AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° C 02-70.114 et C 02-70.183 ;
Sur la recevabilité du mémoire complémentaire, examinée d'office :
Attendu que le mémoire complémentaire de la demanderesse au pourvoi, qui soutient un moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est irrecevable, en application de l'article 989 du nouveau Code de procédure civile, dès lors qu'il a été déposé le 19 novembre 2003, soit plus de trois mois après la remise du récépissé de la déclaration de pourvoi formée le 11 décembre 2002 ;
Sur le premier moyen de chacun des pourvois, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 2 avril 2002), que, par décret du 9 décembre 1975, a été créée la réserve naturelle de Roque-Haute ; que Mme de X..., devenue propriétaire en 1988 d'un ensemble de parcelles à l'intérieur du périmètre de la réserve, a saisi le juge de l'expropriation sur le fondement de l'article L. 242-5 du Code rural en fixation d'indemnités à la suite d'un nouveau décret de classement de cette réserve du 23 juillet 1998 ;
Attendu que Mme de X... fait grief à l'arrêt de rejeter ces demandes, alors, selon le moyen, que l'article L. 242-5 du Code rural, alors applicable, prévoyait que le classement donne droit à l'indemnité lorsque, notamment, il "comporte des prescriptions de nature à modifier l'état ou l'utilisation antérieure des lieux" ; qu'il résulte de ces termes mêmes que "l'état ou l'utilisation antérieure des lieux" ne peuvent être que l'état effectif et l'utilisation effective des lieux, tels qu'ils peuvent être constatés à la veille du classement, et non l'état ou l'utilisation théoriques et virtuels des lieux tels qu'ils sont supposés avoir résulté d'un précédent classement ; que, dès lors, en considérant que le préjudice susceptible d'avoir été subi par Mme de X... doit être déterminé selon une méthode consistant à comparer "les obligations résultant de l'état antérieur définies par le décret de 1975 par rapport aux obligations définies par le décret du 24 juillet 1998", la cour d'appel a violé par fausse application les dispositions du premier alinéa de l'article L. 242-5 du Code rural" ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'article L. 242-5 du Code rural devenu l'article L. 332-5 du Code de l'environnement dispose que le classement donne droit à indemnité lorsqu'il comporte des prescriptions de nature à modifier l'état ou l'utilisation antérieure des lieux, la cour d'appel, qui a exactement retenu que le préjudice susceptible d'avoir été subi par Mme de X... devait être déterminé par comparaison des obligations résultant de l'état antérieur définies par le décret de 1975 et de celles définies par le décret de 1998, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les autres moyens dont aucun ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne Mme de X... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de Mme de X... et de l'Etat ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille quatre.