AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mai deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'ADMINISTRATION DES DOUANES,
contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 2 avril 2003, qui, dans les poursuites exercées contre Fabrice X... des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et importation en contrebande de marchandises prohibées, a prononcé sur ses demandes ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 336, 343, 435 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a débouté la demanderesse de sa demande tenant à voir le prévenu déclaré coupable d'importation en contrebande de marchandises prohibées et condamné à payer une somme de 60 000 euros ;
"aux motifs que la saisine du tribunal était limitée à ces seuls 47,6 grammes de cocaïne saisis le 17 novembre 2002, à l'exclusion des quantités que le prévenu a avoué avoir acquis au cours des deux années précédentes lors de voyages antérieurs à Paris pour lesquelles aucune poursuite n'a été exercée tant au regard de l'action publique qu'au regard de l'action douanière ; que l'administration des Douanes qui, en raison du laps de temps très court séparant la présentation du prévenu au parquet et sa comparution devant le tribunal, n'a pu user de son droit de citation directe pour l'application des sanctions fiscales concernant ces marchandises prohibées non saisies ; que si l'administration des Douanes était fondée à agir pour l'application des sanctions fiscales du chef des 47,6 grammes de cocaïne, la juridiction étant saisie de ces faits, elle ne pouvait se prévaloir des déclarations du prévenu recueillies au procès-verbal pour demander à la juridiction de jugement de déclarer ce dernier coupable de ce délit douanier et de la condamner à payer une somme de 60 000 euros pour les quantités de marchandises non saisies que le prévenu a avoué avoir acquis au cours des deux années précédentes dès lors que ces faits n'étaient pas soumis à la juridiction de jugement par l'acte de saisine et qu'il n'est pas établi que le prévenu ait accepté d'être jugé sur ces faits de contrebande ;
"alors qu'en matière douanière, c'est par le procès-verbal que l'objet de l'inculpation est précisé et que l'étendue de la poursuite est fixée sauf en cas de renvoi ordonné par un juge d'instruction, ainsi que le rappelait la demanderesse dans ses conclusions d'appel ; qu'il est constant que par procès-verbal du 17 novembre 2002, le prévenu a reconnu avoir acquis et détenu 12 000 grammes de cocaïne au cours des deux dernières années ;
qu'il n'est pas contesté que le tribunal correctionnel n'a pas été saisi par une ordonnance de renvoi ; qu'en refusant, dès lors, de le condamner de ce chef, motifs pris de ce que les juridictions de jugement n'auraient pas été saisies de ces faits, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Fabrice X... a été contrôlé par les agents des Douanes, le 17 novembre 2002, alors qu'il transportait dans son véhicule un sachet contenant 47,6 grammes de cocaïne qui a été saisi ; que, dans le procès-verbal établi à l'occasion de son audition par lesdits agents, il a indiqué qu'au cours des deux dernières années, il avait transporté un total d'environ 1 200 grammes de cocaïne ; qu'il a été poursuivi, à la requête du seul ministère public, pour infractions à la législation sur les stupéfiants et détention ou transport de marchandises prohibées, commis le 17 novembre 2002, à Beuzeville et sur le territoire national ;
Attendu qu'après l'avoir déclaré coupable des chefs précités pour la quantité de stupéfiants saisie et condamné à payer une amende douanière correspondant à la valeur estimée de cette marchandise, l'arrêt attaqué, pour déclarer irrecevable la demande de l'Administration tendant à l'obtention d'une somme de 60 000 euros pour tenir lieu de confiscation des quantités de cocaïne non saisies mais reconnues par l'intéressé, énonce que le prévenu n'a pas accepté d'être jugé sur ces faits qui n'étaient pas soumis à la juridiction de jugement ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'il résulte des termes de la prévention que la saisine de la juridiction correctionnelle avait été expressément limitée aux faits commis le 17 novembre 2002, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Samuel conseiller rapporteur, MM. Challe, Roger, Dulin, Mme Desgrange, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Soulard conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Chemithe ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;