AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois février deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller BEYER et les observations de Me de NERVO, avocat en la Cour ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- LA SOCIETE FRANCE CARS INTERNATIONAL ,
- LA SOCIETE NOUVELLE FRANCE CARS, parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 6 mars 2003, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre personne non dénommée, pour, notamment, vol et recel, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 311-1 et 311-3 du Code pénal, violation de la loi et manque de base légale ;
"en ce que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a déclaré n'y avoir lieu à suivre des délits de vol et de recel de vol ;
"aux motifs que, s'agissant des infractions de vol et de recel des disques chronotachygraphes, l'information n'a pas établi que les salariés auraient emporté, hors des locaux de l'entreprise, ces dispositifs qui se trouvaient en leur possession pour les nécessités de leur travail ; que la mention qui figure dans l'audition de M. X... aux termes de laquelle celui-ci s'est engagé à remettre aux enquêteurs "photocopie des disques conservés en sa possession" ne permet pas de déterminer, l'orthographe des procès-verbaux étant parfois approximative, si les disques ou seulement leur photocopie a été conservée ; que des photocopies exécutées alors qu'elles constituaient, en l'état des déclarations recueillies au cours de l'information, la base du décompte contradictoire des horaires effectués, ne saurait se voir reconnaître, dans ces conditions, un caractère frauduleux ; que, de même, la mention du protocole d'accord, selon laquelle M. Da Y... admet "ne pas avoir restitué leurs disques" aux sociétés parties civiles n'implique pas la reconnaissance d'un vol, la non restitution étant susceptible d'être seulement la conséquence d'une négligence ;
"alors que toute appropriation de la chose d'autrui, contre le gré de son propriétaire ou légitime détenteur, caractérise la soustraction frauduleuse constitutive de vol et cela quels que soient le mobile ayant inspiré son auteur ou la durée de cette détention ;
qu'en l'espèce la chambre de l'instruction a déduit l'absence de volonté d'appropriation des disques chronotachygrahes ou de leurs photocopies de la circonstance que des documents constituaient la base du décompte contradictoire des horaires effectués ; qu'en statuant ainsi, alors que l'appréhension desdits documents ne serait-ce que le temps nécessaire à leur reproduction avait suffit à réaliser une prise de possession frauduleuse, la cour d'appel a privé de base légale sa décision au regard des articles 311-1 et 311-3 du Code pénal ainsi que le principe ci-dessus rappelé ;
"alors, ensuite, que la chambre de l'instruction ne pouvait pas relever que "l'information n'a pas établi que les salariés auraient emporté, hors des locaux de l'entreprise, ces dispositifs (les chronotachygraphes) qui se trouvaient en leur possession pour les nécessités de leur travail" puis, que les salariés avaient conservé les disques ou leurs photocopies et, en tout cas ne les avaient pas restitués, sans entacher sa décision de contradiction ; qu'en conséquence l'arrêt attaqué ne satisfait pas aux exigences de son existence légale" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 314-1 et suivants du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, violation de la loi et manque de base légale ;
"en ce que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a déclaré n'y avoir lieu à suivre du délit d'abus de confiance ;
"aux motifs que des photocopies exécutées alors qu'elles constituaient, en l'état des déclarations recueillies au cours de l'information, la base du décompte contradictoire des horaires effectués, ne saurait se voir reconnaître, dans ces conditions, un caractère frauduleux ; que, de même, la mention du protocole d'accord, selon laquelle M. Da Y... admet "ne pas avoir restitué leurs disques" aux sociétés parties civiles n'implique pas la reconnaissance d'un vol, la non restitution étant susceptible d'être seulement la conséquence d'une négligence ; que, pour le même motif, l'abus de confiance, qui ne peut résulter ni de la négligence ni du retard à restituer, n'est pas établi ;
"alors qu'en s'abstenant de répondre au moyen péremptoire du mémoire par lequel les parties civiles faisaient valoir, d'une part, que le règlement CEE 3820/85 du 20 décembre 1995, le décret 86-1130 du 17 octobre 1986 et l'ordonnance 58-1310 du 23 décembre 1958 imposaient aux salariés des entreprises de transport de restituer les disques chronotachygraphes à leur employeur dans le délai impératif de huit jours, d'autre part, que cette réglementation était affichée et remise contre décharge à chaque chauffeur et, enfin, que les salariés des deux entreprises s'étaient vus vainement réclamer par lettres recommandées avec avis de réception, la restitution des disques, circonstances caractérisant le détournement des disques, l'arrêt de la chambre de l'instruction ne satisfait pas aux exigences de son existence légale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par les parties civiles appelantes, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés ;
Que les demanderesses se bornent à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;
Que, dès lors, les moyens sont irrecevables, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Beyer conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;