Acte d'instruction ou de poursuite - Instructions aux fins d'enquête du procureur de la République - Incompétence territoriale du ministère public - Effet.

ACTION PUBLIQUE - Extinction - Prescription - Interruption - Acte d'instruction ou de poursuite - Instructions aux fins d'enquête du procureur de la République - Incompétence territoriale du ministère public - Effet

Dès lors que l'incompétence territoriale du ministère public n'est pas manifeste lors du dépôt de la plainte de l'administration des Impôts pour fraude fiscale, les instructions aux fins d'enquête du procureur de la République ainsi que tous les autres actes de poursuite de ce magistrat interrompent valablement la prescription.


Références :

Livre des procédures fiscales article L229

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 octobre 2003

A rapprocher : Chambre criminelle, 1997-04-03, Bulletin criminel, n° 134, p. 453 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 jui. 2004, pourvoi n°03-87113, Bull. crim. criminel 2004 N° 151 p. 563
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 151 p. 563

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Mouton.
Rapporteur ?: Mme De la Lance.
Avocat(s) : Me Odent.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.87113
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