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19/05/2004 | FRANCE | N°03-82703

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mai 2004, 03-82703


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mai deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de Me CHOUCROY, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Hervé,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5ème chambre, en date du 12 mars 2003, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné

à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné la publication et l'affichage de la dé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mai deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de Me CHOUCROY, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Hervé,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5ème chambre, en date du 12 mars 2003, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 10, L. 47 et L. 74 du Livre des procédures fiscales, 287 et 1741 du Code général des impôts, des instructions des 11 mai, 6 septembre et 4 octobre 1990, de l'article préliminaire et des articles 459 et 593 du Code de procédure pénale et de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse aux conclusions, renversement de la charge de la preuve, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité soulevées par le prévenu ;

"aux motifs que l'avis de vérification accompagné de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ont été expédiés à l'adresse professionnelle du prévenu, que cette lettre a été présentée le 23 février 1998 ; que n'ayant pas été réclamée elle a été retournée à l'envoyeur ; qu'Hervé X... fait valoir que la preuve n'est pas rapportée du fait qu'il ait été avisé par le dépôt d'un avis de passage, de l'existence et de la mise en instance de cette lettre ;

mais que la mention sur l'accusé de réception, de la date de présentation de la lettre par le facteur constitue une preuve suffisante à la fois de ce que celui-ci s'est présenté à l'adresse indiquée et à la date dont s'agit, muni du pli litigieux, et de ce qu'il a laissé sur place, en l'absence du destinataire, un avis de passage indiquant la mise en instance de ce pli au bureau de poste, comme le lui prescrit expressément la réglementation postale ; qu'à cet égard l'argument soutenu par le prévenu tendant à subordonner l'administration de cette preuve, en ce qui concerne le dépôt de l'avis de passage, à l'existence de la mention "absent avisé" sur le pli lui-même, n'est fondé, contrairement à ce qu'il prétend sur aucune disposition de la réglementation postale en vigueur, telle qu'elle résulte notamment des instructions des 11 mai, 6 septembre et 4 octobre 1990 ; que dès lors que les préposés de La Poste n'ont plus à porter une telle mention sur l'enveloppe, lorsqu'ils remettent l'avis de passage, le juge ne saurait, pour s'assurer de la réalité de cette remise, continuer à exiger l'accomplissement d'une telle formalité, qui en l'état des obligations du service des facteurs, ne rajoute aucune information utile à la mention de la date de présentation ; qu'Hervé X... soutient encore, que la lettre ayant été renvoyée à l'expéditeur dès le 6 mars 1998 alors qu'elle aurait dû rester en instance au bureau de poste jusqu'au 10 mars inclus, le délai de garde a été réduit de cinq jours francs ce qui a constitué à son égard "une violation particulièrement grave de son droit à se défendre" ; mais que le prévenu ne prouve, ni même n'allègue qu'avisé de la mise en instance du pli litigieux, il ait vainement cherché à le retirer pendant la période invoquée entre le 6 mars et le 10 mars 1998 ; qu'à l'audience, il a précisé que le retour anticipé du courrier à l'expéditeur ne lui avait causé aucun grief ; qu'en tout état de cause, la vérification fiscale n'a pas commencé avant l'expiration du délai réglementaire de mise en instance ; que l'administration des Impôts a pris toutes les mesures nécessaires pour informer Hervé X... de la procédure de vérification de sa comptabilité et l'informer de ses droits ; qu'ayant refusé d'aller retirer le courrier recommandé qui lui avait été adressé à cet effet, Hervé X... ne peut invoquer l'irrégularité de la procédure, tirée d'une prétendue violation des dispositions des articles L. 10 et L. 47 du Livre des procédures fiscales ; qu'il ne peut davantage se plaindre de ne pas avoir bénéficié d'un débat oral et contradictoire, la procédure d'évaluation d'office des bases d'imposition, mise en oeuvre par l'Administration en vertu de l'article L. 74 du Livre des procédures fiscales, ayant été rendue nécessaire par l'absence du prévenu au rendez-vous qui lui avait été fixé et par son refus de prendre contact de manière utile pour la fixation d'un autre rendez-vous ;

