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27/04/2004 | FRANCE | N°03-84132

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 avril 2004, 03-84132


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept avril deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, de Me HEMERY, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Claude,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 12 mars 2003, q

ui, dans la procédure suivie contre lui du chef de diffamation envers un particulier,...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept avril deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, de Me HEMERY, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Claude,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 12 mars 2003, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de diffamation envers un particulier, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 133-9 et 133-11 du Code pénal, 29, alinéa 1, et 32, alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881, 2, 15 et 21, alinéa 3, de la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002, 520, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le jugement déféré pour violation non réparée des formes prescrites par la loi à peine de nullité ;

"aux motifs que le jugement, rendu le 13 septembre 2002 par le tribunal de grande instance de Narbonne, a déclaré Jean-Claude X... coupable du délit de diffamation publique envers un particulier et en répression l'a condamné à une amende de 600 euros ; qu'il est constant que le délit poursuivi est amnistié et qu'aucune peine ne peut plus être prononcée et qu'il ne peut en être tiré aucune conséquence quant à la nullité du jugement déféré qui sera seulement réformé sur ce point ;

"alors qu'est nulle en la forme, la décision des juges répressifs prononcée en méconnaissance des règles de compétence, lesquelles sont d'ordre public ; que, lorsque, comme en l'espèce, une cour d'appel constate que les premiers juges ont prononcé une condamnation pénale à l'encontre d'un prévenu tandis qu'à la date à laquelle ils ont statué, l'infraction était de droit amnistiée et qu'ils n'avaient par conséquent compétence que pour prononcer sur les intérêts civils, elle a l'obligation impérative, à peine de voir sa décision censurée, d'annuler le jugement déféré en application de l'article 520 du Code de procédure pénale" ;

Attendu que, la cour d'appel ayant constaté l'extinction de l'action publique par l'amnistie, est irrecevable faute d'intérêt le moyen qui fait grief à l'arrêt d'avoir refusé d'annuler le jugement qui avait omis de faire application de l'article 2 de la loi d'amnistie du 6 août 2002 ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 53 et 55 de la loi du 29 juillet 1881, 555 à 558 du Code de procédure pénale, 427, 591 et 593 du même Code, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la citation introductive d'instance ;

"aux motifs, repris des premiers juges d'une part, que Jean-Claude X... soulève l'exception de nullité de la citation délivrée le 1er août 2001 aux motifs que, contrairement aux dispositions des articles 455, 556, 557, 558 et 559 du Code de procédure pénale, l'exploit n'a pas été délivré ni à la personne de Jean-Claude X..., ni à son domicile, ni même à une employée ;

attendu, d'une part, que c'est à tort que le prévenu vise les dispositions de l'article 455 du Code de procédure pénale qui n'ont aucun rapport avec le litige et d'autre part que la citation a été délivrée au 37 avenue de ... à Paris 15ème ; or, il apparaît à la lecture des pièces fournies par Jean-Claude X... lui-même (copie de la lettre du 23 avril 2002 rédigée par Mme Y...) et copie de la lettre du même jour rédigée par Jean-Claude X... lui-même adressée à Mme Y..., copie d'une décision du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Narbonne en date du 4 avril 2002, multiples lettres rédigées par Jean-Claude X... lui-même et par Fernand Z... (copie d'une publication d'extrait d'une décision de justice rendue par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Montpellier, en date du 4 septembre 2001, copie de plusieurs correspondances) que Jean-Claude X... a donné régulièrement comme domicile l'adresse au 37 ... à Paris 15ème ;

il est donc malvenu et en tout cas inopérant d'envisager l'absence de domicile à ladite adresse ; cet argument sera rejeté ; que, par ailleurs, il est tout aussi inopérant, en ce qui concerne Mme A..., la personne à laquelle a été remis l'exploit, d'invoquer sa qualité d'employée Immovac et non pas de Jean-Claude X... lui-même, sachant que ce dernier exerce ses activités sous l'enseigne Immovac ; qu'en outre, en ce qui concerne l'absence de l'avis de réception de la lettre recommandée, l'huissier instrumentaire a bien porté sur l'acte la mention selon laquelle la formalité prescrite par l'article 557 du Code de procédure pénale a été accomplie par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 août 2001 ; que cette mention vaut jusqu'à inscription de faux et qu'en conséquence la citation ne saurait être déclarée nulle en l'absence de récépissé d'envoi ou d'avis de réception ;

"au motif propre d'autre part, que Jean-Claude X... a bien comparu devant les premiers juges et a pu présenter sa défense sur cette citation délivrée à sa secrétaire au ... à Paris ;

"1 ) alors que l'huissier doit faire diligence pour délivrer l'exploit à la personne même du destinataire et en tout cas à son domicile, lequel ne se confond pas avec son lieu de travail, la délivrance de l'exploit sur le lieu de travail à une employée étant de nature à priver la personne poursuivie pour diffamation publique du droit effectif de signifier dans les délais à son adversaire son offre de preuve, ce qui a précisément été le cas en l'espèce selon les propres constatations de l'arrêt, grief qui est incontestable et que la cour d'appel a refusé de prendre en compte dans sa décision ;

