AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit avril deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle THOUIN - PALAT et URTIN-PETIT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Maurice,
contre l'arrêt de la cour d'assises des COTES-D'ARMOR, en date du 25 juin 2003, qui l'a condamné, pour viols et agressions sexuelles aggravés, à 12 ans de réclusion criminelle ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 315, 316 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'assises d'appel, par arrêt incident, a rejeté la demande de supplément d'information et de renvoi présentée par le conseil de l'accusé, aux termes de ses conclusions du 25 juin 2003 ;
"aux motifs qu'au regard des faits résultant de l'accusation dont la Cour se trouve être saisie, la mesure d'expertise et les autres investigations sollicitées ne sont pas utiles à la manifestation de la vérité ; que si le témoignage d'Aurélie Y... est de nature à constituer un élément de preuve soumis à l'appréciation de la Cour et du jury, ledit élément a été produit devant l'accusé, en audience publique, puis contradictoirement débattu ; qu'immédiatement après la déposition d'Aurélie Y..., puis ultérieurement, lors de la confrontation entre Aurélie Y... et sa mère Jacqueline X..., l'occasion adéquate et suffisante de contester ce témoignage à charge et d'en interroger l'auteur a été donné tant à l'accusé Maurice X... qu'à son conseil, conformément aux dispositions de l'article 6 3 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'il y a, en conséquent, lieu de rejeter la demande de supplément d'information et de renvoi" (procès-verbal des débats, page 21) ;
"alors 1) qu'en estimant que la mesure d'expertise et les autres investigations sollicitées n'étaient pas utiles à la manifestation de la vérité, tout en admettant que les propos tenus par Aurélie Y... constituaient un témoignage à charge, comme tel susceptible d'emporter la conviction des juges quant à l'appréciation de la culpabilité de l'accusé, la cour d'assises, qui s'est déterminée par des motifs contradictoires, a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;
"alors 2) que conformément à l'article 316, alinéa 2, du Code de procédure pénale, les arrêts rendus sur incidents contentieux ne peuvent préjuger du fond ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande de renvoi de l'affaire à une session ultérieure, la cour d'assises a énoncé que l'accusé et son conseil n'avaient pas usé de la faculté qui leur était offerte, avant le dépôt des conclusions aux fins de renvoi, de contester ce témoignage à charge ; qu'en l'état de ces énonciations admettant implicitement la pertinence de ce témoignage, et retenant ainsi, à la charge de l'accusé, des éléments qui, n'étant par ailleurs pas indispensables pour motiver l'arrêt, conduisaient à mettre en doute certaines affirmations dudit exposant, et étaient à tout le moins de nature à avoir une incidence sur le jugement du fond, la cour d'assises a violé le texte susvisé" ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de supplément d'information et de renvoi, la Cour prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après achèvement de l'instruction à l'audience et par des motifs relevant de son appréciation souveraine, la Cour a justifié sa décision ;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 380-3, 380-9, 380-10, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Maurice X... à la peine de douze années de réclusion criminelle ;
"alors que conformément à l'article 380-3 du Code de procédure pénale, la cour d'assises statuant en appel sur l'action publique ne peut, sur le seul appel de l'accusé, aggraver le sort de ce dernier ; qu'en l'espèce, il est constant que par arrêt du 14 juin 2002, la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine a déclaré Maurice X... coupable des faits visés à l'accusation et l'a condamné à huit années d'emprisonnement ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier officiel que le ministère public ait régularisé, à l'encontre de cette décision, un appel principal dans le délai de l'article 380-9 du même Code, ni un appel incident dans le délai de l'article 380-10 ; que, dès lors, en condamnant néanmoins le demandeur à la peine de douze années de réclusion criminelle, la cour d'assises, statuant en appel, a aggravé le sort dudit l'appelant et violé les textes susvisés" ;
Attendu que, contrairement à ce qui est allégué, le ministère public ayant interjeté appel incident de l'arrêt rendu en première instance, la cour d'assises statuant en appel pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article 380-3 du Code de procédure pénale, aggraver le sort de l'accusé ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Pelletier conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;