"alors que, d'une part, c'est à l'administration fiscale et non au contribuable qu'il incombe de prouver que ce dernier s'est préalablement, avant toute vérification, vu remettre la charte des droits et obligations du contribuable vérifié et a été régulièrement informé de la vérification ainsi que de la faculté qui lui appartenait d'être assisté par un conseil de son choix conformément aux dispositions prévues à peine de nullité par les articles L. 10 et L. 47 du Livre des procédures fiscales ; qu'en l'espèce où la Cour a déduit la preuve de l'accomplissement de ces formalités de la mention figurant sur l'accusé de réception, de la date de présentation de la lettre avertissant le prévenu de la vérification projetée, les juges du fond, qui n'ont pas contesté l'absence de toute mention relative au dépôt d'un avis de passage destiné à avertir le contribuable absent de l'existence de cette correspondance, ont violé les instructions de l'administration des postes des 11 mai, 6 septembre et 4 octobre 1990 qui exigent toujours le dépôt d'un avis de passage quand le destinataire d'une lettre recommandée avec accusé de réception est absent ainsi que les articles L. 10 et L. 47 du Livre des procédures fiscales, la date de présentation de la lettre prévue par ces textes, n'impliquant aucunement que le contribuable absent lors de cette présentation, ait pu en connaître l'existence ;

"alors, d'autre part, que le prévenu ayant dans ses conclusions d'appel, souligné les dysfonctionnements des services du bureau de poste concerné et contesté avoir pu être averti régulièrement de la vérification projetée par l'administration fiscale dès lors qu'un premier avis de vérification avait été envoyé à son ancienne adresse professionnelle, que le deuxième avis qui avait été présenté le 23 février 1998, n'avait pas fait l'objet d'un avis de passage, qu'un troisième avis de vérification n'avait pas été présenté à son domicile et que la lettre qu'il avait adressée par la suite à l'inspecteur des Impôts pour lui fixer un rendez-vous était sans rapport de causalité avec ce troisième avis de vérification, la Cour qui, sans s'expliquer sur ces moyens tout en reconnaissant sans en tirer aucune conséquence que le délai de garde de l'avis de vérification présenté le 23 février 1998 avait été abrégé par les services postaux de cinq jours, a néanmoins affirmé sans le justifier que le prévenu s'était volontairement abstenu d'aller retirer à La Poste le pli recommandé qui lui avait été adressé le 23 février 1998 pour l'avertir de la vérification, a, ce faisant, entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions" ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la procédure de contrôle fiscal soulevée par le prévenu et tirée de l'absence de remise de l'avis de vérification de comptabilité et de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, les juges énoncent que l'avis et la charte ont été adressés par l'administration fiscale à l'intéressé par lettre recommandée avec accusé de réception, datée du 19 février 1998, présentée le 23 février suivant, que n'ayant pas été réclamée, cette lettre a été retournée à l'envoyeur, que la mention, sur l'accusé de réception, de la date de présentation de la lettre constitue une preuve suffisante que le facteur s'est présenté à cette date à l'adresse indiquée avec le pli litigieux et qu'il a laissé l'avis de passage indiquant la mise en instance du courrier au bureau de poste, la mention "absent avisé" sur le pli n'étant plus exigée et ne rajoutant aucune information utile ; qu'ils retiennent que le retour anticipé du courrier à l'expéditeur, avant l'expiration du délai de garde de quinze jours, n'a causé au prévenu, selon ses propres déclarations, aucun grief, celui-ci n'ayant pas cherché à le retirer pendant cette période et la vérification fiscale n'ayant pas commencé avant l'expiration de ce même délai ; qu'ils concluent que l'Administration a pris toutes les mesures nécessaires pour informer le contribuable de la procédure engagée à son encontre et l'aviser de ses droits et qu'ayant refusé d'aller retirer le courrier recommandé qui lui était adressé, l'intéressé ne peut invoquer une prétendue violation des articles L. 10 et L. 47 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1741 et 287-3 du Code général des impôts, L. 227 du Livre des procédures fiscales, 388 et 593 du Code de procédure pénale, 6-3.a de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hervé X... coupable d'omission de dépôt de la déclaration prévue au 3 alinéa de l'article 287-3 du Code général des impôts et de dissimulation volontaire des sommes sujettes à l'impôt par souscription de déclarations de bénéfices non commerciaux et d'ensemble des revenus minorées ;