"2 ) alors qu'il se déduit des dispositions de l'article 427 du Code de procédure pénale que les juges correctionnels ont l'obligation d'examiner toutes les pièces régulièrement versées aux débats par les parties et expressément invoquées dans leurs conclusions ; qu'en l'espèce, pour déclarer régulière la citation introductive d'instance, la cour d'appel s'est bornée à se référer aux motifs des premiers juges visant des documents d'où ils ont pu déduire que l'huissier avait délivré la citation au domicile de Jean-Claude X... situé ... sans examiner le chef péremptoire des conclusions d'appel du prévenu invoquant un certain nombre de pièces officielles (taxe d'habitation 2001, carte de sécurité sociale, photocopie de la carte d'identité établie à Paris le 16 mars 1993, formulaire Europ Assistance, compte bancaire, facture Bouygues Telecom et bulletin n° 3 du casier judiciaire) d'où il résulte que son domicile est situé ... (Paris 16ème) méconnaissant ainsi le principe de procédure susvisé lequel est un élément essentiel du procès équitable" ;

Attendu que le moyen revient à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus dont ils ont déduit que la citation introductive d'instance avait été délivrée au domicile réel du prévenu ;

Qu'un tel moyen ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 53 de la loi du 29 juillet 1881, 648 du nouveau Code de procédure civile, 485, 550, alinéa 1, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité tirée du caractère irrégulier de la notification de la citation introductive d'instance au ministère public ;

"aux motifs, repris des premiers juges, d'une part, que Jean-Claude X... soutient que la dénonce faite à Madame le procureur de la République est nulle car l'acte d'huissier ne mentionne que les références de la SCP Vincent et Cabon sans indication précise des noms, prénoms, demeure et signature de l'huissier qui a instrumenté comme l'exigent les dispositions de l'article 648-3 du nouveau Code de procédure civile et que par voie de conséquence, la poursuite est également nulle en vertu de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu'en effet la signification de la dénonce ne mentionne que les référence de la SCP Vincent et Cabon, huissiers de justice associés et le tampon de ladite SCP et la signature de l'huissier instrumentaire ; que si, conformément aux dispositions de l'article 648-4 du nouveau Code de procédure civile, tout acte d'huissier doit comporter les mentions citées ci-dessus, il n'en demeure pas moins d'une part qu'en l'espèce lesdites mentions portées sur l'acte contesté suffisent à identifier clairement la SCP d'huissiers et d'autre part que conformément aux dispositions de l'article 114 du nouveau code de procédure civile, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle, la nullité ne peut être prononcée qu'à condition pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause cette irrégularité ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le prévenu se contentant de relever l'exception ;

"au motif propre, d'autre part, que Jean-Claude X... n'invoque aucun grief à la suite de la prétendue violation de l'article 648-3 du nouveau Code de procédure civile qui n'a pas d'application devant les juridictions répressives ;

"alors que l'irrégularité en la forme de la notification au ministère public de la citation introductive d'instance porte par elle-même atteinte aux intérêts de la personne poursuivie ; que la notification de la citation au ministère public, en tant qu'elle est faite par exploit d'huissier, doit être, conformément aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 550 du Code de procédure pénale, régulière au regard des textes qui régissent les actes d'huissier ; qu'aux termes de l'article 648 du nouveau Code de procédure civile, dont les dispositions sont générales et s'appliquent par conséquent aux exploits délivrés en matière répressive, tout acte d'huissier doit comporter les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice et que la cour d'appel qui constatait qu'en l'espèce la notification au ministère public ne comportait pas l'ensemble de ces mentions, ne pouvait refuser de prononcer son annulation" ;

Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel a écartée à bon droit, ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt a déclaré Jean-Claude X... coupable de diffamation publique envers un particulier ;

"au motif que la parfaite mauvaise foi de Jean-Claude X... transparaît à travers les écritures de son conseil ;

"alors qu'un tel motif, qui procède d'une censure des écritures du conseil du prévenu, constitue une violation caractérisée des droits de la défense" ;

Attendu que le moyen, qui critique des motifs surabondants de l'arrêt, ne peut qu'être écarté ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 29, alinéa 1, 32 et 53 de la loi du 29 juillet 1881, 388, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir ;

"en ce que l'arrêt attaqué a alloué des dommages-intérêts à la partie civile en raison d'un prétendu délit de diffamation publique envers un particulier commis par Jean-Claude X... ;

"aux motifs, repris des premiers juges, qu'en l'espèce, le contenu de la lettre incriminée et le procédé utilisé dans sa rédaction consistant à désigner nommément Fernand Z... comme "ayant eu plusieurs condamnations correctionnelles pour abus de confiance, escroquerie, voies de fait..." en précisant le lieu de ces condamnations ("Alpes-Maritimes, Belgique") pour en donner une apparence de véracité, ou encore comme "ayant été frappé d'une interdiction d'exercer quelque commerce que ce soit" et aussi de le qualifier de "travailleur clandestin" constituent autant d'imputations ou d'allégations de faits précis de nature diffamatoire ;

"alors que les juges ne peuvent légalement statuer que sur les faits qui leur sont déférés par la citation qui les a saisis ; que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer à la lecture de la citation introductive d'instance que si la partie civile visait un écrit du prévenu faisant état de condamnations pénales le concernant prononcées par les juges des Alpes-Maritimes ainsi que de l'interdiction d'exercer quelque commerce que ce soit, elle n'estimait pas ces propos diffamatoires à son encontre et que par conséquent, en entrant en voie de condamnation à l'encontre du demandeur au titre de ces propos en-dehors de toute comparution volontaire - au demeurant impossible compte tenu des dispositions spécifiques de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 - de celui-ci sur ce point, les juges du fond ont excédé leurs pouvoirs" ;

Attendu que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que, contrairement à ce qui est allégué, la citation introductive d'instance visait comme diffamatoires les propos repris au moyen, lequel, dès lors, manque en fait ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Chanet conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-84132
Date de la décision : 27/04/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, 12 mars 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 avr. 2004, pourvoi n°03-84132


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.84132
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