"aux motifs qu'Hervé X... ne justifie pas du dépôt de la déclaration datée et signée prévue au 3 alinéa de l'article 287-3 du Code général des impôts ; que l'administration fiscale rapporte la preuve, par des pièces versées au débat en particulier par les deux rapports dressés par l'inspecteur vérificateur, de la dissimulation volontaire par Hervé X... d'une part des sommes sujettes à l'impôt par souscription de déclarations de bénéfices non commerciaux et d'ensemble des revenus minorées avec cette circonstance que la dissimulation excède le dixième de la somme imposable et la somme de 1 000 francs ;

"alors que, d'une part, le prévenu ayant été poursuivi exclusivement, en ce qui concerne les fraudes fiscales en matière de TVA, pour non-dépôt des relevés abrégés et de la déclaration récapitulative, et la Cour ayant constaté que les faits étaient prescrits pour les relevés abrégés qui devaient être déposés en 1996 et ayant relaxé le prévenu du chef d'omission de déposer courant 1997, la déclaration récapitulative afférente à l'année 1996 après avoir constaté que le demandeur justifiait du dépôt de cette déclaration récapitulative, a, en invoquant à son encontre un défaut de dépôt de la déclaration prévue au 3 alinéa de l'article 287-3 du Code général des impôts qui n'était nullement visé par les poursuites, statué sur des faits dont elle n'était pas saisie par le titre de la poursuite et violé l'article 388 du Code de procédure pénale ainsi que les droits de la défense ;

"alors, d'autre part, que la déclaration de TVA prévue par l'article 287-3, troisième alinéa, du Code général des impôts étant facultative puisque le redevable n'est tenu de la déposer que s'il estime que le montant des acomptes déjà versés au titre de l'année ou de l'exercice est égal ou supérieur au montant de la somme qui sera finalement due en sorte qu'il peut se dispenser de nouveaux versements, la Cour n'a pas caractérisé l'existence d'une infraction punissable commise par le demandeur en application de ce texte après avoir reconnu que les faits d'omission de dépôt en 1996 des déclarations abrégées étaient prescrits et que le prévenu avait bien déposé en 1997 la déclaration récapitulative afférente à l'année 1996 ;

"et qu'enfin, le délit de soustraction au paiement de l'impôt n'étant punissable que si le contribuable a agi volontairement et les poursuites pénales exercées sur le fondement de l'article 1741 du Code général des impôts étant par leur nature et leur fondement distinctes de la procédure administrative d'évaluation d'office, la Cour, qui s'est fondée sur les seules évaluations de l'administration fiscale pour en déduire l'existence de dissimulations punissables, a méconnu le principe de l'indépendance de ces procédures, violant ainsi les dispositions de l'article L. 227 du Livre des procédures fiscales" ;

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de fraude fiscale par souscription de déclarations de bénéfices non commerciaux et d'ensemble des revenus minorées dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen qui, en sa troisième branche, se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que, la peine prononcée étant justifiée par la déclaration de culpabilité du chef précité, il n'y a pas lieu d'examiner les première et deuxième branches du moyen, qui discutent le délit de fraude fiscale par omission du dépôt de la déclaration prévue au 3ème alinéa de l'article 287-3 du Code général des impôts ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme de la Lance conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-82703
Date de la décision : 19/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5ème chambre, 12 mars 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 mai. 2004, pourvoi n°03-82703


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.82703
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